The Handmaid’s Tale revient ce samedi 23 Septembre à20h40 sur OCS City, le Cerveau vous explique pourquoi tout le monde doit absolument regarder la série primée aux Emmy Awards cette année, pour sa qualité mais aussi sa profondeur narrative. Un dossier engagé du Cerveau !
A l’occasion de l’arrivée de la saison 2 de The Handmaid’s Tale sur OCS, le Cerveau vous explique pourquoi tout le monde devrait regarder la série de Bruce Miller adaptée du roman éponyme, La servante écarlate, dans la langue de Molière (Margaret Artwood).
Non seulement parce qu’elle a été saluée par toute une industrie et qu’elle a eu plusieurs récompenses cette année, notamment 8 Emmy Awards sur 13 nominations. The Handmaid’s Tale est une série qui devrait être vue par tout le monde, surtout quand on analyse et regarde ce qui se passe dans le monde actuellement.
A l’heure où les dystopies ont le vent en poupe, que ce soit sur petit ou grand écran, symbole d’un malaise interplanétaire, The Handmaid’s Tale est une série qui mérite le détour POUR TOUT LE MONDE. Que l’on soit homme ou femme, jeune ou vieux. The Handmaid’s Tale est une claque, au sens propre du terme.
Une claque magistrale
Une grande claque. Une claque magistrale et magnifique, qui fait réfléchir et plonge le spectateur dans un univers qui fait froid dans le dos. Réfléchir sur notre société, notre mode de fonctionnement, nos libertés, nos croyances, la moralité et les fondements de l’humanité.
Une série qui nous rappelle tout au long de ses dix épisodes, ce que l’être humain est capable d’endurer, dans les pires conditions pour survivre, surtout quand ces actes barbares sont sous couvert de moralité et de religion. Quel que soit la société ou pays dans lequel il vit. L’humain, qu’il soit d’Orient ou d’Occident, est capable du pire. L’actualité est là d’ailleurs pour en attester.
Gilead ou l’Enfer sur Terre
Pour ceux qui n’ont entendu parler de la série que de loin, The Handmaid’s Tale se déroule dans un avenir plus ou moins proche. Dans ce monde, suite à une guerre et une baisse de la fertilité mettant en péril la race humaine, les Etats-Unis sont devenus Gilead, un territoire répressif qui revient aux choses essentielles, loin de la technologie et de la modernité, notamment la Foi et la moralité.
Un état où les femmes n’ont plus aucun droit que celui de procréer et éduquer. Dans cette société totalitaire, 4 catégories de femmes existent : les domestiques, les épouses, les tantes et les servantes écarlates. Ces dernières, encore fertiles, n’ont pour mission que de procréer, pour les Commandants.
La série suit DeFred, interprétée par Elizabeth Moss. Cette dernière est une servante pour l’un des couples politiques les plus importants à la tête de Gilead. Le spectateur va suivre son récit de survie en voix-off, entre viols, excisions, exécutions, lapidations, abus et autres maltraitances, alors que cette dernière ne veut qu’une seule chose : retrouver sa fille qui lui a été retirée et fuir cette société totalitaire.
Un hymne féminin
The Handmaid’s Tale est une série qui parle de femmes. Toutes les femmes. Qu’elles soient soumises ou décisionnaires, mères ou non, blanches ou noires. Elle dépeint ce qui fait la force et la faiblesse des femmes avec réalité, conviction et terreur. Elle montre ces liens matriarcaux et féminins, cette solidarité féminine qui est propre à ce genre, encore plus dans l’adversité. Elle montre aussi le visage dur et noir des femmes. Leur réalité, qu’elle soit positive ou négative : leur jalousie, leur machiavélisme et leur intelligence pour arriver à leurs fins. Mais surtout et avant tout : leur force.
Hymne à la femme, The Handmaid’s Tale nous fait voyager dans le temps en quelque sorte. Dans un passé qu’on nous a raconté mais que beaucoup n’ont jamais connu. Un passé dans lequel la femme n’a pas de place, de voix et de droits. Une réalité qui existait encore dans les pays occidentaux il n’y a pas moins de 60 ans. N’oublions pas que les femmes n’ont eu le droit de vote qu’au milieu du 20ème siècle. Nous ne sommes qu’au tout début du 21ème. Dans les années 60 ou 70, les voir travailler, ne serait-ce qu’en tant que secrétaire était presque un outrage. Divorcer, une honte. Quant à les voir s’essayer à des professions à majorité masculines, n’en parlons pas.
Manifeste féministe
Nuancée et profonde, The Handmaid’s Tale n’est pas qu’une dystopie. Elle est un manifeste de notre situation en tant que femme dans ce monde, de la fragilité de notre condition dans une société où l’on pense que la femme a des droits acquis pour de bon. Tout du moins sur le papier. Surtout lors de certains flashbacks, dans notre présent.
