Après le 11 septembre à la télévision, voici une sélection de films traitant du 11 septembre : les deux tours se sont elles aussi bien effondrées au cinéma.
Plus de 15 ans se sont écoulés depuis ces attentats, point de bascule de l’Histoire qui a trouvé un large écho au cinéma. En effet, il paraît aujourd’hui difficile d’échapper à ce sujet dans les films américains et même étranger. Qu’il soit traité de manière directe ou indirecte le thème est devenu incontournable. Voire inépuisable. Et s’il faut tirer sur la corde jusqu’à ce qu’elle rompe, les scénaristes n’hésiteront pas. Car qui dit 11 septembre dit retombées commerciales quasi assurées.
Chaque année, les spectateurs ont droit à une myriade de films qui traitent de cet événement tragique. De manière plus ou moins réussie. La liste de film étant exhaustive, le choix des films a été réalisé de manière totalement partiale. Ou plutôt sur la manière dont le 11 septembre a développé le terrorisme et l’action menée contre celle-ci pour se prémunir de nouvelles attaques. Il faut bien trouver un angle.
Après le 11 septembre à la télévision, voici une sélection de films traitant de cet attentat, chacun à sa manière, avec patriotisme, sentimentalisme, réalisme ou bourré d’action. Car oui, les Deux Tours se sont bien effondrées, mais aussi au cinéma.
Revivre le Passé
Pour ressentir l’émotion, il faut la vivre. Et pour l’expérimenter, quoi de mieux que de plonger le spectateur dans les méandres de cette tragédie ? Deux films états-uniens, sortis en 2006, prennent à bras le corps le sujet.
World Trade Center d’Oliver Stone et Vol 93 de Paul Greengrass se sont en effet attaqués de front à la représentation du 11 septembre. Le succès n’est pas au rendez-vous pour ces deux films, mais ils ont le mérite d’évoquer le sujet sans misérabilisme.
World Trade Center met en avant le courage des policiers qui ont payé un lourd tribut pour venir en aide aux rescapés. Nicolas Cage et son acolyte Michael Pena, deux policiers de New York, sont ensevelis sous les décombres des tours. Oliver Stone met en exergue ici une tragédie où la bravoure et l’émotion ne cesse de graviter autour de l’image de l’Amérique post-09/11.
Le réalisateur lève le voile sur ce qui n’a pu être montré jusqu’alors : la détresse, la catastrophe de l’intérieur. On entend les déflagrations, la claustrophobie nous guette et on se sent pris au piège comme ces deux héros. Près de 10 % des personnes tuées le 11 septembre 2001 étaient des pompiers et policiers…
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Pour rappel, le 11 septembre 2001, quatre avions ont été détournés par des terroristes dans le but de frapper le cœur des États-Unis : New York et Washington. Trois atteindront leur cible, pas le vol 93. Avec le film Vol 93, on est en plein cauchemar. Paul Greengrass se hisse à la hauteur de son sujet, soit la tragédie héroïque des passagers du fameux vol United 93, retracée en temps réel. Le récit est ici centré sur des anonymes. Ça peut être vous, moi… Il s’agit de montrer la brutalité de l’événement. Et surtout le courage des passagers. Tenus au courant par téléphone portable des attaques contre le World Trade Center à New York, ils ont décidé de sacrifier leurs vies pour que les desseins des terroristes ne se réalisent pas. Cette vision troublante et intime nous prend aux tripes et nous laisse impuissants devant l’écran noir faisant basculer le destin de ces messieurs tout le monde et de tout un pays.
Le 11 septembre tue toujours
Des études montrent que les conséquences sur la santé de ceux qui ont porté secours aux victimes sont encore perçues dix ans après les attentats du 11 septembre 2001. Dans le documentaire Fahrenheit 9/11, sorti en 2004, le réalisateur américain Michael Moore rencontre des survivants du drame qui ont développé de nombreuses pathologies suite à l’effondrement des deux tours.
