Revolution : Bilan stéréotypé

3

1.5

Après un long voyage qui aura occupé les précédents épisodes agrémentés de combats à l’épée et autres affrontements en tout genre, la première partie de Revolution, s’est conclue lundi soir  sur un cliffhanger plus que décevant, à l’image d’une dizaine d’épisodes qui ne présagent rien de bon pour la suite.

Avec des audiences en chute malgré un légère hausse pour ce final de mi-saison et une intrigue qui, au lieu de poser les bases d’un semblant de réponses à son thème principal s’égare dans des méandres elliptiques pour faire durer (ou pas) le suspense, ce pseudo « western médiéval post-apocalyptique » s’annonce comme la déception de cette rentrée série. Victime de son ambition, à l’image d’autres séries qui à trop vouloir jouer sur le mystère, tuent le mystère, Revolution est bel et bien la digne héritière de FlashForward, ou The Event, enfant génétiquement modifiée de Lost, mais sans le rendu qualitatif de cette dernière. Et pourtant cette idée de blackout total et universel avait de quoi séduire, tant sur le papier que par sa bande annonce ou son pilote. Nobody’s Fault But Mine, l’épisode 10 qui marque le début d’un hiatus de quatre mois, nous promettait de gros changements. Des promesses en l’air, bien évidemment, pour un dénouement sur un faux cliffhanger qui renforce l’arrière-goût de bâclage offert par Revolution. Pourtant quand on a Jon Favreau à la réalisation, Abrams à la production et Eric Kripke  à la réalisation et scénario, on s’attend à du plus haut niveau, surtout en télévision.

Foire aux clichés : c’est cadeau !

S’il y a une série prévisible sur tous les plans, c’est bien Revolution.  Dès le premier épisode, tel Nostradumus, le spectateur peut réussir à prédire la quasi-totalité de la suite des évènements. L’écriture de la série surfe sur tous les stéréotypes du genre possibles et imaginables : embûches, fausses révélations (comme la mère de Charlie toujours en vie, ou la révélation de l’identité du fils de Neville) avec une construction des personnages lisse et sans aucune profondeur… Revolution prend tout les ingrédients de base pour écrire une bonne intrigue d’action, sans intégrer de nuances ou de rondeurs dans les caractères des protagonistes qui portent l’intrigue, tout en leur donnant une place démesurée dans la narration.  Même si l’on excuse cela  en début de saison, au bout du 4ème épisode, l’exaspération s’installe car l’exécution de ces différentes présentations suit toujours le même schéma de flashbacks sans vraiment aller au bout des choses. Certains personnages arrivent naturellement à générer de l’attachement, à travers un passé plus ou moins funeste raconté sur divers flashbacks qui exploitent assez de temps pour remplir les vides entre chaque scènes d’actions proposées dans différents épisodes.

Basique, simple, en surface

Malgré tout la construction de ces protagonistes reste bien évidement en surface et beaucoup trop simpliste. Le monde merveilleux du stéréotype empruntant à tous les clichés psychologiques et sociétaux : Aaron est par exemple le gros geek de base,  ancien dirigeant de Google, redevenu sans son ordinateur qu’un faible petit gros nerd râleur incapable de se défendre ou de prendre des décisions, qui a décidé d’abandonner sa femme pour la sauver de son incapacité à la protéger (comment bien faire pleurer dans les chaumières aussi au passage). Neville est un ancien vendeur d’assurance frustré pour qui le blackout a été une nouvelle vie et un moyen de prendre le pouvoir par la force, et revanche sur sa personnalité passive. Miles est l’archétype du soldat repenti, qui croyait en une cause mais qui après avoir vu ses conséquences, porte le poids du monde sur ses épaules et bien évidemment est complètement misanthrope. La Milice à la base était sensée faire régner l’ordre et éviter le K.O généré par le blackout avant qu’elle ne vire en état répressif totalitaire, ce qu’on avait pas vu venir du tout. Monroe, le monarque/Dictateur/Général de ce nouvel état symboliquement installé à Philadelphie ( seriously ? les symboles liés à l’histoire des Etats-Unis, ça va 5 minutes) est bien évidemment fou de pouvoir et incontrôlable. Si Charlie, l’héroïne, est aussi dure et aussi forte, c’est à cause de la disparition de sa mère. Si elle tient autant à son frère,  c’est non seulement parce que c’est son rôle de grande sœur mais surtout parce que c’est sa mère qui lui a demandé de le faire la dernière fois qu’elle se sont vues…

