Hier soir était diffusé sur les écrans de la BBC, le premier épisode de Doctor Who saison 8, avec l’arrivée de Peter Capaldi dans la peau du Docteur. La critique. (spoiler)
L’arrivée d’une nouvelle régénération du Docteur est toujours un moment très attendu depuis le lancement de Doctor Who nouvelle génération en 2005. On se pose plein de questions, on a peur du changement, qu’il soit radical ou léger. Pourtant, le fondement principal de la série est cet éternel renouvellement, avec ce Seigneur du Temps qui change de visage et qui se régénère au fil du temps. Une source de fraîcheur qui permet de réinventer la série à souhait à chaque fois que l’interprète de son personnage principal change.
Cette saison 8 de Doctor Who introduisant le 13ème visage du Docteur n’échappe pas à la règle. Attendu avec impatience par certains et avec beaucoup de réticences pour d’autres, étant donné le choix de son interprète radicalement à l’opposé des autres acteurs qui ont incarné le Docteur, Peter Capaldi a fait son entrée dans l’univers Doctor Who, ce samedi 23 Août 2014. Une entrée fracassante, délirante, farfelue, épique, à la hauteur de ses prédécesseurs et de la marque de la série. Une entrée un poil balisée, qui se laisse quand même fortement apprécier.
Comic Relief
On prend une respiration profonde et on se lance dans l’inconnu. Sans mauvais jeu de mots, avec Deep Breath, le spectateur (et le fan) voyage en décor étranger. Dans l’inconnu… pas si méconnu, puisque dès la première séquence de cet épisode d’ouverture, nous retrouvons notre trio fracassant : Vastra, Jenny & Strax. Un trio qui arrive avec la promesse de beaucoup de blagues et de comique de situation. Et c’est ce qu’on aime. On en oublierait presque l’arrivée du véritable héros de cette histoire, avec ce Londres victorien et ce dinosaure qui se balade sur la Tamise. Le rire, comme une diversion, histoire de ne pas déboussoler le spectateur face à son produit audiovisuel. Les personnages le sont déjà assez. Baliser le récit avec les codes de la série qui pourraient presque apparaitre comme du fan service, une évidence narrative du Showrunner, Steven Moffat, pour présenter Doctor Capaldi en toute délicatesse. Et ça marche.
Un Docteur déboussolé et une Clara dans le même état. Le changement a du mal à passer chez nos amis, même si le trio l’accepte assez vite. Le Docteur, lui, est comme après chaque régénération, perdu. Il se cherche et les autres le cherchent, littéralement : la thématique principale de cet épisode, de sa mythologie au « monstre de la semaine ».
Doctor Malcom Tucker
Que dire de Docteur Capaldi ? Et bien Ladies and Gentlemen, cet écossais a du bon. Peter Capaldi se donne complètement au Docteur au point de presque croire qu’il a toujours été ce dernier. Tellement, qu’à certaines séquences on en oublierait Matt Smith auquel beaucoup étaient très attachés. Une interprétation à la fois noire et psychédélique, attachante et mystérieuse. On ne le connaît que peu, mais Capaldi réussit l’exploit de faire adhérer le spectateur à lui. Une adhésion quasi immédiate, naturelle, grâce à un jeu tout en nuance et une dualité qui présage du bon pour la suite. A l’instar de ses prédécesseurs, ce Docteur sera à coup sûr loin d’être prévisible. Et c’est ce qu’on aime. Mature, bougon, drôle, râleur (après tout il le dit lui-même, puisqu’écossais), peut-être vieux-sage, avec une face cachée bien plus sombre qu’il n’y parait. Un Docteur bien loin des deux précédents jeunots et leur énergie débordante. De quoi donner envie de voir la suite.
Meta Frankenclones
Le changement, comment accepter la transition, le passage d’un visage à l’autre, d’un personnage attachant et aimé à un total inconnu ? Qui est cet étranger, son essence est-elle intacte ? Voici la thématique de Deep Breath. Si les précédentes régénérations ne s’étaient pas attardées autant sur le sujet du changement, que ce soit avec l’arrivée de Tennant ou de Smith, cette ouverture de saison 8 de Doctor Who prend le temps de marquer la transition du début à la fin. Peut-être l’âge de cette nouvelle incarnation du Docteur a-t-il favorisé ce discours, tant dans le texte que le subtext de l’intrigue. Quoiqu’il advienne, Steven Moffat a voulu axer la narration de cette ouverture de saison sur le changement, il est indéniable.
Un subtext sous forme d’enquête sur des androïdes victoriens qui se prennent pour Dr Frankenstein. Des «clones», qui eux aussi changent, se métamorphosent. Une aventure assez simple, résolue assez rapidement, dont le but premier est d’établir un parallèle avec l’état du Docteur et l’acceptation de son évolution et nouvelle forme.
En effet, le Docteur explique au chef des clones qu’il n’est plus le même depuis qu’il a troqué ses organes : un discours qui semble approprié tout aussi bien au Docteur, à ce nouveau visage qui se présente à nous et ses compères, et plus particulièrement Clara, qui semble avoir énormément de mal avec cette transition. Un thème approprié, que certains pourraient qualifier de facile, même si pourtant bien choisi.
Impossible Clara
Clara, Clara, Clara… aka le « mood killer » par excellence. Fidèle à elle-même, et ce qu’on lui connaît, Clara est bien celle qui pourrait en exaspérer certains. Si une transition est toujours difficile lorsque le compagnon ne change pas, comme ce fut le cas avec Rose Tyler, Clara n’aurait pu être plus désagréable qu’elle l’a été ici. Si l’on savait déjà que le personnage faisait figure de potiche, le spectateur lui découvrira une nouvelle facette : la Clara capricieuse, qui refuse d’accepter le changement, comme un enfant à qui on aurait retiré son jouet.
Si l’on accepte le choix de rendre la transition difficile pour un personnage, ici, avec Clara, son état est tellement désagréable qu’il en deviendrait presque détestable jusqu’en fin d’épisode, avec son twist téléphoné : l’appel d’Eleven à cette dernière pour lui demander d’accepter son nouveau visage, ou du parent qui demande à la gamine d’arrêter ses caprices. Si on veut pousser le bouchon un peu trop loin, il serait même possible de faire un parallèle entre Clara et tous ces fans sur Tumblr qui avaient sorti les fourches après l’annonce d’un Docteur plus vieux et moins « sexy ».
Une séquence pleine de nostalgie qui vient plomber toute la dynamique de cet épisode – et dont Capaldi n’avait absolument pas besoin – en soulignant encore plus son parcours balisé, au point de se demander si, au final, on n’aurait pas mieux fait d’introduire un nouveau compagnon avec ce nouveau Docteur qui, lui, est d’ores et déjà adopté. Quant à l’alchimie entre Capaldi et Coleman, il faudra attendre la suite de cette saison pour en juger. Peter Capaldi a rejoint la famille Doctor Who, en espérant que cette arrivée offrira un renouveau nécessaire à la série, qui en a terriblement besoin après une saison 7 mitigée, loin de ce qui a fait ses jours de gloire.
Crédit photos : ©BBC
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