Tenet sort enfin en salle après avoir été déprogrammé des salles 4 fois. Quid du dernier long-métrage signé Nolan ? Un divertissement honnête, classique du réalisateur. La critique.

C’est peut-être le film le plus attendu de cet été, voire de l’année 2020, au contexte sanitaire et économique particulier. Tenet, le dernier film du célèbre Christopher Nolan arrive ce 26 Août dans les salles françaises après avoir été repoussé 4 fois.

Blockbuster fantastique sur fond d’espionnage, Tenet semble pour certains être le dernier espoir de remplir des salles vides, pour cause de déprogrammation suite à la pandémie de Coronavirus.

Un film pour les amener tous…

Un film qui viendrait sauver les exploitants, en réunissant les fans de Nolan en salles, mais surtout les spectateurs férus de films américains à grand budget, absents des cinémas depuis février dernier.

Si Tenet réunira à coup sur les spectateurs, les réconciliant peut-être enfin avec des salles de cinéma désertées depuis leur réouverture, pas sûr que tout le monde comprenne complètement les ressorts de l’intrigue, inspirée encore plus par la science que ne l’a été Interstellar.

Et dans les salles les lier

On le sait tous, ce n’est plus une nouvelle, qui dit Nolan, dit scénario à tiroir, ellipses et concepts scientifiques complexes. Qu’on soit devant Inception, Interstellar ou The Dark Knight, les œuvres de Nolan ont toujours été des moyens pour le réalisateur de jouer avec l’écriture et l’écran, mais aussi avec la compréhension des spectateurs au fil de ses films.

Avec Tenet, le cinéaste pousse le bouchon encore plus loin. Peut-être même un peu trop. Avec un scénario complexe et une réalisation créative, Tenet peut être déroutant par moment, bien qu’il soit un divertissement à hauteur de ce qu’on peut attendre d’un film signé Christopher Nolan.

L’intrigue du film tourne autour d’un seul mot – Tenet – et décidé à se battre pour sauver le monde, notre protagoniste sillonne l’univers crépusculaire de l’espionnage international. Sa mission le projettera dans une dimension qui dépasse le temps. Pourtant, il ne s’agit pas d’un voyage dans le temps, mais d’un renversement temporel…

Time Crisis

Le temps, la conception du temps et ses effets sur nous. L’un des thèmes favoris de Nolan depuis le magnifique Memento, qu’il soit imaginé dans le monde des rêves avec Inception, ou dans l’espace avec Intestellar.

Avec Tenet rebelote, le temps est encore plus au centre de l’intrigue. Mais pas de rêve, ni d’espace ou de trou noir. Le temps, loin d’être une constante invariable comme le veut sa nature scientifique. Désormais variable, on tente de le maîtriser, du début à la fin du film.

Auto-reverse

Si la thématique du voyage dans le temps est un classique du fantastique, ici, Nolan réinvente ses principes de bases pour mieux l’ancrer dans une réalité plausible : on ne voyage pas au sens propre du terme, on ne parle pas de machine ou de vaisseaux capable de propulser les protagonistes dans le passé ou le futur (bien qu’une machine soit nécessaire quand même dans le film)…

Ici, il est question d’inversion du temps. Plus précisément, d’une technologie qui, en physique quantique, est plus que plausible, en s’appuyant sur des notions d’« entropie »  et imaginant l’impact thermodynamique d’une inversion du temps sur certains objets et leurs conséquences dans notre matérialité (si vous avez déjà mal à la tête, c’est normal).

Casse-tête narratif

Le Cerveau prévient, il va falloir s’accrocher. Même pour les plus habitués au cinéma de Nolan, Tenet est un véritable casse-tête dans les explications de ses concepts fantastiques. Si la majorité des enjeux classiques du film d’espionnage sont au rendez-vous, car oui, Tenet est un crossover de genre, le film peut nous perdre à certains moments. Côté science, on peut dire qu’à moins d’avoir un doctorat en physique quantique ou des connaissances scientifiques profondes (ou de s’appeler Sheldon Cooper dans The Big Bang Theory), on est vite perdu par l’étalage de théories complexes pour lesquelles beaucoup d’entre nous n’ont que des notions très vagues.

Des concepts expliqués en long en large et en travers dans le long métrage de Nolan, avec toute la confusion et la complexité qui incombe à ces hypothèses et théories physiques et le jargon qui va avec. Théories, qui justifient les éléments et bases de l’intrigue que nous regardons. Si tout est assumé, cette confusion a un impact certain sur l’émotion que peut dégager le film – presque inexistante –  pour un long-métrage plus clinique qu’un autre film d’action ou d’espionnage.

Visuellement bluffant

S’il y a bien une qualité indéniable à Tenet, c’est sa réalisation. Nolan arrive une fois de plus à nous proposer quelque chose d’inédit visuellement, notamment dans l’énorme séquence spectaculaire de fin, où inversion et cours naturel du temps se transposent dans la même scène, avec une fluidité et un réalisme assez fou.

Si le procédé est aussi vieux que le cinéma lui-même, puisque l’effet spécial en soit n’a rien de novateur – il s’agit d’une technique de montage à l’inverse – Nolan arrive à mêler ce dernier avec le rythme et toutes les contraintes qu’un film d’action peut avoir. Foi de Cerveau, visuellement, Tenet rempli son contrat pour un véritable divertissement hors normes dans des décors réels.

His name is Bond Washington

Si la narration est clinique, le jeu de John David Washington, aux côtés de Robert Pattinson l’est tout autant. le dernier arrive à dégager un minimum de charisme, alors que Washington est beaucoup trop sérieux dans l’interprétation de son personnage, au point de le rendre monolithique.

Quant à Kenneth Brannagh dans le rôle de l’antagoniste, ce dernier incarne dans Tenet un mafieux véreux et macho des plus convaincants bien qu’un poil stéréotypé dans son écriture, notamment vis-à-vis de son intrigue très inspirée par #MeToo, avec l’émancipation d’une femme battue, prisonnière d’un bourreau.

Divertissant mais pas explosif

Le Cerveau va être honnête, Tenet est en dessous des attentes que l’on pouvait avoir à la suite du matraquage marketing autour du film. Si l’on pouvait s’attendre à un discours scientifique poussé et une réalisation léchée, habitude du réalisateur, on aurait aimé un peu plus d’émotion pour Tenet, avec une intrigue qui sort des clichés du monde de l’espionnage au cinéma, au-delà de son postulat fantastique.

Cependant Tenet reste un bon divertissement en salle, certes un peu perturbant par moments mais loin d’être désagréable, bien au contraire. Il reste un produit typique du cinéaste inspiré par l’espace-temps. Reste à savoir si ce dernier réconciliera les spectateurs avec les salles obscures.

Tenet :  Bande Annonce

Crédit photos : ©Warner