Critique de l’épisode spécial de Sherlock : The Abominable Bride. Un épisode qui met en bouche pour la suite mais a aussi quelques faiblesses. Spoilers.
Cela fait déjà 2 ans qu’on n’avait pas vu un épisode de Sherlock. La série est très sporadique et sait se faire désirer. Malheureusement ce n’est pas une nouvelle saison qui a commencé mais juste un épisode spécial qui a été diffusé en amuse-bouche avant la saison 4 qui ne sera pas à l’antenne avant plusieurs mois. Mais la rareté de Sherlock fait qu’on l’anticipe encore plus. Cette rareté a aussi le devoir de faire en sorte que la série soit parfaite. La pression est encore plus grande quand on a peu d’épisodes. Ce spécial ne déprécie pas la qualité de Sherlock mais il ne la renforce pas non plus. Le souci de cet épisode est qu’il ne sait pas vraiment ce qu’il est et se cherche entre passé et présent. Steven Moffat et Mark Gatiss n’ont pas pris de décision ferme sur ce que serait ce spécial.
The Abominable Bride fait le pont entre les deux saisons. On a ici définitivement un pied dans la mythologie de la série et les gens qui ne connaissent pas Sherlock ne vont pas être très impressionnés par cet épisode. De plus, il va être projeté dans les salles de cinéma et même si la réalisation est bien faite, cela reste un produit télévisuel et un passage sur grand écran va affaiblir le sujet.
Victorien mais pas trop
Cet épisode spécial ne se déroule pas de nos jours mais au 19ème siècle, l’époque de l’histoire originale. Cependant, on retrouve tous les codes de la série contemporaine ce qui permet de ne pas se perdre et d’avoir un point d’ancrage dans cette histoire. Le sentiment du bon vieux Sherlock qu’on connaît est bien présent. La première heure se déroule au 19ème siècle avant que le twist arrive. En réalité, on est dans un “trip” de Sherlock, dans sa tête et tout l’épisode n’est pas qu’à propos de l’abominable fiancée morte il y a plus d’un siècle, c’est aussi à propos de Moriarty. Oui vous lisez bien, Moriarty. Ce dernier qui est mort devant les yeux de Sherlock avait fait un retour spectaculaire à la fin de la saison 3. Tout le monde se demandait alors comment cela était possible. A la fin de ce spécial, même s’il est clairement mort selon Sherlock, Moriarty est tout de même de retour. On ne sait pas encore comment mais il devrait donner du fil à retordre d’outre tombe. Qu’il soit réel ou le fruit de l’imagination de Sherlock, c’est toujours un plaisir de retrouver Andrew Scott dans le rôle de l’ennemi de Sherlock. Leurs face-à-faces sont toujours un régal.
Cet épisode n’est donc pas dans sa bulle et indépendant de la trame, il fait partie de l’histoire de la série et il est fait de manière assez tordue puisque Steven Moffat a ressorti ce bon vieux mécanisme du rêve. C’est une excuse pour faire un épisode à l’époque Victorienne. Cela n’enlève en rien les qualités visuelles avec un décor sublime et une réalisation très stylisée. Il traite aussi des problèmes de drogue de Sherlock et montre que même si c’est un détective hors normes, il n’est pas sans défaut. On retrouve aussi la relation avec son frère Mycroft qui s’inquiète toujours pour lui.
Du féminisme ?
Il y a des choses étranges dans le monde de Steven Moffat. Dans Doctor Who, on retrouve parfois des pointes de sexisme dans le traitement des personnages féminins mais dans Sherlock, le féminisme est présent. Cette “abominable mariée” démarre l’histoire alors qu’elle tire sur un tas de gens avant de se suicider puis réapparaît quelques heures plus tard pour tuer son mari. On pense alors à une histoire de fantôme mais bien sûr, il n’en est rien et ce cher Sherlock va résoudre l’affaire. Une affaire sous fond de féminisme mais on ne peut pas s’empêcher de se demander si c’est sincère ou juste un moyen de faire taire “les mauvaises langues” et prouver que Moffat & Co sont pro-féministes. On a presque le sentiment que c’est fait exprès pour satisfaire leurs accusateurs et leur dire : “vous voyez, nous ne sommes pas sexistes”. Presque comme s’ils voulaient qu’on les remercie pour ça. Mais ce féminisme semble forcé, irréaliste et pas naturel dans le contexte. Surtout quand on a un personnage masculin, Sherlock, qui explique à des femmes – dans des tenues qui font écho au Klu Klux Klan -, ce qu’est le féminisme. Et en plus on fait passer ces femmes pour des meurtrières.
Dans l’ensemble, l’épisode avait tout de même des moments très solides et d’autres un peu moins. Les fans de la première heure arriveront à pardonner parce qu’il y avait beaucoup de fan service mais il faut avant tout rester logique dans sa trame. Ce que Moffat et Gatiss ont fait. Mais on reste sur sa faim notamment à cause de la balance entre l’époque Victorienne et le présent qui n’est pas très bien trouvée. Une bonne partie de l’époque Victorienne était assez forte et tout le côté fantasmatique a été bien mené. Mais une fois qu’on revient à la réalité, bizarrement, les faiblesses se font sentir. Encore une fois, ce passage au 19ème siècle n‘est qu’une excuse pour faire un clin d’oeil au Sherlock Holmes original, mais aussi, pour faire de cet épisode un “spécial” pour ce début d’année en attendant la vraie saison 4. Si l’intégralité se déroulait dans le passé, l’épisode se serait vraiment distingué du reste de la série mais on est vite ramené à notre époque et à la “réalité”.
Si cet épisode avait ses faiblesses, Sherlock reste une très bonne série et on est heureux de l’avoir retrouvée même si ce n’est que le temps d’une heure et demi.
Crédits images ©BBC
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