Après 6 saisons, Saul Goodman a raccroché son téléphone pour de bon. Retour sur un dernier épisode brillant de Better Call Saul qui met un point final à l’univers Breaking Bad. Spoilers.
Better Call Saul, c’est fini. La série spin-off de Breaking Bad a pris fin de manière poétique, presque dans la douceur, mais avec un pincement au cœur. En effet, l’homme d’abord connu comme Jimmy McGill, puis Saul Goodman puis Gene Takovic, a finalement repris son vrai nom, comme une rédemption après tout ce qui s’est passé ces dernières années.
Cette rédemption a pris la forme d’un échange d’une peine de sept ans de prison contre une peine de 86 ans. Vous lisez bien, Jimmy a réussi à négocier sept ans de prison avant d’avouer toutes ses fautes et prendre une peine de 86 ans. Cela prouve que même s’il est un avocat hors pair qui peut se sortir de la pire situation avec un minimum de peine, il s’est senti coupable et a aussi voulu prouver que malgré ce que Mike Ehrmantraut, Walter White et son frère Chuck (tous les trois morts à ce stade) lui ont dit, il n’est pas un être creux qui ne s’intéresse qu’à l’argent. Il s’est aussi racheter auprès de Kim, la seule personne qui compte à ses yeux.
Fin de course pour Jimmy/Saul/Gene
A la fin de l’épisode précédent, Gene s’est fait démasquer par Marion (Carol Burnett) qui a réussi à prévenir les autorités grâce à son appareil « LifeAlert ». Saul a tenté de s’échapper mais alors qu’il se cachait dans une benne à ordure, il s’est fait appréhender par la police. La fuite est terminée pour Saul, il est grillé mais on parle de Saul, ce dernier sait se sortir de n’importe quelle situation, n’est-ce pas ?
L’une des apparitions surprises de l’épisode a été celle de l’avocat de Saul, ou plutôt son « conseiller », Bill Oakley (Peter Diseth), l’ancien procureur du district d’Albuquerque (qui a pris la place de Saul sur les bancs des arrêts de bus), désormais avocat de la défense. N’étant plus intimidé par le succès de Jimmy après avoir appris son association avec les Salamanca, Bill a néanmoins pris l’appel de Saul et a accepté de le représenter après que Saul lui ait assuré que cela ferait des merveilles pour sa crédibilité juridique. Mais Bill n’est là que pour aider Saul à avoir sa propre crédibilité.
Saul a besoin de quelqu’un sans une tonne d’accusations criminelles en cours pour l’aider à forcer le gouvernement à une peine très généreuse de sept ans dans un établissement qui ressemble plus un country club qu’une prison (à Butner, en Caroline du Nord, la prison dans laquelle Bernie Madoff est décédé), avec des privilèges de golf et une coupe hebdomadaire de glace à la menthe et aux pépites de chocolat. Ce dernier avantage est le moyen pour Saul de prouver qu’il peut prendre le dessus, même dans sa situation, et vaincre le procureur qui n’a jamais perdu une affaire. Il peut totalement posséder son adversaire, même s’il devrait faire face à des décennies de prison. C’est comme un défi pour lui, son denier à relever avant sa sentence.
Un dernier twist pour la route
Mais ensuite, il y a un twist lorsque Saul essaie de jouer une carte de plus, offrant ce qu’il pense être des informations fraîches et juteuses sur la mort d’Howard Hamlin, il apprend que Kim a déjà révélé ces informations au procureur d’Albuquerque et à la veuve de Howard, Cheryl (Sandrine Holt). Il est choqué que Kim ait fait ce qu’il lui a dit de faire lors de leur récent appel téléphonique tendu, racontant tout sur son rôle dans les circonstances entourant le meurtre d’Howard.
Au début, on se dit que Saul est en colère que Kim ait pris le dessus sur lui et ait limité ce qu’il pourrait obtenir du gouvernement. Dans l’avion, devant un maréchal qui le conduit à une salle d’audience d’Albuquerque, il dit à Bill qu’il a une autre information qu’il est sûr que Kim n’a pas partagée, laissant entendre que c’est quelque chose qui va être utilisé contre elle, lui causant peut-être une action civile dévastatrice par Cheryl Hamlin. Saul semble impatient que cela se produise, et lorsque Kim est informée par la procureure adjointe d’Albuquerque, Suzanne Ericsen, que Saul prévoit de présenter un nouveau témoignage la concernant, elle se présente dans la salle d’audience pour assister elle-même à aux dernières manigances de son ex-mari.
Mais ensuite, il y a un autre twist, qui explique le titre original du final, « Saul Gone » (« Saul n’est plus là » ou « It’s all gone » autrement dit « tout est parti » ou « tout est fini »). Saul, interrompt la procédure pour souligner au juge que l’entreprise criminelle de Walter White lui a valu des millions de dollars et que sans ses manœuvres juridiques au nom de Walt, Walt se serait retrouvé rapidement en prison. Saul devient ému alors qu’il essaie de parler de ce qui est arrivé à Howard, mais ensuite, quand il voit Kim au fond de la pièce et voit qu’elle l’écoute vraiment, il révèle finalement ce qu’il a fait à Chuck, ruinant sa capacité à exercer son métier d’avocat pour le blesser délibérément, après quoi Chuck s’est suicidé. « Et je vais vivre avec ça », dit Saul.
