C’est à New York, au beau milieu du tournage du douzième épisode de cette seconde saison, Le Cerveau a pu rencontrer Mike Colter et toute l’équipe de Marvel’s Luke Cage en pleine action ! Retour en dossier sur des rencontres électriques et musclées
Le 16 novembre dernier, le ciel était gris… Il pleuvait… et il faisait donc assez froid dans les rues de Brooklyn, dans la ville de New York… Toutefois, dans les murs des studios de Greenpoint, où les intérieurs des différents décors supposément situés au cœur de Harlem, l’atmosphère était – bien au contraire – tout ce qu’il y a de plus… volcanique !
Sous la supervision du créateur Cheo Hodari Coker, Mike Colter (Luke Cage), Simone Missick (Misty Knight), Theo Rossi (Shades), Alfre Woodard (Mariah) et le nouveau venu Mustafa Shakir (Bushmaster) donnent tous le meilleur d’eux-mêmes pour exécuter une impressionnante scène d’action… que vous pourrez découvrir en fin d’épisode 12 de cette nouvelle saison.
Entre deux prises, et après avoir eu la chance d’arpenter certains décors toujours présents depuis la première saison (Comme le nightclub Harlem’s Paradise) ou d’autres totalement nouveaux (tel que l’herboristerie Mother’s Touch), le Cerveau a pu recueillir, tour à tour, les impressions (à chaud !) de chacun d’entre eux quant aux promesses de cette nouvelle salve d’épisodes et l’évolution de leurs personnages respectifs.
Découvrez ci-dessous cette rencontre très héroïque pour une saison 2 musclée !
Mike Colter (Luke Cage)
La dernière fois que nous avons vu votre personnage, c’était dans la mini-série The Defenders, qui a été écrite et produite par une toute autre équipe que celle de Luke Cage. Avez-vous ressenti une grande différence sur le tournage ?
Je perçois tout cela comme faisant partie d’un tout. Je ne me dis pas : « Cette série est la mienne et celle-ci celle d’un autre »… Je me focalise sur mes scènes et ce que je dois y faire. Après quoi, j’évolue en fonction. Je crois d’ailleurs qu’aucun d’entre nous ne se pose cette question. Nous sommes un groupe constitué de personnes s’étant succédées, chronologiquement, les uns après les autres.
De mon point de vue, The Defenders a été une respiration. Etant une série chorale, votre planning est nécessairement moins chargé. Ce qui permet de souffler un peu lorsque l’on sait que l’on va très vite reprendre un rythme extrêmement soutenu sur la saison 2 de votre série-titre. Je savais que j’aurais encore plus de choses à faire pour cette nouvelle année… Sans même parler du fait que nos séries régulières sont plus longues de cinq épisodes. Un show comme Luke Cage n’a rien d’un sitcom… Chaque épisode dure une heure et nous ne tournons pas uniquement en studios. On travaille 14 heures par jours… On se repose quand on peut. Alors, j’essaie de ne pas trop penser à l’ampleur de l’entreprise. Si on anticipe trop, on se sent vite submergé. Par exemple, il y a trois épisodes de ça, on m’a prévenu qu’il restait deux grandes séquences d’action et quelques reshoots à faire… Et j’ai répondu : « Stop ! Je ne veux rien savoir ».
A présent que Luke est de retour dans son propre « univers » et sous la direction de Cheo Hodari Coker, où en est-il en ce début de saison 2 ?
C’est la suite directe de The Defenders et il poursuit la relation qu’il a commencé avec Claire (Rosario Dawson). Il tente autant de trouver sa place dans le couple que dans les rues de Harlem. Il n’est plus en fuite. Tout le monde le connait et il se demande ce qu’il va bien pouvoir faire. Ses pouvoirs sont dévoilés au grand jour… Et il continue de chercher le moyen de stopper les activités de Mariah, qui est toujours très présente. A travers les premiers épisodes, on découvre un Luke assez différent : lui-même se connait mieux et s’en ressent plus confiant.
Sans être réellement prétentieux, il a conscience de ses facultés et sais que tout le monde l’aime dans cette partie de la ville. Il faut voir Harlem quasiment comme une ville à part entière… Il est devenu un genre de célébrités 30 ou 40 pâtés de maisons à la ronde et c’est pour lui un sentiment assez étrange… Après la première année, j’ai dit aux responsables qu’il faudrait un peu plus d’action en saison 2… Et maintenant, il y en a beaucoup plus que ce à quoi je m’attendais (rires) ! Le fait est que nous passons systématiquement deux jours sur la moindre séquence de combat. Bien qu’elles ne durent généralement que deux à trois minutes à l’écran, c’est le temps minimum nécessaire. Beaucoup de travail et d’angles de prises de vues différents… Beaucoup de préparations… Et tout autant d’énergie soutenue pour obtenir le bon résultat.
