Séance en demi-teinte pour cet Immigrant de James Gray qui, malgré tout, ne laisse pas indifférent.

Ces dernières semaines, de nombreux genres de films se sont succédé, chacun avec leur propre postulat de départ. Adapter un roman ou un fait historique, rendre les faits publics sur un sujet grave ou trop longtemps ignoré, faire ressentir au spectateur des sentiments qu’il n’avait jusque là jamais ressenti… Tout dépend de l’intention du réalisateur, de sa capacité à s’y tenir et surtout de la mettre en image. Ici, James Gray ne semble avoir aucune de ces ambitions démesurées et préfère se concentrer sur ce qui, dans un sens, représente l’essence même du cinéma : faire voyager le spectateur en racontant une histoire.

When you’re strange

Ewa et Magda sont deux sœurs polonaises qui ont fui les horreurs de la Grande Guerre pour venir s’installer dans le pays de toutes les possibilités : les États-Unis. Arrivées à Ellis Island, Magda, souffrante, est saisie par les autorités et mise en quarantaine. Ewa se fait rejeter à l’entrée de New-York et s’apprête à se faire expulser quand un inconnu vient prendre sa défense auprès des gardes et lui fait passer la frontière. Cet homme, c’est Bruno. Un homme élégant et respectueux de prime à bord. Il prend la pauvre immigrée sous son aile en lui proposant logement et travail dans l’Amérique de la prohibition et des marchés souterrains. Mais il se trouve que derrière ses airs de gentleman, Bruno cache un tempérament instable qu’il met au service de son rôle de proxénète. Si Ewa veut récolter assez d’argent pour tirer sa sœur d’Ellis Island, elle va devoir choisir entre son intégrité religieuse et la vie de débauche à laquelle Bruno va la forcer.

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I want to be a part of it, New-York, New-York

La première impression que l’on a devant The Immigrant, c’est la beauté de la mise en scène et du décors. L’image a subi un traitement sépia qui n’est pas sans rappeler un certain Jeunet de chez nous. Ambiance chaude et froide en même temps qui vient appuyer les situations dans lesquelles les acteurs vont être confrontés. Le New-York des années 20 est porté à l’écran comme jamais avec des rues grouillantes de vie, baignant dans un sentiment d’interdit sans cesse violé, de morale apparente, laissant place à un monde souterrain où la vénalité seule est maitresse. Un instantané frivole qui cache bien des vices et des désillusions. Autant pour les personnages que pour le spectateur.

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Les désastreuses aventures de Candide, ou les malheurs de la moustache

Cette pauvre Ewa (Marion Cotillard) que l’on suit tout du long et qui s’efforcera de faire son possible pour tirer sa sœur de ce mauvais pas enchainera les situations désespérées au point de rendre le spectateur mal à l’aise. Cette impression ira même plus loin puisqu’à force, l’on vient à se demander si elle ne le fait pas exprès. Ça, ou une fois de plus, le charisme de fer à repasser de Cotillard exacerbe plus que de raison la consternation du spectateur qui aura vite fait de la prendre en grippe. Pour rester du côté du casting, Phoenix est brillant dans son rôle de proxénète qui joue autant avec son entourage que l’audience, tantôt fiable, tantôt colérique. La classe et l’aura qui l’auréolent donnent à une son personnage une profondeur qui vient voler la vedette à la très surestimée frenchy. Par contre, s’il y a bien quelque chose qui reste impardonnable, et là de nombreux fans de Dragon Ball suivront le Cerveau là dessus, c’est ce qu’on qualifiera d’effet Vegeta. Jeremy Rener (jouant ici le frère de Bruno, alias Joaquin Phoenix) que chacun reconnaîtra en Hawkeye des Avengers, se retrouve ici affublé d’un maquillage étrange et surtout d’une horrible moustache qui vient totalement décrédibiliser le personnage plus qu’autre chose. Après, il joue à merveille comme à son habitude, mais comme le dit l’adage : « what has been seen cannot be unseen ». Et ceci, ce petit détail de rien du tout, viendra entacher l’entière expérience qu’offre le film en plus de la performance de l’acteur.

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Que l’on ne se méprenne pas, The Immigrant est un bon film en soi, très bon même. Le traitement graphique léché lui offre un cachet particulier. L’ambiance est prenante, le scénario, bien que déprimant et fataliste, reste captivant et le jeu des acteurs, bien que perfectible comme cité plus haut, convainc. Il reste cependant comme un gout d’inachevé lorsque l’on sort de la salle. Cotillard s’en prend plein la face tout du long, encore et encore, ce qui accentue l’effet dramatique et frustre le spectateur devant cette démonstration de faiblesse et d’abandon face à l’adversité, même si elle garde toujours espoir et donc endure sans broncher. Souffrance nécessaire pour l’histoire ou exagération pas forcément obligatoire ? A vous d’en juger. Le Cerveau reste circonspect.

Bande-Annonce (VOST)

Crédits : ©WildBunch Distribution