La société du mal vs la société américaine.
Le nerf de la guerre en politique, que ce soit dans une fiction ou dans la réalité réelle du monde véritable, c’est bel et bien de toucher les foules, de propager ses idées pour que la société s’en inspire jusqu’à devenir un reflet satisfaisant de la vision qu’en ont les dirigeants. Ici encore, plusieurs éléments ont tendance à se ressembler entre la société créée par Sam Duggins et celle qui tend à émerger suite à l’élection de Donald Trump. Bien que, une fois de plus, la fiction soit bien plus extrême que la réalité – fort heureusement pour nos amis américains.
D’abord, dans les deux cas, on note une division très nette de la société entre les pro et les contre. Les partisans de chaque camps sont virulents, certains plus que d’autre, et tout ce beau monde se met joyeusement sur la tronche dès qu’ils le peuvent. Cependant, dans la fiction de Max Bemis, peu de place est laissée aux personnes qui sont ni pour ni contre Sam Duggins, certainement afin d’accentuer l’aspect critique de la situation ; tandis que dans le cas de Trump, ces derniers se sont beaucoup fait entendre, préférant ne pas voter car incapables de se reconnaître dans « un sandwich au caca ou une poire à lavement » – coucou South Park. Mais cela mis à part, la violente division sociale dépeinte dans Evil Empire trouve dans la réalité quelques échos : en effet, depuis l’élection de Donald Trump, les manifestations contre le nouveau président fleurissent un peu partout, principalement dans les états à tendance démocrates ; tandis que de l’autre côté, on voit apparaître de plus en plus d’incidents liés à des partisans extrémistes pro-Trump.
Au dessus des lois
Cependant, les similitudes entre les deux sociétés créées par nos protagonistes ne sont pas toutes si évidentes. Si on prend le cas du chaos institutionnalisé créé par Sam Duggins, force est de constater que les États-Unis ne sont pas à feu et à sang et que le Gouvernement ne cautionne pas de règlements de compte armés au sein d’une population divisée. Pourtant, certains éléments précis n’en restent pas moins marquants.
Le fait que Donald Trump soit ouvertement accusé d’agression sexuelle sans se sentir inquiété plus que ça, poussant même le vice à dire qu’il n’est pas capable de se tenir lorsqu’il voit une belle femme, instinct primaire oblige ; qu’il passe outre un partie de la législation sur les impôts en s’en vantant ; ou encore qu’il puisse déclarer dans le plus grand des calmes que les mexicains sont des violeurs sont autant de signes d’une tendance à légitimer un droit à passer outre certaines règles sociales et étatiques parce que, en tant que personne, on ne les considère pas en corrélation avec sa vision des choses. C’est là que l’on retrouve les bases de l’Empire du Mal de Sam Duggins, bien que ce dernier ait officialisé cette situation. Il ne faut pas négliger que les partisans d’une personnalité politique ont tendance à s’inspirer de celle-ci. Reste à savoir si Donald Trump est un modèle positif ou néfaste, cette réflexion relevant d’une analyse subjective, qu’importe le côté où l’on se place sur l’échiquier politique.
Ambiance Instable
Enfin, dans la veine des rapports pas forcément évidents entre ces deux sociétés, on pourrait relever la violence extrême qui caractérise l’Empire du Mal de Sam Duggins. Une fois de plus, cela n’a rien de comparable avec l’actuelle situation des États-Unis. Pourtant, depuis que sont tombés les résultats des élections américaines, les internautes à travers le pays ont relevés de plus en plus d’actes de violence, d’appel à la haine, de menaces et d’agressions de la part des deux camps.
S’il est impossible de dire si cela est directement lié à l’élection de Trump ou si ces événements sont antérieurs, mais étaient simplement moins médiatisés, cette situation reflète néanmoins une inquiétude certaine de la part d’une partie de la population. Or, si le corps social se met à avoir peur, l’expérience montre qu’il a tendance à se diviser de plus belle, voir à réagir de façon violence en guise de “protection”. La haine et la peur se cultivent en cycle fermé ; une fois pris dans la spirale, il est difficile de s’en échapper.
En conclusion, Evil Empire est un comics récent et une caricature sociale et politique qui, s’il n’a pas vocation à être le miroir de la société américaine, n’en reste pas moins le témoignage d’un ressentiment quant à l’avenir de cette dernière. Une fois de plus, il n’est pas question ici de lancer un débat politique, mais plutôt de s’intéresser à une situation d’actualité grâce au prisme de la fiction. Nul ne peut savoir à l’avance comment les choses vont évoluer, et si l’incertitude est source d’inquiétudes, il faut garder à l’esprit que nous observons cette situation depuis un autre continent et qu’il nous est difficile de se figurer comment les choses se passent exactement sur place.
Aussi, plutôt que de mener bataille en commentaires, lisez des comics, réfléchissez et buvez de la tisane.
Crédits : Glénat Comics.
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