Cheo Hodari Coker, créateur de la série
Que pouvez-vous nous dévoiler à propos de l’arrivée de Bushmaster qui, dans l’univers des comics, fait d’ailleurs son entrée via les pages de Iron Fist ?
Il est, et de loin, le plus complexe de nos nouveaux personnages… Dès que nous avons lancé le casting en précisant simplement que nous avions besoin de quelqu’un de grand, afro-américain et parlant avec un fort accent jamaïcain, Mustafa a fait le rapprochement tout seul : « Jamaïcain… Harlem… Méchant… Luke Cage… ça ne peut être que Bushmaster ! ». Nous qui voulions garder le secret, c’était raté (rires).
Nous n’aurions pas dû préciser le côté jamaïcain dans notre annonce… Pourtant, bien qu’il vienne des Caraïbes, John Mclver alias Bushmaster n’est pas Jamaïcain dans les comics… Mais dans notre univers Marvel, il l’est. C’est d’ailleurs ce que j’aime autant avec cette série : nous adaptons les personnages. Oui, bien entendu, nous en puisons l’essence dans les pages d’origine mais nous les interprétons différemment à l’écran. Par exemple, Cottonmouth, notre méchant de la première saison, proposait une toute nouvelle expérience aux lecteurs des comics. De même qu’Alfre Woodard campe une Mariah Dillard extrêmement différente de la Black Mariah de 1973… C’est donc très naturellement, et dans le même esprit, que nous refaçonnons à présent Bushmaster.
Comment décidez-vous quoi conserver et quoi modifier chez un personnage ?
Par une succession de coups de chance, à l’aveugle (rires)… Par exemple, nous avons organisé une fête d’anniversaire pour Mike Colter. Il a été très surpris ! Ce qui nous a fait plaisir. Il a alors décidé de mettre un peu de musique et a lancé une playlist de reggae. Cette fête a été très réussie, notamment grâce à l’ambiance apportée par la musique… Et, pour moi, tout commence toujours avec la musique. Je me suis immédiatement dit qu’il y avait là de quoi explorer quelque chose de totalement inédit dans l’univers Marvel. Nous avions l’opportunité d’introduire une nouvelle culture.
Dans la mesure où, la saison précédente, nous avions présenté la communauté afro-américaine de Harlem, comment pouvions-nous poser un autre regard sur New York ? Quelle nouvelle expérience pouvions-nous envisager ? Et en entendant cette musique, je me suis dit : « Mais c’est extrêmement intéressant… Bushmaster vient des îles. Pourquoi ne pas essayer quelque chose dans ce sens ? ». Tout le monde sait à quel point le hip-hop est important pour moi, dans ma vie de tous les jours… Je suis un ancien journaliste hip-hop qui a aujourd’hui recours à toute cette culture comme inspiration majeure pour l’écriture de la série. Cela influence jusqu’au rythme que j’insuffle à chaque épisode.
Simone Missick (Misty Knight)
Dans l’ultime épisode de The Defenders, votre personnage perdait un bras. Dans quel état retrouve-t-on Misty au début de cette nouvelle saison et la verra-t-on, comme dans les comics, faire équipe avec Colleen Wing ?
Attention : spoiler qui n’en est pas réellement un… Elle va très vite en avoir un nouveau (rires) ! Mais je pense que le plus intéressant, à travers cette nouvelle saison, c’est d’avoir l’occasion de la voir dépasser son « statut d’handicapée »… à savoir quelqu’un passant soudainement de la pleine possession de ses facultés à une façon différente de les appréhender… Et elle vraiment du mal à trouver comment vivre avec elle-même à cet égard. Elle n’est plus la Misty que nous connaissions : cette détective sûre d’elle et extrêmement compétente. Elle est comme déconnectée et doit progressivement se retrouver.
Mais à partir du moment où elle reçoit son nouveau bras, la série propose beaucoup plus d’action et de séquences de combats. Elle se joint à Luke pour affronter les différents monstres du crime voulant dominer Harlem… Ce qui est, pour moi, particulièrement excitant. Quant à l’éventualité d’une association entre Misty et Colleen (Jessica Henwick dans Iron Fist), je dirais simplement que ce serait vraiment gâcher une magnifique opportunité si nous ne le faisions pas (rires)… Nous parlons de deux femmes fortes, souffrant d’un terrible traumatisme. Misty a perdu son bras et Colleen a dû décapiter celui qu’elle considérait presque comme son père… Au même moment de leurs vies, elles doivent se poser cette question commune : « Qui sommes-nous à présent ? ».