Le trublion Michael Moore a reçu la Palme d’or au Festival de Cannes pour ce documentaire aux allures de lance-flamme contre la politique Bush. En effet, cet agitateur notable signe un brûlot sans complaisance et partial sur le gouvernement américain, notamment sur sa gestion du dossier après le 11 septembre. Fahrenheit 9/11 vise à prouver que l’administration Bush aurait utilisé le tragique événement pour accélérer sa feuille de route et mener des guerres injustes en Afghanistan et en Irak.
Ce qui frappe est l’opposition qui existe entre les hautes instances décisionnaires irresponsables aux jeunes victimes directes ou collatérales internationales du 11 septembre, des guerres en Afghanistan et en Irak.
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Une ville et des familles en deuil
Pour aller plus fort dans la victimisation et le pathos concernant 9/11, le cinéphile a été comblé l’année dernière avec Extrêmement Fort et Incroyablement Près.
Ici, les attentats ne sont qu’un prétexte pour mettre en valeur la perte du père et la tragédie familiale qui peut en découler. L’évènement en soi, la destruction des tours n’a plus vraiment d’importance dans la trame narrative et n’est effleuré qu’à travers des flashbacks parfois insoutenables, ou des images assez effroyables qui rappellent l’horreur subit par les victimes coincées dans les deux tours en feu. Sans oublier les messages du défunt laissés sur le répondeur à son fils, comme un écho d’outre tombe.
À travers cette ultime aventure d’un petit garçon en deuil, Extrêmement Fort et Incroyablement Près célèbre la population de cette ville qui est aussi meurtrie que ce petit garçon. Meurtrie, mais unie dans un deuil que tout le monde partage, mais que le petit garçon refuse de partager. Un deuil irrationnel dont la clef de guérison n’est que l’acceptation de cette mort, aussi irrationnelle et injuste puisse-t-elle être.
Parfois un peu lisse et assez facile dans le traitement de la thématique centrale, le film n’en reste pas moins poignant, pour un regard plus intimiste et personnel sur les conséquences de cette attaque terroriste.
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« Le sang réclame le sang et la vengeance réclame la vengeance »
Le film qui exprime le mieux la colère et le désir de vengeance américain est Zero Dark Thirty. Véritable onde de choc, ce thriller politique, basé sur des faits réels, fait l’effet d’une bombe.
Reconnu coupable des attentats du 11 septembre, le film relate la traque d’Oussama ben Laden. Derrière la caméra, on retrouve l’intrépide Kathryn Bigelow et l’étonnante Jessica Chastain. Pendant plus de deux heures trente, de quoi concurrencer Le Seigneur des Anneaux, Kathryn Bigelow lève le voile sur les tortures et le travail acharné d’un groupe d’agent de la CIA, dont la soif de vengeance est insatiable. Leur objectif : éliminer Ben Laden. Zero Dark Thirty est oppressant, la première scène de torture qui dure une bonne vingtaine de minutes est dérangeante et glaçante.
La réalisatrice entraîne le spectateur dans les coulisses du pouvoir et au cœur de l’action, articulant avec minutie cette mission historique qui se dénouera par une opération spéciale d’assaut dans une maison fortifiée d’une banlieue pakistanaise. Le film fait froid dans le dos, mais il a le mérite de ne jamais reculer devant la vérité, qu’elle soit ou non flatteuse pour le pays de l’oncle Sam.
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«Je n’ai pas choisi la violence. C’est la violence qui m’a recruté.» *
Si le cinéma américain a été le principal fournisseur officiel de films traitant du 11 septembre, Bollywood s’est également penché sur le sujet. L’industrie cinématographique indienne livre une vision sans concession des événements en analysant ses répercussions. Et surtout en tentant de répondre à la question suivante : a-t-on jamais prêté attention au vécu postérieur au 11 septembre de la population d’« allure musulmane », devenue une sorte de bouc émissaire de toute une nation ?
