Elementary : trop élémentaire

2

3.0

Critique d’Elementary, ou Sherlock Holmes de nos jours à New York.

Elementary part avec plusieurs handicaps. Premièrement, chaque fan de Sherlock l’attend au tournant et est prêt à démonter la série à coup de boulet rouge. Elementary ne pourra que souffrir de la comparaison, quand bien même elle est très indépendante et ne ressemble que très peu à Sherlock. Deuxièmement, c’est un procedural, sur CBS qui plus est, genre honni et méprisé par l’intelligensia télévisuelle, qui condamnera et exécutera que trop souvent une série du genre avant même d’avoir tenté de regarder un épisode.

Et pourtant, le pilote de la série est loin d’être mauvais. Encore une fois pour un procedural c’est bien entendu les personnages qui importent et leur relation. Qui regarde réellement Mentalist, Bones, NCIS ou Castle pour l’enquête de la semaine ? C’est plutôt Jane, Booth et Bones, Gibbs et son équipe et Beckett et Castle qui font revenir le public de semaine en semaine.

Robert Doherty, créateur d’Elementary a bien compris l’importance de bien créer ses personnages et établir leur relation et c’est ce qu’il fait dans ce pilote. Il se concentre donc beaucoup plus sur comment Joan Watson (Lucy Liu) et Sherlock Holmes (Jonny Lee Miller) se rencontrent et s’apprivoisent que sur l’enquête en elle-même. Une excellente idée car elle intéresse très vite le téléspectateurs et donne envie de voir comment vont évoluer les choses entre eux. Et surtout, malgré la première réplique qu’ils s’échangent, sur un point de vue amical et professionnel et non romantique. On a envie d’en savoir plus sur chacun des personnages.

Etablissement des personnages

Dès ce premier épisode, Doherty établit très bien ses personnages. Sherlock Holmes est…Sherlock Holmes, c’est à dire un génie borderline, as de la déduction mais incompétent des relations humaines, ancien addict qui a besoin d’une « addict-sitter » engagée par son père. L’addict Sitter étant Joan Watson, ancien chirugien. Une Watson qui n’est pas là que pour jouer les assistantes et regarder Holmes conclure enquête après enquête mais obtient une  histoire personnelle et une certaine profondeur.

Le duo d’acteur ici fonctionne très bien. S’il y a peu d’alchimie, et ce n’est pas ce qui est recherché ici, ils se complètent selon les scènes. Jonny Lee Miller est très bon dans toutes les phases enquêtes et déductions, on est impressionnés par la rapidité avec laquelle il prononce ses répliques, son accent anglais conservée le rend très Sherlockien. Cependant, pour les moments plus émotionnels, plus chargés, c’est Lucy Liu qui prend le relais. La froideur asiatique n’est qu’un bon souvenir mais elle n’en fait pas trop non plus.

Pas assez original

Si le duo fonctionne, il existe malheureusement d’autres exemples de la combinaison de l’homme intelligent et excentrique mais instable accompagnée par une femme plus raisonnable qu’il sera très difficile de battre. Goren et Eames dans New York, Section Criminelle ou Lisbon et Jane dans Mentalist ou encore Mulder et Scully dans The X-Files n’en sont que quelques exemples. Ainsi, Elementary ne rentre plus en compétition avec Sherlock de Moffat et Gatiss, mais aussi avec des duos d’enquêteurs qui sont devenus légendes. Et dans ce pilote, rien ne permet de dire qu’ils réussiront à tenir la comparaison.

Cependant, à trop se concentrer sur ses personnages, Doherty en a oublié une chose importante, surtout pour un procédural, l’enquête en elle-même. Il n’a pas réussi à trouver quoique ce soit d’original dans cette première tentative. Le coupable est trop évident. Des éléments ont déjà été vus par ailleurs. La Panic Room cachée était un autre moment clef d’un épisode de Mentalist. Le malade mental instable qui n’est pas le vrai coupable, quoiqu’en disent les preuves et les flics, c’est dans le pilote de Castle. Quiconque a déjà vu une série policière reconnaîtra d’un premier coup d’oeil les mécanismes mis en place. Doherty n’a pas fait l’effort de les cacher. Et même si le mystère policier  n’est pas forcément ce que l’on cherche ici, un effort aurait été appréciable.

Ce pilote d’Elementary présente une série loin d’être mauvaise. Mais, comme tout procedural, c’est sur la longueur qu’on peut réellement juger de sa qualité réelle. Cependant, le pilote n’est pas assez bon et manque beaucoup trop d’originalité pour dépasser son double handicap et les préjugés d’un public qui attend Elementary au tournant. Pour espérer capter son audience, Doherty aurait dû réaliser un épisode plus que parfait, et il n’y est pas parvenu. Le seul espoir de la série repose sur l’excellent Jonny Lee Miller.

Crédits images : ©CBS

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