Misty a également la faculté de se représenter les scènes de crimes de manière très visuelle… Comme si elle pouvait littéralement « voir » ce qui s’est passé. Est-ce toujours le cas à travers ces nouveaux épisodes ?
Nous appelons ce procédé la « Misty Vision ». Nous avons même une petite chanson que nous fredonnons, entre nous, sur le plateau lorsque nous tournons ces séquences (rires) ! Jeph Loeb (producteur exécutif et garant du « Marvel Television Universe ») me l’a expliqué ainsi : « Ces visions sont un peu comme un sixième sens car seulement les super-héros possèdent des super-pouvoirs ». Dans la première saison, Misty était simplement une détective.
Et maintenant que nous entrons dans la seconde, nous découvrons jusqu’où va l’étendue de ses capacités ; mais sans jamais perdre de vue d’où elle vient. Tout ce que vous pourriez penser qu’il va arriver à une personne qui vient de perdre un membre ne s’applique pas à Misty. Certes, au début, tout est en sommeil… Ses réflexes de détectives, ses « visions »… Elle doit retrouver sa confiance en elle. Mais ces « spécificités » sont, en effet, définitivement présentes en saison 2. On peut dire, qu’à présent, elle a deux super-pouvoirs (rires) !
Alfre Woodard (Mariah Dillard)
Mariah a cette faculté incroyable de changer de personnalité du tout au tout, et en une fraction de seconde, dès qu’elle en ressent le besoin ; le plus souvent pour se sortir d’une situation délicate. Comment appréhendez-vous une telle palette de nuances ?
En tant que comédienne, je suis toujours dans le personnage. Et Cheo est un auteur brillant… Mon travail, avant même d’en arriver au premier jour de tournage, est d’imaginer comment je peux aller au-delà des mots. Je ne veux tout simplement pas être « n’importe quelle femme » se contentant de réciter ces dialogues. Et encore moins en ayant recours à ma propre personnalité… Chaque personnage doit devenir comme une empreinte digitale… unique. Il faut trouver ce qui rend chaque personne différente. Et une fois que c’est fait, vous commencez à vivre avec. Vous savez comment elle fait ses courses, comment elle réagit en fonction de ce qu’on peut lui dire… Vous savez QUI elle est. Plus que savoir, même… Il faut la ressentir corporellement.
Mariah est complexe… Elle vit à la fois comme une afro-américaine et comme une blanche, tout comme une personne de la rue, issue d’une famille de gangsters… Elle dispose d’un véritable arsenal pour exprimer sa personnalité. Et, de fait, elle a de redoutables moyens d’obtenir ce qu’elle veut. Pour mieux pouvoir l’incarner, il faut savoir comment jouer avec l’ensemble de ces caractéristiques comme d’un instrument. Comme une enfant qui changerait de ton pour obtenir ce qu’elle veut : tantôt dans la supplique, tantôt dans l’autorité.
Pensez-vous que la télévision soit propice à une réelle évolution des mœurs ; aussi bien en termes de genres que de couleurs ?
La télévision n’a pas changé, elle est en train de le faire. Et, très franchement, l’une des principales forces motrices de ce changement est Netflix. Ils démocratisent l’imagerie cinématographique sur petit écran. Car on entend trop souvent dire : « Oh, ils ne veulent pas voir des personnages de couleurs dans tel ou tel pays… ça ne se vendra pas ».
Grâce au streaming, Netflix évite de se retrouver face à des distributeurs opérant ce type de barrage. Et, surprise : oui, les gens peuvent s’intéresser à des personnages qui ne leur ressemblent pas. Une bonne histoire est celle qui vous touche à un niveau universel… Et plus vous êtes spécifique, plus ce que vous proposez devient universel. Je pense que l’image filmique est l’outil le plus puissant jamais créé par l’homme…
Mustafa Shakir (Bushmaster)
Avez-vous visionné la première saison de Luke Cage avant de rejoindre le tournage ; d’autant que vous avez quelques points communs avec certains personnages ?
Absolument. Plusieurs fois… Et je l’ai trouvée formidable. C’est vrai que, plus jeune, j’ai été barbier à Harlem. C’est là que j’ai grandi. Naturellement, j’ai vu le parallèle avec la série. Ce qui était très cool… Mais je m’identifie moins à Pop et plus à Luke (rires) ! Toute l’équipe a été particulièrement accueillante. Revenir ainsi à New York… alors que j’ai vécu ces treize dernières années à Los Angeles, de plus pour travailler sur une série de cette ampleur à propos de la vie à Harlem… Enfin !
