Critique du film de fantasy La Demoiselle et le dragon sur Netflix, récit d’émancipation entre le conte et la power-girl, téléphoné.

Dans La Demoiselle et le dragon, Millie Bobbie Brown crie. Beaucoup. Au point qu’on en serait à regretter l’époque bénie où elle incarnait la mutique Eleven dans Stranger Things. Mais ça en dit long sur Damsel où tout s’extériorise, se dit et se donne, de la souffrance aux moindres intentions scénaristiques. Et comme si cela ne suffisait pas, même le méchant dragon de l’histoire, n’en finit pas de déblatérer.

Ce qui est sans doute l’idée la plus lourdingue de cette production Netflix, qui lorgne ostensiblement du côté de Game of Thrones, passée à la moulinette du conte. L’ensemble est arrosé d’une bonne louchée d’un féminisme très marketing car bon, on est en 2024 et les filles ne rêvent plus d’épouser le prince charmant. Du moins, c’est ce qu’on voudrait nous faire croire.

Récit d’émancipation téléphoné

Car quand il est incarné par Nick Robinson, le beau gosse d’un royaume prospère, notre héroïne rechigne moins à convoler en justes noces pour sauver son peuple, au bord de la famine. Mais la voici bientôt sacrifiée et offerte en pâture à une femelle dragon, assoiffée de vengeance.

Jetée dans une grotte où ont péri d’autres fiancées, comme elles, trompées sur la marchandise, elle va se transformer en une « warrior ». Et la voici qui escalade des murs de cristaux, tombe, se blesse salement mais se relève, déchirant toujours plus sa longue robe de princesse qui finit, bien sûr, en un seyant corset sur une jupette lacérée.

Le film est conçu comme un video game avec sa « map », gravée à flanc de rocher. Il n’y a alors plus qu’à dérouler un programme sans surprise. La princesse va passer différentes épreuves, pour affronter comme il se doit le boss de dernier niveau : la maman dragonne, dont lignée a été décimée. Mais entre meufs, on se comprend et la résolution de ce film de survie culmine dans une vengeance, ruinée par la laideur des effets spéciaux.

Désincarnation

Le film, dans son intégralité, semble avoir été généré par une IA, tant sur le plan visuel qu’au niveau de son scénario. Le numérique désincarne un film qui repose paradoxalement tout entier sur une idée de performance physique. Millie Bobbie Brown peine justement à imposer cette physicalité d’héroïne « badass », en quête d’émancipation. Curieusement, on n’est pas loin du rôle qu’elle incarnait dans Enola Holmes où il s’agissait de s’affranchir dans un monde d’hommes, en usant de son intelligence et de sa capacité à se dissimuler. Ici, ce sera dans les souterrains.

La Demoiselle et le dragon reconduit ce prétexte féministe et joue la carte de la diversité, à travers le personnage de la belle-mère, interprétée par Angela Bassett dont malheureusement on ne fait rien ou du moins, pas grand chose. Même traitement pour Robin Wright, la méchante de l’histoire, qui prend à contre-pied son rôle dans Princess Bride.

Malgré son cast luxueux, le film tourne à vide, pour avoir voulu manger à tous les râteliers de l’époque : la fantasy, ça marche bien. Le féminisme aussi et n’oublions pas la diversité au passage. Mais à vouloir opportunément fédérer tous les publics, ce film ne s’adresse finalement à personne.

La demoiselle et le dragon : Bande annonce

crédit photos : ©Netflix