A force de servir tous les clichés d’un manuel de psychologie de première année, on sature, tout en se demandant comment Revolution arrive quand même à maintenir ses téléspectateurs. Déjà vu, aucune surprise ni complexité dans le « character built-up », la série s’enfonce avec son esprit bonne famille servit outre-mesure.

Notre Belle Famille

Là où le summum du cliché touche à son paroxysme relève de la dynamique entre Charlie et Miles, son frère et bien évidemment la mère qui est encore en vie. Encore plus dans ce final de mi-saison. La famille au cœur de l’intrigue, qui prend presque la place de la thématique principale. On sait que la famille est une valeur très américaine, qui bien évidemment se voit renforcée suite à une catastrophe majeure, pierre de touche dans un monde post-apocalyptique ou l’institution familiale est le seul repère restant. Sauf qu’ici, l’esprit familial, qui nous rappelle beaucoup Terra Nova à certain moments, prend des proportions tellement énormes, mélangeant d’autres valeurs et concepts comme la loyauté , le courage  ou le sacrifice à tire l’arigot que le sentiment en devient nauséeux et surtout dénature l’effet recherché. On veut bien que le personnage de Miles, soldat misanthrope qui a tout laissé tomber dans sa vie se retrouve dans les yeux de sa nièce et cherche à la protéger, mais l’évolution du personnage vers l’attachement qu’il ressent pour une famille qui ne représentait rien pour lui est tellement mal exécutée, qu’il perd en intérêt et crédibilité.

Loin de révolutionner son genre

Avec une série au potentiel fantastique et dramatique comme Revolution, on aurait pu s’attendre à beaucoup plus qu’un développement classique de personnages partant sauver un autre. Certains diront qu’au lieu d’exploiter les conflits géopolitiques qui auraient pu d’écouler d’un blackout, à peine survolé brièvement lors de quelques scènes, la série s’est perdue dans la préservation du mystère autour de la disparition de l’électricité. Tant bien même Kripke tente de ne pas tomber dans les vices d’Abrams, en nous offrant quelques bribes quant à l’origine du blackout, tout en ouvrant d’autres portes à ce sujet, comme l’implication du Ministère de la Défense dans l’intrigue, Revolution marche sur les plates bandes d’autres échecs comme The Event, qui à défaut de nourrir l’intrigue et renouveler la narration autour de son thème principal privilégie l’ellipse dans le but simple de fédérer le spectateur jusqu’au bout. Une tactique classique des hommes à l’origine du projet qu’on aurait aimé voir prendre une nouvelle direction avec Revolution au lieu d’entuber le téléspectateur sur le potentiel probable de la série sans jamais le creuser, proposant de focaliser le spectateur sur des pendentifs-générateurs sans réellement creuser leur potentiel ni leur véritable objectif, au delà d’offrir un peu plus de puissance de frappe à un dictateur assoiffé par le pouvoir.

Cependant, Revolution s’avère un bon divertissement si on aime les combats d’épée bêtes et méchants…même si peu crédible d’un point de vue plausibilité,  (15 ans aprés un blackout, aucun n’a pensé à jouer à Benjamin Franklin, oui ? non ? la réponse D ? Sans rajouter le côté médiéval hyper tiré par les cheveux d’un point de vue complètement subjectif…). Maintenant que la quête de Charlie est accomplie, que la famille est réunie, que les personnages ont été présenté sous tous les angles, on va peut-être enfin se focaliser sur l’essentiel, à savoir l’origine du blackout, les conflits géopolitiques…etc. Tout du moins, on l’espère, car il sera très dur de garder le spectateur après quatre mois d’absence, même avec une réalisation aussi parfaite que celle de la série. La forme sans le fond, ça ne marche pas toujours…

Crédit photos : ©NBC/universal

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