Après une première saison qui avait conquis les spectateurs et une seconde assez décevante, la série coréenne la plus bankable de Netflix tire sa révérence dans une intrigue qui peine à justifier son existence.
Six épisodes pour conclure l’une des séries les plus marquantes de la plateforme de streaming Netflix. Squid Game tire sa révérence avec une troisième et dernière saison, avec la mission de racheter une saison 2 globalement décevante.
Mais après visionnage de ces derniers chapitres, une question – une seule – demeure : était-il vraiment nécessaire de prolonger une histoire basée sur un concept, qui était suffisante à elle-même ?
L’appât du gain
Squid Game était une critique sur l’appât du gain et l’addiction aux jeux d’argent, notamment dans une société capitaliste basée sur les dettes et crédits qui font sombrer des personnes et familles entières dans la pauvreté extrême.
Une critique d’une société avec une élite qui se délecte du malheur de ceux qu’elle exploite, les considérant comme de simples numéros, des bêtes de foire ou de courses, qui n’existent que pour les divertir au-delà de les enrichir.
La série se voulait comme un récit de désespoir dans un enfer alimenté par l’argent et l’avarice. Une sorte d’essai philosophique en série sur la nature humaine dans ce qu’elle a de plus sombre mais aussi de plus beau, avec son héros.
Vache à lait
Cette saison 3 est plutôt une seconde partie de la précédente saison, puisqu’il est flagrant après l’avoir visionnée que la série a été artificiellement découpée par son producteur afin de capitaliser ses mises en ligne (méthode assez classique de Netflix). D’ailleurs, pour ceux qui ne le savaient pas, les deux saisons ont été tournées d’un seul tenant pour ces raisons bien évidentes de stratégie marketing en défaveur d’une véritable nécessité narrative.

Quitte à meubler ou allonger les diverses intrigues de chaque épisode, les lenteurs dans l’avancement de l’intrigue et la narration nous prouve que le diffuseur a bien évidemment commandé un nombre spécifique d’épisodes. Au grand dam de ce qu’aurait pu raconter la série et sa conclusion.
On reprend les mêmes …
Un récit qui reprend immédiatement après l’échec de la rébellion de Gi-hun, replongeant les spectateurs dans l’univers purgatoire du jeu, aux codes couleurs pop et à l’issue mortelle.
Problème : Même si Squid Game innove en amplifiant la brutalité et forçant les personnages à faire des choix encore plus terribles, dans un « torture porn » encore plus assumé que les deux saisons précédentes, on marche en terrain connu.
Même avec la mise en avant de l’animalité de ses personnages les plus intègres… Nous connaissons déjà cette histoire. Rien de novateur ou d’intéressant n’est proposé cette saison.
… et on recommence – en plus violent !
Les nouveaux jeux sont aux premiers abords d’une inventivité spectaculaire : la poupée géante tant attendue et son saut à la corde funeste, un jeu de cache-cache tordu… Des jeux violents qui ne parviennent pas à masquer une impression de déjà-vu tenace.
Rien n’étonne ou ne choque, ni ne fait réellement questionner le spectateur. Certains personnages sont plus que caricaturaux, tout comme l’issue de ces derniers, dans une formule que nous connaissons désormais par cœur.
Gi-hun, zombie de service
Même constat du côté du héros de ces jeux : Lee Jung-jae livre un Gi-hun transformé, certes, mais surtout diminué voire absent. Brisé par son échec et sa milice commando improvisée, incapable d’arrêter les jeux, il s’éteint.
Si l’on avait pu penser que son passage au second plan de l’intrigue aurait du bon, malheureusement ce n’est pas le cas. Pour résumer, le personnage traverse son arc sans réelle évolution, suit les étapes classiques du héros déchu : dépression, colère, résignation, sacrifice rédempteur.
Rien que nous n’ayons déjà vu ailleurs mille fois. Le tout dans une prestation et un jeu assez monolithique voire parfois cliché qui n’aide pas le spectateur à garder un lien ou de l’empathie pour lui.
Quant aux autres personnages de cette saison 3 de Squid Game : de la mère et son fils, à la jeune femme enceinte, la femme trans, ou les joueurs antagonistes qui prennent beaucoup de place d’ailleurs et dont on ne retient pas le nom : aucun n’est écrit de manière à surprendre. Même la transformation brutale de certains personnages en figures moralement ambiguës manque de subtilité, tant les ficelles d’écriture restent visibles et stéréotypées.

