Jachnoon ! The Dictator marche aujourd’hui vers les salles françaises.  Avec en tête d’affiche le comique Britanique Sacha Baron Cohen et Anna Faris, The Dictator surfe sur les clichés pour une satire efficace de l’Occident. 

Avec son cinéma documentaire broyant les clichés de tous types, qu’ils soient racistes ou discriminatoires, Sacha Baron Cohen producteur et scénariste emporte une nouvelle fois le spectateur à travers son humour gras, pas très recherché ou parfois même vulgaire dans The Dictator, sa toute dernière comédie. Une farce piquante (à l’harissa) qui apporte son lot de jugements satiriques sur certains aspects de la politique contemporaine ou l’ordre mondial, sans grosse finesse certes mais quand même, Hafla !

Le rire made in Wadiya

Après Borat qui nous faisait découvrir les charmes de la culture Kazakhe, ou Brüno, la comédie gay et nazie, le roi du paradoxe et génie de l’humour décalé qui ne vole pas très haut est de retour. Cette fois-ci, il se prend pour un dictateur arabe d’une contrée fictive du nom de Wadiya. Sacha Baron Cohen est The Dictator, un dirigeant tyrannique et attachant pour une comédie satirique efficace. Non sans ressembler à une peinture satirique de Khadafi ou Saddam Hussein, Aladeen règne en maître depuis ses six ans. Un barbu frisé qui gouverne comme un enfant en mal d’amour (qui veut juste un câlin en fait),  aux allures de sans-cœur dans une décadence de richesses à l’image de ce que peut imaginer l’Occident à l’égard des peuples arabes et des pays du pétrole. Cet Amiral Géneral va se retrouver à la rue après avoir été victime d’un coup d’état et d’une usurpation d’identité agencée par son oncle (Ben Kingsley).

Décalé

Si l’on recherche un film à  texte cohérent, sensé et travaillé, autant sortir de la salle. The Dictator est une comédie légère qui se regarde comme un loisir, un spectacle comique où le but premier est de rire et passer un bon moment face à l’écran. De toute façon, quand on connait un tantinet soit peu l’acteur, on sait à quoi s’attendre : un humour souvent pubère, adulescent, axé en dessous de la ceinture et surtout très facile. Mais pour rire, on rit bien. Quand Jamel Debbouze dans Made in Jamel joue au dictateur et nous fait rire avec son accent du bled et ses coups de feu gratuits, Sacha Baron Cohen fait la même chose tout en élevant le niveau comique encore plus haut. Il est bête, il est arabe, il a un accent des plus stéréotypé, c’est un grand enfant au pouvoir et ça marche.

Il pousse même le vice jusqu’à habiller sa bande son avec des chansons cultes, mais version arabisante : ainsi « Everybody Hurts » prend des sonorité orientales (une version qui fera assurément pleurer de rire les spectateurs). De même pour « Let’s Get it on » de Marvin Gaye. Et quoi qu’on dise, on aime rire de la différence de l’autre, sans jamais sombrer dans le stéréotype à caractère raciste. Ouf ! A la différence de ses précédents films, celui-ci est davantage scénarisé. Le cadre apporté par la rigidité et les limites d’un scénario donne une dynamique particulière et très appréciable à l’humour de Cohen, qui ne s’est pas empêché de jouer la carte de l’impro et de la mise en situation en immergeant son personnage dans plusieurs scènes de vie réelle. Sa marque de fabrique est présente mais cadrée, moins agressive et un poil plus subtile qu’elle n’a pu l’être dans ses précédents long métrages pour un humour moins lourd. Un humour qui fonctionne très bien avec celui d’Anna Faris, en hippie végétarienne et activiste, dans un registre très proche de ses prestations de la saga Scary Movies.

Intelligent

Surfant sur les évènements du printemps arabe, la guerre en Lybie et la course pour la gestion des ressources pétrolières, The Dictator est un film intelligent. Au détour de ces sketchs souvent décousus qui planent à 100 000, se cache une satire politique profonde, à commencer par une belle critique des USA, pressés de catégoriser les étrangers issus de la péninsule arabe comme des terroristes (la scène de l’hélicoptère est un régal). Le discours final de Aladeen face aux Nations-Unies est un véritable discours dénonciateur, définissant les principales caractéristiques d’ un régime totalitaire. Un discours sur deux niveaux, critique acerbe et ouverte du modèle américain prônant la démocratie et la liberté mais aux antipodes de ses idéaux. Sacha Baron Cohen a le courage de dénoncer ce qui ne doit pas se dire, encore moins sur grand écran et dans un film de ce genre. Au grand étonnement de tous, pas de censure ni de problème à sa sortie.

The Dictator, à plusieurs reprises d’ailleurs, nous rappelle la parodie muette de Le Dictateur (1940) de Charlie Chaplin, dénonçant la montée du nazisme à son époque. On ira pas jusqu’à comparer Baron Cohen à Charlie Chaplin, ce serait manquer de respect à ce monstre du cinéma qui lui ne pensait pas tout le temps à un organe particulier de son organisme, mais le film se permet de juger et dénoncer les dérives de la société occidentale, aux valeurs bien souvent aux antipodes des vertus et mérites que prône la démocratie. Cohen utilise à bon escient son humour parfois dérangeant pour certains, preuve de son intelligence et génie comique qui va bien au-delà de ses performances scathologiques et scabreuses. « Jachnoon »comme dirait l’intéressé, on fonce et on rit de l’Amiral Géneral pour encore un film qui érige son interprète  au panthéon des grands comiques de ce début du 21è siècle.

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Crédit photos : ©Paramount Pictures France