Encore aujourd’hui, il est difficile d’être une femme. D’être rémunérée à hauteur de ses compétences, au même titre qu’un homme. D’être représentée dans tous les secteurs professionnels, jusqu’au plus grandes instances gouvernantes. Ou même d’avoir une parité dans l’industrie audiovisuelle (pensez à l’avènement Patty Jenkins avec Wonder Woman qui a créé des émules en 2018 puisque 1ère femme réalisatrice de blockbuster. Nous sommes en 2019. Le Cerveau dit ça, dit rien).
Même aujourd’hui, il est difficile ne pas être jugée pour avoir ou ne pas avoir d’enfants. Ou prendre une femme entrepreneur au sérieux, surtout si elle n’a pas d’enfant (sa carrière étant par dépit de ne pas être mère pour certains – cool non ?). The Handmaid’s Tale nous rappelle ainsi comment la femme sera toujours réduite à son statut de génitrice, celui de créer et porter la vie. Un statut qui depuis la nuit des temps a asservi ce genre humain, continuant encore et toujours de l’asservir même aujourd’hui.
Le quotidien de certaines, même aujourd’hui
On l’oublie encore aujourd’hui. Les femmes, dans certains territoires de la planète, n’ont aucun droit et sont relayées à leur seul statut procréateur et matriarcal. N’ont pas le droit de lire, ou de s’exprimer. Sont cachées, comme ces servantes écarlates.
Non, le Cerveau ne voit pas de différence entre une soutane, une robe de bonne sœur, une abaya, une burqa et les costumes rouges, bonnet-blanc, des servantes écarlates. Si l’intrigue de la série primée aux Emmy Awards est une fiction à part entière, elle puise son inspiration et ses intrigues dans une réalité bien plus effrayante : celle que nous vivons.
Une expérience dérangeante et violente
La série, au-delà d’être une dystopie effrayante à cause de sa résonance et son ambiance assez particulière, crée un véritable malaise, assez bizarre chez le spectateur, pour des émotions jusqu’ici inégalées devant un petit écran. Une émotion vive, prenante et dérangeante qui ne manquera pas de pousser le spectateur dans ses retranchements, un peu comme l’actrice qui incarne l’héroïne de la série, Elizabeth Moss, elle-même poussée dans ses retranchements.
La violence de The Handmaid’s Tale est subtile et plus psychologique que visuelle, même si parfois l’horreur est représentée de manière très graphique. Même si la réalisation, proche d’un cinéma indépendant et d’auteur avec des plans rapprochés et des séquences subjectives ou calculées pour déranger, elle est une expérience comme jamais vue à la télévision. Une expérience que tout spectateur se doit d’expérimenter. Le but d’une œuvre, qu’elle soit télévisée ou sur grand-écran, n’est-elle pas d’offrir au spectateur des émotions et un voyage qu’il ne pourrait jamais vivre dans sa propre réalité ? Avec The Handmaid’s Tale, c’est le cas.
Une série qui appelle à la révolte
Quel est le but de la science-fiction ? Des romans d’Asimov à George Orwell à ceux de Suzanne Collins ou Pierre Boule ? Critiquer, dénoncer notre société et appeler à sortir de la passivité. C’est ce que fait cette adaptation du roman de Margaret Artwood, qui déjà à son époque cherchait à critiquer sa propre réalité en pleine Guerre Froide. La série The Handmaid’s Tale a réussi à mettre ses problématiques au goût du jour. Celle notamment au regard de nos gouvernants, ou comment très vite, un état de libertés les plus larges peut basculer dans la terreur, la dictature. A l’heure d’un certain Trump, qui n’a pas peur de fustiger des communautés dans une démocratie qu’il dirige, Gilead n’est pas très loin.
« N’oubliez jamais qu’il suffirait d’une crise politique, économique ou religieuse pour que le droit des femmes soit remis en question ». Une phrase qui fait froid dans le dos, mais une phrase qui est pourtant tellement vraie. The Handmaid’s Tale, à plusieurs reprises, revient sur le rôle du terrorisme dans l’escalade d’évènements qui vont mener au basculement. Des évènements, aux abords anodins qui ont menés à ces extrêmes jusqu’à la privation des libertés sous couverts de sécurité. Des évènements que nous connaissons d’une certaine manière. Un peu comme ces attaques que nous vivons aujourd’hui, celle de terroristes fous à lier. Des attaques qui font désormais partie de notre quotidien et nous force à abdiquer certains droits inaliénables sous couvert de sécurité et défense.
Echos
Des gouvernants et politiques, des crises que nous laissons faire de manière passive, portés par le tourbillon de notre quotidien stressant. Là où cette dystopie réussi son pari, réside dans les échos multiples que la série fait avec notre réalité, concernant l’état d’urgence, le droit des femmes si fragile, notre liberté et démocratie tout aussi fragile, qui peut mener aux pires dérives, surtout quand elle est aux mains de décisionnaires aux penchants extrêmes.
