Critique de 3 Billboards : Les Panneaux de la Vengeance, un film coup de poing à voir en salle ce mercredi.

En ce mois de janvier sort le film 3 Billboards : Les Panneaux de la Vengeance, un long métrage qui touche à la révolte d’une mère désespérée, sans réponse, en plein deuil de sa fille adolescente. Après des mois sans que l’enquête sur la mort de sa fille ait avancé, Mildred Hayes prend les choses en main, affichant un message controversé visant le très respecté chef de la police sur trois grands panneaux à l’entrée de leur ville. Elle l’accuse de ne rien faire pour trouver le coupable qui a violé et tué sa fille.

Martin McDonagh, le réalisateur de Bons Baisers de Bruges et 7 Psychopathes frappe encore avec un film coup de poing. Son troisième film est simplement à couper le souffle entre drame et humour noir bien senti, il offre un récit qui ne vous quittera pas pendant quelques heures après l’avoir vu.

Il est très intéressant de voir que ce film a été écrit et réalisé par un anglais qui a su retranscrire de manière authentique des personnages profondément américains, vivant dans une petite ville du Missouri. Mais dans le fond, le message du film reste universel : la souffrance est la même pour tout le monde.

Des personnages puissants

Frances McDormand fait ici le portrait d’une mère blessée, qui a perdu sa fille et qui tente de lui rendre justice. Quand elle décide de prendre les choses en main et d’agir contre la police de sa ville, elle ne va pas être soutenue par les locaux, au contraire mais sa détermination est admirable. Et même si elle sait que le chef de la police William Willoughby (un Woody Harrelson tout en relief), est atteint d’un cancer, elle ne lâche pas l’affaire. Ces trois panneaux à l’entrée de la ville avec ce message en direction de la police sont le seul moyen qu’elle ait trouvé pour attirer l’attention. Mildred est désespérée mais elle est aussi bornée, c’est une battante et elle veut se faire entendre. McDormand est exceptionnelle dans ce rôle pour lequel elle a récemment remporté un Golden Globe. Si à l’extérieur elle est froide, Mildred est à la fois pleine de fureur et à fleur de peau, ses émotions sont palpables. McDormand est une force de la nature et sa passion porte clairement un film plein de performances justes et honnêtes.


Martin McDonagh est connu pour ses dialogues crus et son franc parlé et le film reflète assez bien son style. Tout en étant brut de décoffrage, il sait être très touchant dans ses personnages qui, si au départ semblent être des abrutis ou des brutes, finissent par se révéler bien plus profond. C’est le cas du personnage de Dixon incarné par un Sam Rockwell brillant de bout en bout qui, tout comme Frances McDormand, mérite amplement son Golden Globe. Son personnage n’est clairement pas le flic modèle. C’est un fils à maman raciste, violent et homophobe, une homophobie qui est probablement interne parce qu’au fond, s’il est ignoble au départ, Dixon cache peut-être un mal-être. Le film (et Rockwell) va ainsi faire le portrait d’un homme sur le chemin d’une certaine rédemption même s’il est loin d’y arriver.

Un film de vengeance

Si Mildred est bien évidemment victime parce que le meurtre de sa fille n’a pas été résolu, elle finit par dépasser les limites, brise la loi mais en tant que téléspectateur, on est avec elle. C’est une ancienne femme battue, elle est sous-estimée, vilipendée, insultée, prise de haut par le patriarcat et elle en a ras-le-bol. Un ras-le-fol qui l’emportera très loin dans ses actions mais elle n’a jamais honte et elle souhaite seulement la vérité. Il faut souligner que le film est loin d’être un “whodunit”, un polar qui va résoudre une affaire criminelle. 3 Billboards est avant tout un film qui s’intéresse à la réaction des gens dans cette situation et jusqu’où ils sont capables d’aller. En fin de compte, le coupable n’est pas le plus important, c’est ce qui se passe après qui importe et comment chacun gère ses émotions. C’est un film de vengeance, pas une enquête criminelle.

Le film fait le reflet d’une certaine réalité de la société qui est bien triste. Celle d’une police parfois incompétente mais tout n’est pas tout blanc ou tout noir. Ce genre d’affaire est un casse-tête et la morale n’est pas toujours là où on l’attend. Il serait trop facile de faire un film démagogue, à charge contre une police incompétente, ou encore sur la misogynie flagrante des hommes. Dans son côté rentre dedans, 3 Billboards est bien plus subtil que ça et va au-delà.

Pour le Cerveau, 3 Billboards est clairement l’un des meilleurs films de l’année et il vous fera réfléchir sur la morale et ses limites. C’est un film sur la souffrance morale, la colère, le pardon et la rédemption. Si ce n’est pas un chef d’oeuvre, il s’en rapproche et il vaut vraiment le coup d’oeil pour son scénario fort et ses acteurs brillants.

Bande-annonce

Crédit ©20th Century Fox