Avec le season finale de la quatrième saison de The Mentalist, Bruno Heller montre combien ses personnages sont des génies diaboliques.
Quelle est vraiment la différence entre John le Rouge et Patrick Jane ? Le créateur et showrunner de la série Mentalist aime jouer avec cette question. Et il le prouve avec le season finale de la quatrième saison de la série. Si on s’éloigne de la théorie que les deux entités forment une seule et même personne, cela reste possible. En effet, on ne voit jamais John Le Rouge, ils ne sont pas ensemble dans une même scène, mieux encore, le dialogue final, par téléphone interposé peut être un message pré-enregistré. Cette théorie est tirée par les cheveux, certes, mais Heller n’ira jamais s’aventurer à l’infirmer clairement.
Jane sociopathe
Cependant, il semblerait que son but soit plutôt de prouver que le tueur en série et le mentalist ont exactement le même genre de personnalité. Les deux sont des manipulateurs patentés, mentent pour arriver à leurs fins, ont une notion du bien et du mal bien différente du commun des mortels et sont des sociopathes. La seule différence c’est que Jane ne tue pas des gens pour le plaisir. Et encore, il ne voit aucun mal à torturer un homme pour lui faire avouer un meurtre, bien au contraire. Il n’a pas hésité, non plus, à faire tuer un autre tueur en série, par John le Rouge, car il pensait que c’était le seul moyen de l’arrêter.
La saison 4 le prouve et le fait même dire au nouveau chef de l’équipe Luther Wainwright : Patrick Jane est un sociopathe. Et le season finale en rajoute une couche. La couleur est annoncée subtilement dès le début de l’épisode avec, en bande sonore, Wicked Game de Chris Isaak. Le mentalist s’engage en effet dans un jeu de manipulation pervers avec John Le Rouge. Sans en parler à l’équipe, Jane simule une profonde dépression et l’abandon de l’enquête sur le tueur en série. Il passe six mois à Vegas, boit plus que de raison, reprend ses activités de faux médium et arnaqueur, termine en prison et finit au lit avec une magnifique jeune femme, Loreleï, interprétée par Emmanuelle Chriqui.
Jane au lit !
Sauf que cette jeune femme n’est pas qu’une simple barmaid de casino qui a envie de consoler une âme en peine. Elle est, elle aussi, une disciple de John le Rouge. Ce dernier l’a envoyée pour faire passer un message à Jane. Il lui propose de le rejoindre du côté obscur de la force. Le tueur en série considère qu’après plus de neuf ans d’affrontement mutuel, Patrick Jane et lui-même peuvent désormais former une camaraderie. Il souhaite donc faire table rase du passé et ajouter Jane à ses nombreux disciples. Et ce même s’ il a tué la femme et la fille de notre mentalist préféré, un détail mineur dans l’esprit de John Le Rouge. Si avant ça on était pas sûr qu’il était déséquilibré, malgré tous les meurtres marqués d’un smiley de sang, aujourd’hui, il n’y a plus de doute.
Puisque c’était son plan depuis le début, Jane accepte. Mais cela aura un prix. Pour prouver sa bonne foi il doit apporter le corps de sa partenaire : Teresa Lisbon. Qu’à cela ne tienne, après un moment d’horreur et une courte négociation sans succès, Jane retourne une dernière fois au CBI, salue ses anciens amis rentre dans le bureau de sa partenaire et après un « Je t’aime », lui tire dessus. Il en profite aussi pour tuer Rigsby.
Goodbye Teresa
La construction de l’épisode, le choix qu’a fait Heller de tout montrer des plans de Jane plutôt que de laisser croire qu’il avait réellement changé de camp montre qu’il respecte l’intelligence de ses téléspectateurs. Chacun sait que Jane n’acceptera jamais sincèrement de rejoindre John Le Rouge. Il ressent trop de haine envers l’homme. Heller a donc choisi de supprimer cet élément de faux suspens qui lui permet aussi de rendre beaucoup plus crédible son histoire, d’approfondir d’autant plus la psychologie décidément bien complexe de son mentalist. Une psychologie si bien travaillée que ça lui permet de conserver un autre suspens. Celui du meurtre de Lisbon et Rigsby.
Parce que la force de Mentalist, et de l’écriture de Bruno Heller c’est que malgré tout, le doute plane. Est-ce que Jane l’a vraiment fait ? On sait tous qu’il est prêt à tout, absolument tout pour retrouver John Le Rouge. La psychologie de Jane a été construite de telle manière qu’on sait que malgré la culpabilité et les remords qu’il pourra ressentir, il peut être prêt à sacrifier ses amis pour enfin capturer et tuer son némesis.
Mais ça ne sera pas pour cette fois. Non, là encore cela fait partie du plan bien préparé de Jane. Les deux agents sont en parfaite santé et vont l’aider à capturer John Le Rouge qui lui y croit et donc donne rendez-vous à Jane.
Où est la Taupe ?
Cela aurait bien marché si… il n’y avait pas eu une taupe au FBI et que Luther et l’agent Dancy n’avaient pas découvert la supercherie. Le plan de Jane tombe à l’eau.
Malgré tout, ils arrivent à arrêter la limousine de John le Rouge, tuer son garde du corps et arrêter Loreleï. Et au moment de découvrir enfin le vrai visage du tueur en série, on découvre à la place le corps sanguinolent de Luther, attaché, un téléphone portable autour du cou par lequel communiquait John Le Rouge depuis le début.
Une scène qui montre la perversité absolue de John le Rouge. Il pousse le CBI et le FBI à tuer un des leurs au moment où il est le plus vulnérable. Lui aussi sait manipuler les autres, tout comme Jane.
Cela dévoile aussi l’esprit tordu de Bruno Heller. John Le Rouge n’est jamais très loin, chaque année on est à deux doigts de l’avoir, de connaître nos réponses et chaque année, il s’éloigne un peu plus ne laissant qu’un indice infine. Cette fois, une de ses disciples qui, Jane en est persuadé, va parler et une nouvelle taupe à trouver au FBI.
Sans lasser grâce à ces quelques miettes de pistes, Bruno Heller arrive à relancer l’interêt du téléspectateurs sur son fil rouge. Il réussi aussi à passer outre les codes de la chaîne et des networks en général. Son héros est clairement un anti-héros, qui a déjà prouvé qu’il pouvait aller jusqu’au meurtre pour parvenir à ses fins. Et personne ne trouve rien à redire à cette vision pervertie de la justice. Au contraire, c’est plus de la compassion que de la répulsion que l’on ressent pour Jane, un sociopathe, un criminel, un tueur, un manipulateur pervers.
Crédit Image ©2012 CBS Broadcasting, Inc
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