Des échos qui d’ailleurs résonnent avec effroi et terreur dans notre tête quand on regarde The Handmaid’s Tale et l’on met en parallèle la série avec les évènements qui ont menés à la prise de certains territoires du Moyen-Orient, par des extrémistes similaires à ceux de Gilead : Daesh. Des extrémistes qui utilisent d’ailleurs des femmes comme des objets, que l’on s’échange et cache, sans scrupules. Un peu comme ces servantes. Peu importe le livre religieux qui les inspire, ce qui est à noter ici est que la religion n’est pas le problème. Le problème est l’homme, qui l’utilise à ses fins.
Résistance
Si The Handmaid’s Tale est une série qui fait extrêmement froid dans le dos, en créant stupeur, mal-être et douleur chez le spectateur face à ce qu’endure son héroïne, elle est aussi une série qui appelle à la résistance. L’un des premiers sentiments que le spectateur ressentira est de la colère. Une véritable colère. Une colère animée par la peur que cela devienne réalité. Une colère qui appelle à la résistance. Toute forme de résistance. Mais aussi à l’espoir. Dans cet état de soumission totale, de violence physique sous couvert de moralité religieuse, l’héroïne, June, se découvre une force, une résistance et un caractère qu’elle ne soupçonnait pas.
La série est une ode à toutes ces femmes soumises qui depuis la nuit des temps, sont bien plus fortes et résistantes, voire des pionnières dans certains changements sociétaux, alors que ces dernières n’ont pas de voix ou de droits. Même dans une société aussi répressive et totalitaire – mais aussi schizophrène (le Cerveau pense aux Jezabels) – que celle de Gilead, June ne se laisse pas faire, défie son statut, et reste quelqu’un d’intelligent qui sait profiter des opportunités qui lui sont offertes aussi dérisoires qu’elles puissent être. Nolite te bastardes carborundorum. Bitches.
Hymne à la maternité
The Handmaid’s Tale tourne essentiellement autour du thème de la fertilité. Si toute la série est basée sur le caractère fondamental de procréation de la femme, notamment quand il est question de survie, elle est aussi un hymne au pouvoir d’être mère. Car oui, ce qui anime avant tout DeFred, notamment dans une société où la vie et engendrer la vie, est un bien précieux et nécessaire à la survie de toute l’humanité, est sa maternité. Sacré ironie.
Son envie de retrouver sa fille, sa progéniture, la protéger : toute la clé et besoin de survie, sa résistance à ce qu’elle endure, réside dans son état de mère. Comme une célébration de toutes ces femmes capables d’endurer l’innommable, du viol à l’excision, non seulement pour survivre, mais par instinct primal : celui de protéger et sauver sa progéniture. Une force inépuisable, qu’un homme ne pourra jamais expérimenter, puisque propre au genre féminin. Désolé amis masculins.
Rétro-futuriste
Comme toute dystopie, The Handmaid’s Tale est une série futuriste qui étonne par son absurdité, notamment quand on est habitué à imaginer le futur avec des technologies plus improbables que des voitures volantes ou des voyages interstellaires… Ici, le futur ressemble beaucoup à notre présent, mais aussi à notre passé. Aux années 50 par les costumes des épouses, ou le manque de technologie. Les coiffes et costumes des servantes nous rappellent les premiers colons protestants et leur moralité extrême, mais aussi le peuple Amish, coincé encore aujourd’hui au 18ème siècle. Aucune technologie ne se voit dans les décors de la série au-delà des automobiles. Et quelques ordinateurs ci et là, bien évidemment dans les mains des hommes.
Tout est rétro. Comme si la clé de la survie humaine résidait dans le retour aux choses simples, loin de toute manufacture et hyper-industrialisation. Un message intéressant à l’heure de la PMA et des perturbateurs endocriniens, de l’addiction aux portables et de la perte des repères sans technologie, de la pollution, des OGM, des micro-particules, de l’urbanisation et du bio… Mais surtout à l’heure du réchauffement climatique. Comme si, les fondateurs de Gilead, dans leur retour aux sources, étaient là pour nous rappeler que notre société d’hyper-consumérisme va indéniablement nous mener à notre perte et peut-être nous forcer à sombrer dans le totalitarisme si l’on ne se reprend pas dès aujourd’hui. Again, The Handmaid’s Tale est un rappel à l’ordre et à la résistance.
PEPITE
The Handmaid’s Tale est une pépite immanquable. La série originale produite par la plateforme Hulu et diffusée sur OCS en France, mérite ses récompenses et le buzz qui l’entoure. Cependant, le Cerveau vous aura assez prévenu tout le long de cet article, il faut garder l’estomac bien accroché et surtout ne pas binge-watcher cette série.
Difficile à regarder, violente mais aussi engageante, elle est à voir et déguster avec patience, car elle hante le spectateur longtemps après visionnage. The Handmaid’s Tale est l’une des rares séries qui vous habitera et vous hantera, pour une pépite qui restera dans les annales de la télévision, en espérant qu’elle ne soit pas le présage d’un avenir funeste… et pas seulement pour les femmes.
Crédit photos : ©OCS
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