Comme un anti – Petite maison dans la prairie, Le Diable tout le temps propose une tragédie familiale et sociale au cœur de l’Ohio sur fond violence et de fondamentalisme religieux. La critique.

Ce mercredi 16 septembre Netflix accueille Le Diable tout le temps dernier film d’Antonio Campos (Afterschool, Christine, Simon Killer). Un film sombre qui mêle fondamentalisme chrétien et pauvreté, dans une époque souvent dépeinte au cinéma comme un Age d’or de l’Amérique.

Violence crue, dépression, déviance, errance, le film d’ Antonio Compos est une peinture de personnages plus horribles les uns que les autres, tentant de se raccrocher à la religion pour contrer leur pulsions les plus animales… bien évidemment sans succès et parfois même en pire. Adapté du roman éponyme de Donald Ray Pollock qui nous conte les destins croisés de plusieurs personnages dans une zone rurale des Etats-Unis, le film propose un visage de l’Amérique peu acceptent de voir en face.

Bienvenue en Enfer

Knockemstiff, Ohio. Face à sa femme mourante, un homme désespéré, Willard Russell, tente le tout pour le tout. Il se tourne vers la religion. Ses prières vont petit à petit s’apparenter à des sacrifices dont Arvin, le fils du couple, pourrait être l’offrande ultime…

Le Cerveau prévient, Le Diable tout le temps porte bien son nom. C’est un film dur, violent et glauque. Un film au titre évocateur, comme si un démon planait en permanence sur l’intrigue que nous sommes en train de voir. Si vous cherchez à reprendre espoir en l’âme humaine par ces temps incertains, Le Diable tout le temps n’est absolument pas ce qu’il vous faut. Surtout pas.

L’anti rêve-américain

Alors que de nos jours l’Amérique profonde semble aller dans les extrêmes en embrassant des idées rétrogrades et le racisme, le film montre ce qui caractérise l’Amérique dans son essence : la religion et la violence.

Comme un écho à la manière dont le pays s’est construit depuis l’arrivée du Mayflower sur le continent, Le Diable tout le temps laisse entendre que l’Amérique n’est qu’un amas de personnages tous plus violents les uns que les autres, même s’ils aspirent soit disant à la vertu.

Un enfer au cœur d’une Amérique sale et loin de l’imaginaire de tous les possibles à l’époque où se déroulent ces évènements. Une époque généralement colorée et pétillante, celle des fities. Une époque comme on ne l’a voit jamais à l’écran : sale, noire, violente et sombre. Comme une peinture à grande échelle de la perversion américaine, Le Diable tout le temps dénonce une humanité quasi-inexistante quand il s’agit des hommes dans cette intrigue lourde et dure à regarder.

Don’t praise the lord

Le Diable tout le temps est un film difficile, comme une alerte sur le retour au fondamentalisme religieux, l’un des plus grands maux des Etats- Unis. Tout comme la masculinité toxique. Dans cette œuvre de Compos, les femmes sont relayées à des rôles secondaires, voire majoritairement de victimes des hommes. Peut-être pour montrer que le diable est une créature masculine avant tout.

Un film qui se concentre sur la terreur et la violence des actes des hommes, qu’ils soient les protagonistes de cette histoire sur plusieurs décennies, ou au sens large, soldats vétérans de guerres lointaines, ou aspirant à une vie meilleure et respectueuse des autres.

Casting de haut vol

Avec un casting 5 étoiles et une réalisation de cachet, des intrigues qui s’entremêlent pour le vaste groupe de personnage sur lesquels le films se concentre, Le Diable tout le temps est une œuvre qui ne manquera pas de marquer le spectateur pour le malaise et le dégoût qu’elle peut générer.

Mention spéciale pour Bill Skarsgård et Robert Pattinson, qu’on a rarement vu dans des rôles aussi différents de leurs habitudes, non seulement convaincants, mais surtout terrifiants. Avec une bande originale qui joue des codes mélodiques associés à l’Amérique profonde avec intelligence, tout est calculé pour créer un malaise profond chez le spectateur. Déranger ce dernier dès les premières séquences du film jusqu’à sa fin.

L’origine du mal

Une œuvre qui vient questionner toute la culture nourrie par la violence d’un pays qui cherche aujourd’hui à juguler cette même violence et se réinventer, surtout avec une présidence qui a contribué à créer et rouvrir des blessures que l’on pensait peut-être guéries ou sur la voie de la guérison.

Une tragédie qui se concentre sur l’humain comme véritable origine des maux de ce dernier, et non l’environnement dans lequel il se construit. Si Le Diable tout le temps ne propose pas réellement de lueur d’espoir à proprement parler, il essaie de voir en face une Amérique qu’on ne montre pas, qu’on ne veut pas voir et qui pourtant est bien celle qui a existé et existe encore.

Le Diable tout le temps : Bande Annonce

Crédit photos : ©Netflix