Ça a fait la une de la presse depuis près d’une semaine. GTA V est enfin sorti. Alléluïa, le messie est arrivé, contemplez sa grandeur, vénérez sa toute-puissance vidéo-ludique ! “Et nomines et Sancti Ludi Padre”. Mais quid de la violence qui fait tant d’émule ?
Et comme à chaque sortie de GTA, les sons de cloche sont paradoxaux. D’un coté, ceux qui hurlent au génie, généralement spécialisés : le jeu du siècle “tellement qu’il est beau, tellement qu’il est le plus fort”. De l’autre, ceux qui brandissent torches et fourches pour partir une fois de plus en croisade contre… (pause dramatique et roulement de tambours) la violence dans les jeux vidéo ! GTA étant soit disant la représentation la plus diabolique de ce Mal. Plongeons dans le marasme de cette polémique populaire et voyons voir de quoi il en retourne vraiment. Los Santos, à nous deux maintenant !
Un plombier qui vous veut du bien
Soyons lucides dès le départ : GTA a toujours fait son beurre sur la violence. Jamais, de mémoire, le joueur n’a eu à incarner un gentil père de famille désirant obtenir une potentielle augmentation dans son job moyen, ou acheter des légumes frais pour faire la popote. Non, le personnage principal a toujours été un truand. Une petite frappe gravissant les échelons de la mafia jusqu’au sommet à grands coups de prunes et de roquettes (ah ! Les voila les légumes).
Mais quid de ce nouvel opus ? Plus de libertés nous dit-on. Cela inclue-t-il forcément plus de possibilités de massacre ? Pas nécessairement. Surtout, mettons-nous bien d’accord sur cette soit-disante violence exacerbée. Il n’est étranger à personne que violence et jeux vidéo sont fortement liés, ne serait-ce que pour l’évolution du joueur. En effet, la représentation la plus simple, traditionnellement, pour montrer qu’on franchit des étapes lors d’un apprentissage, c’est de prouver qu’on est plus fort que le personnage en face (d’où la tradition des boss). Dans le premier Mario déjà, doit-on rappeler que le plombier écrase ses ennemis en leur sautant dessus ou en leur jetant des tortues à la tronche -de toute façon elle le méritaient, saleté de reptiles- ?
Mon fils, ma bataille
Et pourtant, ça ne choque personne. Pourquoi ? Tout est question de mise en scène. Dans Heavy Rain, le personnage principal, dont le fils a été kidnappé, est chargé par le ravisseur d’abattre quelqu’un pour récupérer sa tendre progéniture. Le choix, quel qu’il soit dans le gameplay, appartient au joueur. Mais la dimension morale qui apparaît derrière ce dilemme est présentée par une mise en scène brillante. Lorsque le joueur pénètre dans l’appartement de la cible, il est face à des photos de famille, dans la chambre de ses enfants etc. De quoi culpabiliser le joueur et le faire réfléchir sur la nécessité de cette violence. Preuve que le jeu vidéo, comme tout produit culturel, n’est pas plus violent qu’un autre. Seul son contexte détermine l’impact de sa violence.
Zero Dark GTA
Si l’on compare Saw à Rambo, on voit bien le traitement totalement opposé entre les deux oeuvres. L’une met en scène une violence sadique et dérangeante, tandis que l’autre décomplexe la tuerie par un élan de patriotisme puisque de toute façon “ils sont méchants, ils doivent mourir”. GTA V ne déroge pas à cette règle.
La violence, sans pour autant la justifier, y est présentée de façon décomplexée. Tirer sur des gens dans la rue ou leur rouler dessus ne présente pas un problème en soi. Et ça, GTA V le doit à son contexte. Même les scènes dérangeantes, comme l’épisode de la torture, peuvent s’expliquer par la guerre secrète que se livrent deux parodies du FBI et de la CIA. La torture est laissé aux bons soins du joueur parce qu’eux ne veulent pas se salir les mains, contrairement à ce qu’on peut voir dans certaines séries TV (on pense à un certain Jack) ou d’autre film 5 fois nommé aux Oscars (un Zero, c’est Dark et à 30).
World Trade Menteur
Dans GTA V le système gouvernemental dans lequel votre personnage évolue est corrompu de A à Z. C’est d’ailleurs tout simplement une parodie de la société américaine contemporaine. Il suffit de jeter un oeil aux écrans disséminés dans le jeu, qui comme les écrans de notre réalité, dépeignent la même violence et le tout gratuitement. GTA V ne fait que grossir ses traits pour mieux la critiquer. Le meilleur moyen pour qu’une critique fonctionne, c’est le choc. La polémique. Ce que GTA V fait avec brio.
Là où GTA V dépasse légèrement les bornes dans la satire, c’est au niveau de la violence morale. Un scène en particulier sort du lot et touche à quelque chose d’encore bien plus tabou aux Etats-Unis : lors d’un casse, le joueur fait exploser des bombes dans un immeuble pour que ses acolytes déguisés en pompiers s’occupent du butin. Lors de la fuite, le bâtiment s’effondre et les flammes dévorent les salles. Arrivée à la sortie, votre fine équipe est acclamée en tant que héros par les passants. Ça vous dit quelque chose ? En effet, une belle référence ouverte aux pompiers qui depuis le 11 septembre sont élevés au rang de héros aux Etats-Unis. Dans GTA V, les pompiers ne sont que des usurpateurs.
A vous de jouer
Alors la violence dans GTA V, pire que dans les autres opus ? Pire que dans les autres jeux ? Aux joueurs de juger. Soit on achète GTA et on vole une voiture pour rouler sur le premier clampin venu, soit on achète Assassin’s Creed et sous couvert de contexte historique, on massacre des types sans poser de questions. Et Call Of Duty ? On joue à la guerre donc tuer des gens avec des gros flingues c’est normal ? Parce qu’ils ont signé pour ça ? Les faits sont là, GTA V n’est pas plus violent qu’un autre jeu. C’est l’impression de liberté plus grande que dans d’autres soft qui pourrait laisser croire ceci. Mais est ce qu’on en est obligés pour autant de tuer plus de gens ? Qui dit liberté, dit choix. A vous de faire le votre, à vous de prendre position face à cette question.
Crédits : ©Rockstar Games ; ©Sony Entertainment ; ©DR
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