Saul is gone, back to Jimmy
Après cette déclaration, Saul redevient Jimmy. Il corrige la juge quand elle dit à M. Goodman de s’asseoir. « Je m’appelle McGill. Je suis James McGill », dit-il en se montrant du doigt, déboutonnant la veste de son costume très brillant (même en noir et blanc). Et même s’il est à nouveau Jimmy au fond de lui, pour ses co-détenus, il est Saul et il est prêt à vivre sa sentence en tant que tel parce qu’il est respecté et semble avoir une vie décente derrière les barreaux où il travaille en tant que pâtissier/boulanger. Ses heures passées au Cinnabon lui servent bien en prison.
A la fin, il reçoit la visite de « son avocat » qui est en réalité Kim. Elle a utilisé son ancienne carte d’avocate d’Albuquerque pour le voir et fumer une dernière cigarette avec lui. C’est une réunion finale brève mais très émouvante. Cette scène est absolument poignante, rappelant qui ils étaient avant : simplement Kim et Jimmy. C’est une scène qui renvoie à un moment du premier épisode de la série quand ils ont commencé à se rapprocher, fumant une cigarette ensemble. Parce qu’en fin de compte, ça a toujours été à propos de Kim et Jimmy. La série se termine sur eux alors qu’elle quitte la prison, le laissant derrière elle avec un dernier clin d’œil.
Jimmy se tient dans la cour, regardant Kim sortir quand il tire des pistolets avec ses doigts et souffle dessus alors qu’elle part. Ils se tiennent de part et d’autre des clôtures, de la liberté, mais Kim pourrait bien être de retour pour lui rendre visite à nouveau avec sa carte du barreau du Nouveau-Mexique qui n’a pas de date d’expiration dessus. Kim, comme Jimmy, aime toujours contourner un peu les règles elle-même. Même s’il est en prison à vie, Jimmy a sa rédemption. Il s’est racheté aux yeux de la loi, mais surtout auprès de Kim. Cette dernière semble aussi doucement revenir vers son premier amour qui est la pratique du droit.
Une série spin-off masterclass
Cette fin (et la dernière saison en générale) était parfaite avec des rappels, non seulement aux saisons précédentes, mais aussi à Breaking Bad avec notamment les apparitions de Mike (Jonathan Banks), Chuck (Michael McKean), Walt (Bryan Cranston), ou la plus grande surprise de toutes, Marie Schrader (Betsy Brandt), de retour pour essayer de s’assurer que Saul soit puni pour son rôle dans la mort de son mari Hank et Gomez. Ces scènes, qu’elles soient en flashbacks ou dans le présent, sont absolument parfaites et ne sont pas seulement du fan service. Elles ont un sens dans l’histoire et s’incèrent de manière naturelle dans le séjour inévitable de Saul/Jimmy en prison. La boucle est bouclée ayant répondu aux questions les plus importantes et sans tuer plus de personnages.
Parfaitement réalisé et écrit par le showrunner et co-créateur Peter Gould, ce dernier épisode de Better Cail Saul est ce qu’il fallait pour mettre un terme à cette histoire. Ce personnage, créé par Gould dans Breaking Bad, qui devait simplement être une farce, un avocat véreux sans âme joué par un acteur connu pour être un comique, a fini par être un être profond, plein de défauts mais qui a tout de même du cœur et qui a su faire face à ses erreurs à la fin. C’est une belle histoire de rédemption qui valait la peine d’être racontée et on est aussi ravi d’avoir connu Kim Wexler, un personnage fascinant incarné par une actrice brillante. (Rhea Seehorn mérite tous les Emmy Awards).
Better Call Saul était un risque, parce que faire une série spin-off d’une des meilleures séries de ses 20 dernières années est presque casse-gueule. La barre était très haute, mais Peter Gould et Vince Gilligan ont été à la hauteur, ils ont offert une masterclass dans l’art du spin-off. Certes, la série commence très doucement, elle a des lenteurs, mais tout est calculer et ça paie à la fin. Et on ne peut pas non plus partir sans souligner le talent immense de Bob Odenkirk qui a donné vie à ce personnage et l’a rendu vulnérable derrière cette façade d’avocat superficiel qui ne cherche qu’à se faire de l’argent.
On a désormais plus qu’une envie, c’est de revoir Breaking Bad et Better Call Saul en boucle pour repérer les détails qu’on a dû rater, car ces séries sont tellement subtiles qu’on ne peut pas tout saisir du premier coup.
L’intégralité des deux séries, Breaking Bad et Better Call Saul, est disponible sur Netflix.
Crédit ©AMC
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