Après deux saisons déjà excellentes, la série japonaise Alice in Borderland signe une conclusion magistrale qui élève le genre survival au rang d’art. Du grand spectacle au service d’une réflexion profonde sur l’humanité, de la célébration de la collaboration, à la vie au sens propre
Il fallait oser. Après avoir livré deux saisons quasi parfaites, Alice in Borderland avait tout à perdre avec cette troisième et ultime salve. Comment conclure dignement une série qui avait déjà tout donné ? Comment surprendre encore des spectateurs habitués à l’excellence ?
La réponse tient en six épisodes éblouissants qui transforment l’essai en chef-d’œuvre absolu. De quoi étonner surtout après le flop monumental de son autre série à concept similaire et catastrophe : Squid Game, avec une saison 3 insipide et sans âme.
Shinsuke Sato vient de signer l’une des meilleures fins de série comme rarement vu pour la plateforme avec Alice in Borderland, sans spolier la saison avec un marketing outrageant ou des cliffhanger inutiles, histoire de rendre le tout encore plus sensationnel, comme ils ont pourtant coutume de faire avec leur succès.
Retour aux sources réinventé
Cette saison 3 d’Alice in Borderland opère un retour intelligent aux fondamentaux tout en poussant l’univers vers des sommets inédits. Fini le monde des jeux que nous connaissions, place à une nouvelle dimension où les participants sont déjà au fait des règles de ce monde, puisqu’ils y ont déjà participé. Un monde où les enjeux psychologiques priment sur la brutalité pure (qu’on se rassure, les jeux restent quand même assez gore).
Une intrigue qui se déroule 5 ans après le dénouement de la saison précédente. Arisu et Usagi, désormais mariés se retrouvent malgré eux dans le monde des jeux, quasiment forcé par un professeur qui a soif de découvrir la vie après la mort, et un citoyen qui souhaite retrouver Arisu pour le recruter. Les deux affrontent des épreuves qui questionnent non plus leur survie physique mais leur intégrité morale et leur amour.

Un retour qui se justifie pour ce qu’il propose et raconte, puisqu’il réinvente les règles alors que les participant en connaissaient les enjeux. Le génie de Shinsuke Sato réside dans sa capacité à transformer chaque épisode en film à part entière. Les scénaristes proposent des concepts d’une inventivité folle qui dépassent tout ce qu’on avait vu jusque-là, pour mieux questionner la morale de chacun.
Une mise en scène au sommet
Visuellement, cette saison marque un saut qualitatif spectaculaire. Le budget manifestement augmenté se ressent dans chaque plan : les décors pharaoniques, les effets spéciaux bluffants (du premier jeux aux flèches enflammées jusqu’au jeu à la cube, les décors sont assez fou) avec surtout une direction artistique qui transforme chaque jeu en installation artistique grandiose. Chaque jeu propose un gameplay recherché et inventif, au point que le spectateur se prête lui-même aux quiz et autres mind games dès le premier épisode.
La photographie de Daisuke Soma pour Alice in Borderland atteint des sommets, jouant sur les contrastes entre l’ultramodernité tokyoïte et ces espaces oniriques où se déroulent les épreuves. Chaque jeu a son identité visuelle propre, avec des environnement fascinant qui ne lasse jamais l’œil. Et cette utilisation de la couleur pour signifier les enjeux émotionnels… des procédés dignes du cinéma, mais sur le petit écran.
Des personnages sublimés
Kento Yamazaki et Tao Tsuchiya livrent leurs meilleures performances dans les rôles d’Arisu et Usagi. Le premier gagne en maturité et en profondeur, incarnant parfaitement cette évolution d’un gamer paumé vers un leader assumé. La seconde révèle des facettes inédites de son personnage, notamment vis-à-vis de son passé, la relation avec son père et ses démons. Elle n’hésite pas non plus à prendre le lead, s’imposant comme une chef pour les autres participants et face à celui qui l’a amené dans ce monde.

L’intelligence narrative
Là où Alice in Borderland saison 3 transcende certaines autres séries, c’est dans sa capacité à mêler spectacle et réflexion philosophique. Chaque jeu devient prétexte à explorer les tréfonds de l’âme humaine : l’amour face à la mort, le sacrifice, la confiance en son prochain, la rédemption, l’acceptation de soi, le travail en collaboration. La série évite magistralement l’écueil du divertissement gratuit pour proposer une véritable méditation sur ce qui nous rend humains.
Le scénario évite tous les pièges de la conclusion bâclée. Pas de deus ex machina facile, pas de retournements gratuits, juste une progression logique et émotionnellement juste vers un dénouement qui honore à la fois les personnages principaux, ainsi que ceux perdus dans les deux premières saisons, pourtant essentiels aux héros. Une belle façon de boucler l’intrigue des Alice in Borderland tout en laissant entrevoir de nouveaux mystères…
Un final à la hauteur des attentes
Sans rien révéler, disons que les deux derniers épisodes constituent un condensé d’émotion pure qui justifie à lui seul les trois saisons. Cette montée en puissance progressive vers un climax bouleversant, avec une gestion millimétrée des révélations, de la tension et toujours cette capacité à surprendre encore après 22 épisodes… C’est ça, l’art de la série bien menée.
Et contrairement à certaines productions qui s’essoufflent en route (on pense à vous, autres survival shows, dont un certains avec un calamar), Alice in Borderland maintient son niveau d’excellence jusqu’à la dernière seconde.

Chaque minute compte, chaque plan a sa raison d’être, chaque émotion est méritée, jusqu’à la conclusion de l’intrigue, plus humaniste que jamais. Le but : célébrer la vie dans ce qu’elle a de plus beau, malgré ses épisodes de souffrance.
Alice in Borderland saison 3 accomplit l’exploit rare de conclure parfaitement une série déjà excellente. Shinsuke Sato signe un son chef-d’œuvre personnel et offre au genre des survival ses lettres de noblesse. Entre spectacle pur et méditation philosophique, action débridée et introspection subtile, cette saison trouve l’équilibre parfait à hauteur des précédentes saisons.
Une œuvre télévisuelle accomplie
Plus qu’une simple série Netflix, Alice in Borderland dans son ensemble s’impose comme l’une des œuvres télévisuelles les plus accomplies de ces dernières années. Une leçon magistrale de mise en scène, d’écriture et d’émotion qui place définitivement le Japon sur la carte mondiale des séries d’exception, et pas qu’anime. Rien n’y est gratuit, tout est au service de la réflexion et de la narration sans fioritures ou gains de temps. Une vrai leçon d’écriture sérielle qui est à saluer.

Le Borderland ferme ses portes, mais il nous laisse un héritage indélébile. Un héritage qui pourrait bien être décliné ailleurs comme le suggère la dernière scène de la série (clairement une demande de Netflix, qui comme Squid Game, n’est pas près de lacher sa licence). Et franchement, après avoir vécu cette expérience, on ne peut que remercier pour une fois Netflix d’avoir donné carte blanche à cette équipe de génies. Arigato gozaimasu !
Alice in Borderland saison 3 est disponible sur Netflix
Crédit photos : © Netflix






























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