Trois films indiens — New York, Kurbaan et My name is Khan — gravitent autour de ce sujet. Ils nous invitent à voir de l’autre côté du miroir. Attention, avoir trois bonnes heures devant soi pour les visionner est nécessaire.
Ces trois films parlent des Indiens dans une Amérique devenue aliénée après les attentats. Il est intéressant de voir les États-Unis à travers le prisme de Bollywood. Si New York de Kabir Khan et Kurbaan (qui signifie sacrifice) de Karan Johar sont plus violents et cyniques dans leur narration, My name is Khan de Karan Johar relève davantage du conte à la Forrest Gump.
New York et Kurbaan traitent de la vengeance après l’humiliation. Dans l’un, un étudiant indien évoluant dans un campus se retrouve accusé sans preuve de terrorisme juste après les attentats. Son tort : porter un nom à consonance musulmane. Commence le calvaire. Traité comme un animal, il va être supplicié dans une prison spéciale. Cet étudiant est une victime du 11 septembre. Il fait partie des victimes invisibles, muettes, qui perdent quotidiennement la bataille des droits de l’Homme.
Kurbaan : Bande annonce
Même son de cloche dans Kurbaan, où un professeur biberonné à la haine se marie avec une Indienne installée aux États-Unis pour assouvir sa vengeance. Le film est troublant, car si on est dans le meilleur des mondes au départ, on danse et on chante, Kurbaan bascule très vite dans le thriller anxiogène. Le Cerveau n’en dira pas plus !
Ces deux films explorent la frustration et la colère qui peuvent amener des hommes normaux à commettre des actes désespérés. Ils expliquent le cheminement de ces hommes en nous apportant des clés de compréhension pour justifier leurs violences sans pour autant les cautionner.
My name is Khan est plus un mélodrame qui donne une leçon sur l’islam et la tolérance dans les États-Unis de l’après 11 septembre. C’est l’histoire d’un enfant musulman, Rizyan Khan, né en Inde et atteint du syndrome d’Asperger. Devenu adulte, il se marie avec une mère célibataire hindoue et part avec elle s’installer à San Francisco. C’est le bonheur… qui se fissure. À la suite du 11 septembre, sa famille éclate dans la psychose ambiante. Son handicap le rend suspect et Khan va se retrouver sur le banc des accusés : les estampillés terroristes. Son leitmotiv, « Je m’appelle Khan, et je ne suis pas un terroriste », n’arrange rien à ses affaires et effraie plus qu’il ne rassure les services de sécurité.
L’effondrement continue
Déprime, revanche, paranoïa, voilà le cocktail de la représentation cinématographique des attentats du 11 septembre. Hollywood a très vite réagi à la chute des deux tours. Certains films ont peut-être contribué à faire le deuil de la tragédie de Manhattan, qui sait ? Mais il est évident que le cinéma a exploité le filon et s’est octroyé, à certaines occasions, un rôle pervers dans la représentation de l’attaque. Mais à ce rôle pervers, on peut opposer et louer l’incroyable réactivité du cinéma américain face à sa propre histoire, sa capacité à la raconter en temps réel. Après une décennie, Hollywood semble même avoir digéré le 11 septembre. Les réalisateurs osent mettre en scène la destruction de la ville de New York ou d’autres grandes villes. À titre d’exemple, voir Man of Steel, The Dark Knight Rises, The Avengers ou encore le troisième volet de Transformers où Chicago est réduit en cendres…
C’est une bonne nouvelle, mais il ne faut pas négliger, comme le souligne le cinéma indien, les conséquences d’une attitude paranoïaque qui a contribué à alimenter ressentiment et colère à l’égard des États-Unis. Quoiqu’il advienne, le cinéphile n’est pas prêt de ne plus en entendre parler, Martin Sheen prépare sa propre vision de l’évènement, et d’autres projets attendent de voir le jour à Hollywood.
* Yasmina Khadra – « L’équation africaine »
Crédit photos : ©Droits Réservés.
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