Une critique émoussée
Si la série proposait une dénonciation du capitalisme sauvage – de manière basique certes – cette saison tente de critiquer l’humanité dans son ensemble, au lieu d’approfondir la satire capitaliste qui en avait initialement fait un phénomène.
Une critique assez banale qui se veut nihiliste mais qui ne fonctionne pas, puisqu’elle se contente de délivrer un discours simple : pour l’argent, l’être humain est prêt à tout, même à sacrifier l’insacrifiable.
La série ne parvient jamais à proposer une véritable réflexion sur toutes les nuances de l’humanité pour n’être qu’un torture porn ou « death porn » si l’on peut dire. Un peu comme ces élites qui commentent les jeux telles des personnes déconnectées de leur propre empathie, le spectateur regarde ces joueurs périr les uns après les autres, sans pour autant ressentir autre chose que de l’ennui.
Structure chaotique
La structure de ces épisodes est elle aussi l’un des gros problèmes de cette suite : la saison 2, et les 4 premiers épisodes de Squid Game saison 3 passent beaucoup de temps à montrer l’enquête du frère du Maître des jeux, pour au final tourner en rond et s’achever de manière plus qu’anecdotique.
On ne sait que brièvement comment le maitre des jeux est devenu maitre (et encore), on ne sait pas qui chapote réellement cette organisation, ou ses ramifications. Les VIP eux même sont des personnages tierces, qui auraient mérités d’être un peu plus creusés histoire de donner plus de poids ou de nuance à cette critique du monde capitaliste.

Bancal
Numéro 11, garde anciennement animatrice dans un parc d’attraction est peut-être le seul personnage qui s’en tire un minimum correctement, bien qu’expediée dans le final, avant d’avoir elle aussi une conclusion sans saveur, voire maladroite ou inexistante. Le tout, sans expliquer réellement ses motivations au delà d’une enfant : pourquoi sauver 246 et pas un autre parent, ou le bébé ? Comment survit-elle ? Que veut dire son épilogue ? Tant de questions laissées sans réponses à l’image du maitre et son frère.
Ce que l’on peut retenir de l’écriture de Squid Game saison 3 est une gestion bancale du rythme de ses intrigues, un découpage artificiel qui nuit à la cohérence narrative, beaucoup de choix expéditifs ou baclés… Le plus flagrant dans son écriture est le manque d’intérêt réel pour ce qu’on raconte.
Si les thématiques de Squid Game, inventives dans ce qu’elle voulaient dénoncer de notre société, étaient l’atout phare de son succès, son concept est devenu son plus grand défaut, voire boulet.
Conclusion décevante mais ouverte
On aurait pu croire que cette saison 3 serait la mise à mort de Squid Game, mais il était certain que Netflix ne ferait pas de sitôt ses adieux à une poule aux œufs d’or internationale. Surtout au visionnage de l’épilogue.
Les dernières séquences du final, notamment son dernier caméo, prouvent bien que ces jeux ne vont pas s’arrêter, malgré les critiques négatives des spectateurs qui se déchaînent d’ores et déjà sur les réseaux sociaux et une presse mitigée par cette suite.
Cette ultime saison de la série coréenne culte aura été une suite d’épisodes à rallonge pour une intrigue qui aurait pu être conclue dès la saison 2 tout en évitant de montrer qu’elle n’était qu’une extension commerciale, suite au succès de sa première saison.
Un saison finale qui souligne encore plus après sa seconde à quel point Squid Game aurait dû s’arrêter après sa première saison magistrale. Elle prouve tout simplement qu’une série à concept, comme beaucoup d’autres avant elle, ne peut pas être déclinée de la même manière sans avoir autre chose à raconter au-delà de ce concept. Et c’est bien dommage
Crédit photos : ©Netflix























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