C’était tout ce que j’attendais. Luke Cage fait que les gens s’intéressent à Harlem et c’est un endroit qui le mérite véritablement. De même, je suis heureux de voir des afro-américains susciter le même intérêt. Et tout spécialement dans le cadre de l’univers Marvel. C’est génial.
Le personnage de Bushmaster a fait son apparition dans les années 70, en qualité d’antagoniste à… Iron Fist ! Avez-vous lu ces premières aventures ?
Oui, j’en ai lu beaucoup durant mon enfance et c’était l’un de mes préférés. Je les connaissais tous… J’adorais ça. Dans les comics, Bushmaster devient le leader de la Maggia, la Mafia Européenne, lorsqu’il arrive en Amérique. Mais, dans la série, nous n’allons pas vers cela. Pas pour l’instant en tout cas… Il est guidé par la vengeance et débarque à Harlem bien décidé à mener sa propre vendetta. J’ai toujours voulu interpréter un rôle très physique. J’aime les défis qui me forcent à me dépasser… Et Bushmaster m’offre exactement cela. C’est un personnage multi-facettes. Vous pouvez le considérer comme un méchant mais je le perçois plutôt comme le héros de sa propre histoire. Oui, il peut être très brutal. Mais, au fond, sa mission est noble. Et cela permet au public de se poser des questions et de ne pas systématiquement tout voir comme étant noir ou blanc. Il n’y a pas de purs gentils ni de purs méchants. Même Luke Cage lutte intérieurement pour mieux se comprendre lui-même…
Theo Rossi (Shades)
Vous êtes en plein tournage d’une scène d’action plutôt massive et votre maquillage simule d’ailleurs plusieurs blessures. Shades semble avoir passé un sale quart d’heure…
(Rires). Le fait est que j’ai réellement pris un coup au visage hier soir… Alors, il se pourrait bien que certains de ces bleus ne soient pas faux ! Mais vous devriez voir les autres gars. Je suis beaucoup moins abimé qu’eux (rires). En revanche, j’ai perdu mes lunettes dans la mêlé pour l’instant… Mais je sais que je finirai par les récupérer puisque nous avons déjà tourné la scène suivante !
Plus sérieusement : la raison pour laquelle j’ai signé pour cette série après avoir tourné Sons of Anarchy était précisément l’expectative de cette saison. Shades semble toujours avoir au moins un coup d’avance sur tout le monde… Sa plus grande force est de savoir exactement où il veut parvenir et comment s’y prendre. Mais, se faisant, il fait croire à plein de gens que ce sont eux qui ont le contrôle. Je crois qu’il est au-delà de la seule manipulation et il a le gros avantage de connaître Luke Cage depuis ses origines. On ne le voit jamais arriver…
Pensez-vous qu’il ait beaucoup changé depuis la saison 1 ?
Shades est vraiment très différent à présent. Ce que j’adore à propos de ce nouveau chapitre, c’est que l’on obtient les réponses à toutes les questions que l’on pouvait se poser. Quelles sont ses intentions ? Pourquoi ? On plonge pleinement dans l’histoire de chacun… Quelle est leur véritable place au sein de cet univers ? Pourquoi sont-ils ici ? Pourquoi existent-ils ?… Cette nouvelle saison est extrêmement concise et se focalise spécifiquement sur une poignée de personnages. Le fait est nous faisons une série très différente des autres. Je le vois d’ailleurs dans la rue tous les jours… Tous ceux qui regarde Luke Cage ne suivent pas nécessairement les autres séries Marvel.
Le show tient par lui-même. Est-ce grâce à la musique, à notre propos ou à notre style ? Je ne sais pas ce qui la rend si unique. Mais il se trouve qu’en seulement treize épisodes d’une saison, j’ai l’impression d’avoir fait plus de choses qu’au cours de l’ensemble de ma carrière. Et j’ai pourtant travaillé sur des projets pour le moins extrêmes (rires). Selon moi, ce personnage était exactement celui dont j’avais besoin. C’est un honneur de faire partie de quelque chose de si différent.
Propos recueillis et traduits par Vivien Lejeune sur le tournage de Luke Cage aux US, novembre 2017. Remerciements à Laura Diaz Mannier, Sarah Darmon, Melissa Loseby, Tyler Zlotnick et Lucile Astesana.
Crédit photos : ©Netflix
Connecte tes Neurones à Brain Damaged sur