Robert Redford : « La télévision est viable et sa qualité augmente »

0

A l’occasion d’une programmation spéciale sur Sundance Channel, Robert Redford a rencontré le Cerveau pour une brainterview autour du cinéma indépendant, sa carrière et Sundance. 

C’est à L’occasion d’une programmation Spéciale sur la chaine Sundance ce Samedi 26 Septembre avec deux films distingués lors de l’édition 2015 du Sundance Film Festival, The Strongest Man et Christmas Again, seront diffusés ce soir sur Sundance Channel, que le Cerveau a rencontré un grand monstre du cinéma : Robert Redford.

Un monstre bien en forme et tout aussi charmant, souriant, comme un grand sage, qui était de passage à Paris début septembre pour promouvoir la chaîne et le Festival Sundance qui fête ses 30 ans. Une rencontre tout en cinéma pour une brainterview en table ronde, autour de sa carrière et ses engagements à la télévision, au cinéma ou dans l’environnement.

Le Festival Sundance est devenu la plate-forme du cinéma indépendant, qu’est ce qui lui vaut son succès, et cette ampleur ?

Mr Robert REDFORD in Paris for Sundance ChannelJe n’aurais jamais cru que le festival fonctionnerait autant. Je pensais que les gens au début étaient séduits parce que c’était une nouvelle idée, les gens aiment la nouveauté mais je ne pensais pas que ça durerait. Et quand ça dure on se demande ce qui va se passer et comment ça va évoluer, surtout que le festival a pris de l’ampleur plus vite que je ne l’imaginais. Le plus compliqué est, quand on prend autant d’ampleur, l’intégrité. Comment garder son intégrité et rester fidèle à l’essence, mission et objectif du Festival ? La taille peut mettre cela en danger. Et c’est l’enjeux d’aujourd’hui : garder intacte la vision, cette mission.

D’où vous vient cette envie de défendre le cinéma indépendant depuis 30 ans ?

De ma vie. L’indépendance. Mon pays a été fondé sur la notion d’indépendance. Pour moi, c’est synonyme de liberté, de choix. Quand j’ai créé Sundance c’était pour qu’on puisse y développer et voir les films indépendants. Ça remonte aussi à mon enfance. J’ai toujours eu cette forte indépendance, je ne voulais faire partie d’aucune organisation, aucune pensée formatée. Ça fait partie de moi et de ma vie.

Nous vivons une période de grande créativité en Télévision. Avez-vous l’intention de développer davantage la production de séries originales sur Sundance Channel, avec des programmes qui ont eu beaucoup de succès comme Top of The Lake ou Rectify, notamment pour faire concurrence à certaines productions comme Netflix ?

Oui, sans aucun doute ! Netflix maintenant produit même des films, ce qui est une bonne chose ! Sundance Channel sera toujours impliquée dans la diversité, comme Rectify ou Top of The Lake qui ont été des risques très excitants à prendre. Je me souviens quand AMC a proposé ces programmes en me demandant s’il fallait les faire, je me suis dit qu’il fallait leur donner une chance. On n’avait aucune idée à l’époque, ça aurait pu être un désastre, mais ça en valait la peine, il faut présenter de nouvelles choses et je suis très fier de ces séries.

Pour vous on devrait donc donner plus de valeur à la Télévision ? Vous verriez-vous produire, réaliser ou jouer dans une série ?

Absolument ! Je produis déjà quelques séries, quant à la production ou jouer dedans, tout dépendra de ce qu’on propose.  Je pense que non seulement que la télévision est viable, et sa qualité augmente indéniablement. Certains talents qui ne se consacraient qu’au Cinéma sont désormais passés à la télévision. On y est mieux payé, l’engagement est plus court et on a plus d’opportunités. Et je pense que ça aide beaucoup la télévision.

Robert redford paris  festival sundance - top of the lake

En 1956, vous avez vécu à Paris, où vous avez étudié aux Beaux-Arts. Imaginez-vous parfois la vie que vous auriez eue si vous aviez poursuivi dans cette voie ?  Quel type d’artiste auriez-vous pû être si vous étiez resté ici ?

Si j’étais resté à Paris, je serais complètement ruiné aujourd’hui! (Rires). L’artiste qui a eu la plus grande influence sur moi, c’est Modigliani. Peut-être dans ce style. J’aime beaucoup Utrillo, Picasso, et tant d’autres. Mais la façon dont Modigliani voyait la figure humaine, et le pathos de ses dessins, sa simplicité, on eut un impact considérable sur moi.

Vous êtes très engagé dans la cause du changement climatique, qui pour vous est le combat de ce siècle, qu’attendez-vous de la Cop 21 ?

Dans le cadre d’un film que je prépare sur le changement climatique, je reviendrai à Paris en décembre pour la Cop21. A l’ONU, l’essentiel de mon message était de dire : le changement climatique est là et on n’a plus beaucoup de temps. On ne peut pas l’éviter ni le cacher. Si on ne commence pas à penser différemment, on n’aura plus de planète. C’est effrayant de penser à ça. Ce qui est important, c’est l’urgence. Il est urgent d’agir maintenant. On doit essayer de préserver ce qu’il nous reste. En allant contre le pouvoir de l’argent, de ces corporations dans le Golfe du Mexique, dans l’Arctique, qui détruisent tout. Les populations doivent s’unir derrière un véritable leadership. Et moi, la seule chose que je puisse faire, c’est élever ma voix pour le dire.

Et pensez-vous que votre position dans le cinéma peut aider à sensibiliser le public sur ce sujet ?

Je ne sais pas trop. C’est une bonne question parce qu’il y a eu beaucoup de documentaires sur le sujet comme celui d’Al Gore. Je ne sais pas si le cinéma peut vraiment changer les choses, mais ça ne peut pas lui faire de mal. Que cela aide la cause ou non, je ne pense pas que le médium soit assez puissant pour ce faire.

all_is_lost_redford_poster-500x741Vous avez joué dans un de vos derniers films, All is lost, un rôle très puissant et atypique, où vous êtes seul avec très peu de script. Vous aimez expérimenter des choses à l’écran, et ce qu’on a des chances de vous revoir dans quelque chose d’aussi puissant ?

Je l’espère ! J’ai été très heureux de faire ce film, parce que c’était un film qui revenait à l’essentiel, pur. Du pur cinéma, sans effets spéciaux, voix-off, aucune des choses que l’on voit généralement. C’était un merveilleux challenge, très difficile physiquement, mais je l’ai accepté et décidé de faire mes propres cascades. On ne savait pas si je pouvais le faire mais j’ai pu. J’ai vraiment pris du plaisir à faire ce film parce que son histoire et son intention étaient pures. Il permettait à l’audience de s’identifier à moi. J’ai du être très vrai dans ce rôle d’un homme qui devait gérer toutes ces crises les unes après les autres. Ça me permettait d’emmener le public avec moi, de leur faire ressentir les choses que je vivais, mais je devais être authentique pour cela et enlever le superflu. J’adorerai refaire cela, mais cela dépend de ce qu’on me propose. J’ai déjà eu une expérience similaire ,il y a plusieurs années, dans un autre film appelé Jeremiah Johnson en 1972 autour d’un homme perdu dans la nature sauvage. On a beaucoup comparé ce film d’ailleurs à All is Lost. Et je le referai sans hésiter.

Crédit photos :  Droits réservés 2015 / ©Sundance

Partager