Critique de la saison 3 de American Horror Stories qui revient avec quatre épisodes juste à temps pour Halloween. Spoilers.
Qu’est-ce qui est le plus difficile pour une équipe de scénaristes de séries : maintenir une seule idée au cours d’une saison sérialisée, ou trouver suffisamment d’idées pour remplir une saison d’épisodes individuels ? C’est une question piège parce que chaque modèle offre ses avantages et ses inconvénients et les hauts et les bas spécifiques au genre de l’anthologie American Horror Stories qui offre des histoires indépendantes.
Sortis cette semaine directement sur Hulu juste à temps pour l’annuel « Huluween » du streamer, la première partie de la saison 3 de American Horror Stories en quatre parties, assez solide, excelle dans la mise en place et le développement pour une narration de plusieurs heures, mais souffre aussi parfois d’un résultat final décevant qui prouve à quel point il est difficile d’offrir une fin satisfaisante pour ce format.
Les points communs que partagent ces épisodes est l’horreur corporelle mais aussi le commentaire social sur les nouvelles technologies et la toxicité rampante du monde moderne. Dans l’ensemble, c’est une saison qui vaut le coup d’œil et qui arrive à faire passer des messages.
Bestie
Dans le premier épisode intitulé Bestie, la nouvelle fille de l’école, Shelby (Emma Halleen), tente de rester en retrait de ses harceleurs et elle commence à s’éloigner de son père pourtant bien intentionné. Shelby est en deuil dû à la mort de sa mère et commence à se lier d’amitié avec une autre personne (Jessica Barden) via le chat en direct de la chaine Youtube de sa drag queen préférée. Alors que la co-dépendance entre les deux jeunes filles grandit au fil des appels visio jusque tard dans la nuit, la dynamique spécifique entre les inconnues prend un tournant sombre et coercitif.
Le personnage énigmatique joué par Barden, dotée d’une déformation faciale, appelée uniquement « Bestie », offre du pouvoir à Shelby, qui prend de plus en plus confiance en elle, elle rayonne grâce à certains tutoriels de maquillage, bien que ce soutien puisse facilement se transformer en manipulation.
La plausibilité de la relation est la partie effrayante parqu’il est très facile pour les adolescents de créer des liens en ligne, surtout quand ils sont vulnérables. Bestie devient alors véritablement une expérience troublante et laisse un goût amer dans la bouche avec un twist qui se rapporte totalement au thème toxique de l’épisode.
Daphné
Daphné exprime une autre relation toxique à travers la technologie (très Black Mirror), cette fois entre un collectionneur d’art de renom (joué par Reid Scott) et son assistante personnelle, une intelligence artificielle (avec la voix de Gwyneth Paltrow). C’est un morceau de verre aux couleurs changeantes nommé Daphné qui est à peu près Alexa sans les garde-fous éthiques, utilisant son omniscience numérique pour faire chanter et extorquer au nom de son maître ravi.
Les dangers attendus de l’intelligence artificielle pèsent sur ce récit édifiant, même si le véritable problème est une question d’erreur de l’utilisateur. On suit un homme émotionnellement retardé qui trouve la personnalité féminine parfaite et obéissante qui lui passe tous ses caprices et flatte son égo pendant le confinement d’une pandémie qui se déroule dans un futur proche (en 2028). Cette composante narrative devient pertinente pour l’histoire, mais elle ne semble jamais complètement nécessaire.
La leçon de l’épisode (qui rappelle aussi grandement le film HER) est que les gadgets de pointe ne sont dangereux que dans la mesure où ils amplifient nos propres défauts, une notion solide rendue plus drôle mais plus stupide à mesure que Daphné évolue vers la petite amie jalouse et possessive des cauchemars de son propriétaire égocentrique. Daphné est le plus faible des quatre épisodes de la saison trois, mais il s’agit tout de même d’un épisode d’horreur sur le monde moderne qui a son utilité (surtout avec le discours récent sur les IA) qui est loin d’être mauvais.
Tapeworm
Le troisième épisode est aussi un discours sur un phénomène moderne, celui d’Ozempic, ce médicament normalement pour les diabétiques mais qui est utilisé par certains comme moyen miraculeux de perdre du poids. Tapeworm (Ténia en français) commence comme une déconstruction assez superficielle de la nature punitive de l’industrie du mannequinat et de ses attentes irréalistes en matière de corps, sans parler des efforts impossibles et malsains que les gens sont prêts à déployer pour réaliser ce rêve.
L’épisode suit Vivian Finch (Laura Kariuki), une jeune mannequin sublime, jugée « trop grosse » par les standards destructeurs d’une industrie souvent toxique. Le monstre intérieur métaphorique de Vivian, la jalousie, est remplacé par une créature tangible qui la transforme en son pire soi-même.
Tapeworm n’est pas subtil avec ses parallèles de jalousie, de dysmorphie corporelle et de ténia, mais ils donnent quand même à cette histoire une base plus solide qui est plus qu’une simple excuse pour l’horreur corporelle. Il y a un message ici, sous toute cette imagerie dégoutante. Cet épisode est un exercice d’horreur si efficace et lent qui se transforme en une révélation horrible et satisfaisante à la fin de l’épisode. C’est l’un des visuels les plus horrifiques que la série ait jamais produits.
L’histoire de Tapeworm a peut être déjà été traitée mille fois avant, mais elle reste efficace et mise avec succès sur des personnages convaincants que le public souhaite réellement voir survivre. Laura Kariuki (Black Lightening, Les Années Coup de Coeur (2021)) donne une performance vraiment captivante dans le rôle de Vivian Finch et, espérons-le, elle réapparaîtra en tant que protagoniste dans les futures productions de Ryan Murphy.
Organ
Organ, le dernier épisode de cette saison, maintient le thème de l’horreur corporelle et les commentaires socio-culturels. L’épisode explore le trafic d’organes, bien qu’avec une tournure unique qui transforme cet épisode en une satire noire contre les 1% ultra-riches et leurs habitudes luxueuses. Raúl Castillo (Looking, Army of the Dead) mène l’épisode dans le rôle de Toby, un homme qui déplore l’agenda de « castration masculine » dans une société « woke ».
American Horror Stories concocte un mystère captivant sur ce qui se passe avec Toby au-delà du vol général d’organes. Avec seulement 38 minutes, Organ est l’épisode le plus court de la saison et il a l’avantage de ne pas trop s’étirer. Organ n’est pas sans moments gores gratuits, comme une séquence de rêve sanglante, mais il parcourt quand même son histoire avant d’arriver à son point culminant.
Organ embrasse définitivement le côté le plus humoristique de l’horreur et n’a pas peur de se tourner vers le rire plutôt que le massacre. Le commentaire d’Organ est valide et l’épisode fait valoir son point de vue. Ce n’est peut-être pas une idée tout à fait nouvelle, mais American Horror Stories la présente d’une manière innovante, avec mordant.
La saison 3 de American Horror Stories sera bientôt disponible sur Disney+.
Crédit ©Hulu
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