Critique de la première saison magnifique de Mr Robot. Attention Spoilers.
Mr Robot est la série de l’été qu’il ne fallait absolument pas manquer. Sam Esmail a écrit un chef d’oeuvre dans cette première saison. Un chef d’oeuvre servi par un acteur grandiose : Rami Malek. Sans lui, toute la complexité de la série, de son personnage central, le message d’illusions, de désillusions, de désespoirs et de rêves empoisonnés qu’elle porte aurait été vain. Malek nous hypnotise, nous envoûte et nous embarque dans la psyché malade mais fascinante de son personnage..
L’écriture et le propos de Mr Robot représentent parfaitement son personnage. La série promettait une histoire de révolution, nous disait qu’elle allait nous montrer comment ce rêve inaccessible de détruire les très grands puissants pourraient se faire. Comment on pourrait être libéré des financiers, de cette ultra-mondialisation et libéralisme qui gangrènent notre société. Et même, nous laisse y croire pour un temps. Mais là encore tout n’est qu’illusions et manipulations. La scène post-générique rèvele bien que dans notre monde où on ne sait plus vraiment qui commande. Dans ce monde où l’humanité, les principes et les valeurs s’effacent devant la vanité, la cupidité et l’amour du pouvoir, rien n’est possible et la moindre liberté regagnée n’est qu’illusoire. Les révolutions sont simplement temporaires. Un message particulièrement pessimiste et déprimant, surtout car il ne semble que trop vrai. Vrai car la série est absolument en phase avec notre réalité – au point de retourner quelques scènes au dernier moment pour ajouter des faits d’actualité comme le hack du site américain d’adultère – virtuelle ou non, et permet ainsi au spectateur une identification aux héros encore plus forte. Et une réflexion sur son message et ses avertissements s’impose.
Fight Club
Ou peut-être que c’est possible, peut-être qu’encore une fois, on nous aurait menti. Mr Robot rappelle forcément le film Fight Club avec ce héros qui souffre de schizophrénie. Elliot a des amis imaginaires, des pertes de mémoire, voit, discute et se laisse manipuler par son père qui est mort depuis plusieurs années. Il est toxicomane, bref il cumule les problèmes mentaux. Et il est notre narrateur. On ne peut donc pas lui faire confiance. Est-ce la révolution s’est-elle bien produite ? Est-ce que ce n’est pas encore que le fruit de son esprit malade ? On ne sait plus ce qui est réel et ce qui n’est qu’hallucinations.
Et là n’est pas vraiment l’important dans Mr Robot. L’important n’est pas la vérité ou la réalité des faits. L’important est le voyage d’Elliot et donc sa perception de la réalité, même si ce n’est qu’une hallucination. Ceci n’est pas une histoire de hacker, ce n’est même pas une histoire de révolution économique ou de libération et de lutte contre le mondialisme. Ce sont de belles toiles de fonds, et apportent quelques bonnes réflexions sur notre société, et Esmail en tire une intrigue palpitante et bourrée de suspens, écrite avec précision. Mais ceci n’est que secondaire.
L’histoire d’un malade
Sam Esmail raconte en fait la vie, l’histoire et surtout les souffrances d’un jeune homme atteint d’une maladie mentale grave qui affecte toutes les parts de sa vie. Mr Robot met sous les projecteurs les effets d’une telle maladie et la met en scène grâce à son personnage central. Mieux encore, il nous fait rentrer dans ses délires. Que Fsociety existe ou non, que ECorps et la révolution ait réellement eu lieu, ce n’est pas important. Que ce soit réel ou juste le fruit de l’imagination et de l’esprit malade n’est pas important. Le spectateur se laisse embarquer dans l’histoire que raconte Elliot, et l’accompagne, le soutien, l’encourage, éprouve de l’empathie pour lui, de la compassion. C’est là où le jeu phénoménal de Rami Malek intervient. Même lorsqu’on prend conscience que certaines parties de l’histoire ne sont qu’hallucinations. Grâce à Malek, Elliot n’est plus vu comme un fou dont on doit avoir peur ou dont on doit rire avec ses théories de la conspiration, mais bien comme un malade, une personne en souffrance qui a droit à toute notre compassion.
Le vrai du faux
Certains chercheront à démêler le vrai du faux, et c’est aussi là l’intérêt de Mr Robot. Déterminer les grains de vérité qui nourrissent les paranoïas et illusions d’Elliot. La saison 2 déjà commandée est parfaitement mise en place, avec un Elliot totalement perdu, qui accepte désormais ces hallucinations, d’un côté, et la révolution en marche de l’autre. Sans parler de la disparition de Tyrell et le rôle encore mystérieux mais qu’on sent important de sa femme. Evil Corp qui semble encore debout, et bien entendu le mystérieux, ou la mystérieuse White Rose.
L’attente sera longue avant les nouveaux épisodes. Mais elle sera sûrement bien utilisée à revoir les épisodes de Mr Robot. Une série si riche et si complexe, si bien écrite et réalisée mérite un second visionnage. Au moins.
Crédits Images : ©USA Network
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