Hannibal saison 2 s’est achevée hier soir sur NBC et s’achève ce soir sur Canal +. Une fin cohérente, libérée du chaos narratif et anesthésiant de sa première saison. (spoilers – attention certaines images peuvent choquer la sensibilité de certains)
La première saison de Hannibal était un défilé de plats raffinés sous les yeux du spectateur, qui à défaut de générer de la fascination au fil des épisodes, et d’exciter les papilles, frustrait ce dernier. Avec des faux semblants de distraction, pour éviter de se rendre compte que le véritable sujet et potentiel de cette série n’étaient pas exploités, la nourriture dans Hannibal se met en retrait pour mieux laisser place au sang.
Plongé dans les profondeurs abyssales du gore et de la manipulation psychologique, le bilan de cette saison 2 de Hannibal est bien plus positif que celui de la saison précédente. Du positif qui donnerait presque envie de croire que la série s’est enfin trouvée et délestée de certains de ses défauts, tout en gardant cette prétention qui séduit bon nombre de téléspectateurs dans le monde et la critique. Une prétention qui peux se justifier par son esthétique fascinante, frisant la perfection, mais inadéquate, vu le manque d’équilibre narratif dont elle souffre cruellement.
The game was on
Cette saison, qui commençait sur un flashforward des plus intenses et une confrontation attendue depuis le pilote, rentre enfin dans le sujet : le jeu du chat et de la souris, du chasseur-chassé-qui chasse en retour. Comme sur un échiquier, au fil des épisodes, Will et Hannibal vont se livrer à un duel psychologique, plaçant leurs pions intelligemment afin de déjouer l’autre. Une joute mentale animée par l’envie de montrer au monde le vrai visage du tueur cannibale, cette figure du Mal qui se prend pour une incarnation céleste, une icône de l’antiquité, comme le veut son nom.
Un jeu d’échec qui ne commence réellement qu’au septième épisode de cette saison 2 d’Hannibal, qui, avant de comprendre enfin l’essence de son identité et l’exploiter, va continuer à jouer sur les codes des séries policières, sans réellement choisir de se concentrer sur le réel intérêt d’Hannibal, la série : la genèse de la traque du tueur désormais légendaire.
C’est donc sur 6 voire 7 épisodes que le spectateur continue son apathie devant l’écran, hypnotisé, voire anesthésié par la recette de la saison une, à savoir : échanges psychologico-dramatiques, enquêtes rapides et bazardées sur des tueurs en séries, interactions plus ou moins intéressantes entre les différents personnages, qui, au final, apparaissent comme une distraction. Le tout, porté par une réalisation sublimée à son paroxysme qui fascine les yeux du spectateur, les oreilles bourdonnant de sons musicaux hypnotiques. Le Cerveau défie d’ailleurs tout spectateur de la série d’énumérer, sans tricher, les tueurs qui ont sévi en saison une et deux, au-delà d’Hannibal et d’Hobbes. Des tueurs qui sombrent très vite dans l’oubli et qu’on aurait presque préféré ne pas voir.
Cohérence, manipulations et secrets
Déchargée de ces intrigues parallèles servant rarement l’intrigue principale de la série, Hannibal offre enfin ce qu’on cherche à voir : le duo Hannibal/Will Graham, le lien qui les unit, cette espèce de relation presque patriarcale et d’influence entre les deux hommes. Celle qui se voulait comme un pont entre le cop-show gore, à la Dexter ou Profiler, version élitiste, tout en étant l’adaptation d’une oeuvre littéraire préquelle à ses œuvres cinématographiques, pose enfin ses marques là où elle doit, pour se concentrer sur son pitch de départ : Hannibal, la découverte et capture d’un anti-héros. C’est donc de l’épisode 8 au final de saison que la cohérence, celle qu’on attendait, s’installe. La cohérence narrative couplée à l’esthétique travaillée de la série.
Les plans de la série n’auront jamais autant été en adéquation avec la plongée dans les profondeurs du néant et démoniaques de Will Graham, prêt à tout pour prouver l’identité d’Hannibal. Les images oniriques du Cerf, surexposées en saison une et souvent lissées pour des métaphores assez simples, deviennent plus éparses mais idéalement placées pour illustrer le jeu entre ces deux hommes. Les échanges psychologiques plus fournis, moins « soporifiques » et surtout essentiels à la compréhension de ce jeu, de la dualité de Will, et la volonté d’Hannibal.
Préquelle au Silence d’Hannibal
Le gore anime cette saison. Ceux qui aiment le sang et les visions morbides seront servis. Fini le Top Chef, les assiettes bien dressées et les papilles en émoi. Place au dégoût, à l’horreur avec des séquences extrêmement difficiles à regarder. Des séquences visuelles de corps décomposés, de mises en scènes macabres, encore plus horribles que la saison passée, faisant écho aux longs métrages qui ont inspiré la série au-delà du livre. On pense notamment au cadavre du juge (2×05), à la mise en scène du corps du tueur bestial, Randall, et son exosquelette (2×09). Des séquences écho au pendu d’Hannibal, le film, ou à l’agent accroché aux barres de la cellule d’Hannibal, avant son évasion dans Le Silence des Agneaux.
Autre écho, l’arrivée de Mason Verger. Celui à l’origine du piège lancé dans la suite du Silence des Agneaux, Hannibal. Si le visage défiguré et le récit du milliardaire avaient marqué les spectateurs en salle, la séquence de cette défiguration sera bien plus marquante, hypnotique et horrifiante. Celui qui finira dévoré par des sangliers se dévoile dans la série, qui excelle dans la concordance et les connexions logiques qui sont opérées depuis l’arrivée de Margot Verger en début de saison. On a même droit à la mention de la sœur d’Hannibal, qui d’après les profils dressés dans les livres et les films, la mort serait à l’origine de la psychopathie du psychologue.
Twist finaux
La suite du combat offert en début de saison a bien lieu dans ce dernier épisode. Un final d’Hannibal saison 2 sur le thème de la confrontation. Démasqué, mais toujours en avance de plusieurs coups, Hannibal va offrir son dernier massacre avant de s’enfuir. La suite veut qu’il soit « coincé » et incarcéré à l’institution psychiatrique de Baltimore, lieu de sa première rencontre avec Clarice Starling. C’est donc la fin du jeu, la fin duel, avec un seul défaut à reprocher : le twist assez impromptu et bizarre d’Abigael Hobbes qui revient d’entre les morts avant de mourir à nouveau des mains d’Hannibal.
Un bain de sang à la hauteur du tueur légendaire, pour une séquence qui marque une nouvelle ère dans cette histoire de sociopathe. Une séquence presque lyrique, portée par une photographie sans pareille en Télévision. Une fin qui aurait pu être une clôture de série presque parfaite. Presque comme si ses scénaristes ne s’attendaient pas eux-mêmes à un renouvellement.
On attend de voir ce que nous réserve une saison 3 suite à cette séquence, en espérant qu’elle suive la cohérence qui s’est emparée de cette seconde moitié de saison. Avec des audiences aussi basses que le dernier flop de NBC, à savoir Revolution, Hannibal réunit à peine deux millions de téléspectateurs en moyenne devant les écrans, avec un indice assez bas sur sa cible. Pourtant NBC croit en l’oeuvre de Bryan Fuller, qui aurait déjà une bible allant jusqu’à sept saisons. En attendant, la saison 3 inespérée mais bien commandée, rendez-vous l’année prochaine, pour d’autres massacres.
Crédit photos : ©NBC
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