Critique du final de la série Barry de Bill Hader qui se termine en montrant tout son génie. Spoilers.
Avec sa série Barry, Bill Hader, qui a réalisé tous les épisodes de la saison finale, pointe l’absurdité du monde dans lequel on vit et surtout de la société américaine. Comment Hollywood manipule la vérité, change la narration, transforme un homme décent en tueur et élève un tueur au rang de héros.
Quand on y pense, Gene Cousineau est le véritable héros (même s’il a clairement ses défauts) mais il a été dépeint en tueur violent sans cœur. Gene a peut-être remporté la confrontation finale en tuant Barry, mais il a perdu sa réputation éternelle. Quant à Barry, s’il n’a jamais été racheté dans la réalité, il l’a été par la fiction, dans un mensonge taillé pour Hollywood. C’est le crime parfait.
Parce que Barry était dans l’armée, il est porté en héros, peu importe le mal qu’il a fait, les dizaines de personnes qu’il a tué. Il sera toujours vu comme le héros parce que les médias ont construit une fausse narration. Pourtant, la saison 4 a bien montré à quel point Barry est loin d’être quelqu’un de bien, mais il finit par transmettre une certaine fierté à son fils qui le voit aussi comme un héros.
Les masques tombent
Barry (et les criminels) n’est pas le seul monstre dans la série, Sally n’est pas non plus un exemple de vertu. Elle-même victime de relations abusives et de sexisme de l’industrie, elle révèle sa propre nature vicieuse. S’il faut une sorte d’égocentrisme de diva pour commettre un meurtre, comme suggère la série, il faut aussi une nature monstrueuse pour s’engager pleinement à Hollywood. Sally est prête à tout pour obtenir ce qu’elle veut et la jeune femme s’en sort aussi après ses propres méfaits. Mais elle a tout de même dit la vérité à son fils, une chose à laquelle on ne s’attendait pas venant d’elle (mais elle ne dit pas la vérité publiquement). Elle tente tout de même d’empêcher John de voir le film sur son père parce qu’elle sait qu’il l’érige en héros et que c’est un mensonge.
Principalement raconté à travers une série de gros plans, l’épisode donne vraiment un aperçu des visages, des lignes et de la lassitude de ces personnages. Pendant des années, Barry a présenté des masques de ses personnages alors qu’ils prétendent et insistent sur le fait qu’ils sont de bonnes personnes. Parfois, ce masque est obscurci par la performance – parce qu’après tout, Barry est une série sur la comédie ou parfois ce masque cache un déni (comme NoHo Hank qu refuse la responsabilité du meurtre de l’amour de sa vie Cristobal) . Dans ce final, les masques tombent, les téléspectateurs voient les vrais visages mais le film de fin qui reprend l’histoire et la manipule, souligne encore plus à quel point les gens (et leurs portraits publics) sont faux.
Barry dénonce l’absurde, montre à quel point les gens sont désensibilisés de la violence, renverse la situation et pointe du doigt le fait que personne n’accepte la responsabilité de ses actes. Les personnes qui ne méritaient pas de rédemption l’obtiennent et les gens qui devraient être vus comme des héros sont calomniés et jetés en prison. C’est injuste, mais c’est la réalité des choses.
Mélange des genres
Comme pointé dans la critique du début de la saison, la série a commencé comme une comédie noire qui vacillait entre une histoire criminelle remplie de gangsters d’un côté et une histoire de showbizz de l’autre. Barry a été dépeint au début comme un ancien soldat avec un stress post-traumatique qui utilise ses capacités contre son gré en étant tueur à gages. On se dit alors que son rêve de devenir acteur peu le sortir de là et le racheter, mais la réalité est tout autre. La comédie noire s’est ensuite transformée en une tragédie avec une teinte d’horreur.
Bill Hader est un acteur, un scénariste et un réalisateur de génie et Barry aura été son terrain de jeu le plus éclectique lui permettant de montrer l’étendu de son talent. Alors oui, parfois ça porte à confusion parce qu’on pensait regarder quelque chose de précis avant que cela ne se transforme en autre chose, mais ça prouve que Barry est inclassable, on ne peut pas le mettre dans une casse, c’est un électron libre, un peu comme Donald Glover avec Atlanta ou Jordan Peele avec ses films. Il s’est aussi entouré d’un casting exceptionnel avec Henry Winkler, Sarah Goldberg et Anthony Carrigan qui ont chacun été absolument brillant.
Evidemment, le final n’est pas parfait, il est un peu précipité et Hader va parfois vers la facilité mais on ne peut pas nier à quel point tout est calculé et pensé. Avec l’aide de son collaborateur Alec Berg, Hader a créé l’une des meilleures séries de ses vingt dernières années, c’est indéniable. Le commentaire sur Hollywood, sur les médias, sur les Etats-Unis et leur patriotisme aveugle est absolument brillant. Barry Berkman ne mérite par cet honneur final et comme dit Gene plus tôt dans la saison quand il tente de faire annuler le film : « vous glorifiez un psychopathe ». C’est souvent le cas avec Hollywood qui fait des films et des séries sur des tueurs et finissent par glorifier leurs actes au lieu de les dénoncer, oubliant souvent les victimes au passage.
La dernière saison de Barry est disponible sur Prime Video via le Pass Warner.
Crédit ©HBO
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