Réalisateur : Stephen Fears
Casting : Ben Foster, Guillaume Canet, Chris O’Dowd
Genre : Biopic, Drame
Durée : 1h43
Année de production : 2014
Distributeur : Studio Canal
Sortie en salles le 16 septembre 2015
Dans l’enfer de la Grande Boucle, The Program retrace le scandale Lance Armstrong de façon humaine, brillante et pour le moins inattendue.
Sur le papier, The Program n’a pas le concept le plus séduisant du monde. Un biopic basé sur un sportif (toute affaire de dopage mise de côté) surtout connu pour sa réussite sur une compétition française, face à un Marvel ou un Star Wars, ça ne paye pas de mine. Et pourtant, par la force de sa réalisation et de son casting, The Program dessine un portrait passionnant et angoissant de Lance Armstrong, tantôt inspirant tantôt détestable, faisant de lui à la fois le symbole d’un rêve américain décadent et victime d’un système défaillant. Oui parce que contre toute attente, ce film n’est pas un film sur le cyclisme.
La Grande Spirale
Qui est réellement Lance Armstrong ? Outre la face que tout le monde connaît à savoir 7 fois vainqueur du Tour de France, c’est avant tout un américain pure souche. Élevé pour la gagne, il est prêt à tout pour réussir. Passionné de cyclisme, il participe au plus grand événement sportif de la catégorie : le Tour de France. Mais ses rêves de gloire se brisent le jour où il apprend que les courses sont courues avant même le top départ à cause de sa physionomie : son taux de production d’oxygène est inférieur à celui d’autres coureurs, le rendant perdant d’avance. Ajoutez à ça un fulgurant cancer des testicules et des lésions cérébrales cancéreuses et le fier Lance se retrouve au fond du gouffre. Mais tel le phénix, il renaît de ses cendres et « ne veut plus jamais être aussi près de la défaite », dût-il aller jusqu’à tricher pour gagner.
Le Jaune et le Noir
Alors que nombres d’autres personnalités attendent leur biopic, un sur Lance Armstrong ne semble pas si étrange si on se penche un peu sur sa vie : ambitieux, il touche le fond et remonte la pente jusqu’à se brûler les ailes. Gloire et décadence d’un américain pur jus venu conquérir son titre. Scénario parfait mâtiné de Voyage du héros. Aussi, à l’image de l’affiche du film, The Program traite Lance Armstrong comme une pièce tournant sur une table. A la fois héros et gourou, gagnant et tricheur, Fears joue habillement avec l’image du sportif pour que le film ne prenne pas parti. Ou plutôt si, mais à tour de rôle. Jamais tout blanc, jamais tout noir, Armstrong est présenté comme machiavélique au sens premier du terme : son éthique ne suivant pas la morale, il semble toujours en adéquation avec le choix qu’il prend, du moment que la fin justifie les moyens (expliqué dès la scène d’introduction où il bat le journaliste David Walsh au babyfoot en détournant son attention). Mais est-il réellement responsable de son affaire ? Tel que The Program le présente, il a certes triché mais parce que la situation lui imposait. Production d’oxygène trop basse, épreuves extrêmement exigeantes physiquement, silence général à propos des pratiques dopantes sur le Tour poussant tout le monde à le faire pour tenir la longueur… Armstrong est au final coupable d’être victime de sa propre faim dans un restaurant incapable de satisfaire son appétit.
Fiction réelle
Mais là où The Program se distingue vraiment des autres films du genre, c’est par sa réalisation osée. Lorsqu’on retrace une histoire inspirée de faits réels au cinéma (surtout lorsqu’on parle de quelqu’un qui est encore en vie), le piège du réalisme total au point de sacrifier toute prise de risque est beaucoup trop fréquent. Mais Fears ose, par un habile procédé, en alternant les points de vue. Bon, mauvais, héros, menteur, chaque prise de parti vient contrebalancer la précédente, empêchant ainsi même le spectateur de se faire un avis sur Armstrong. Et cela passe avant tout par des plans extrêmement symboliques et plein de sous entendus, un montage dynamique et précis ainsi qu’un jeu d’acteur irréprochable (Ben Foster est inspirant et malsain à la fois à souhait). C’est d’autant plus étonnant qu’en effet normalement dans les biopics, ces prises de position techniques sont évitées pour ne pas influencer le spectateur. Pourtant Fears en joue pour le mener à la baguette tel que le ferait Armstrong. Et c’est grandiose.
The Program n’est pas un biopic dans le sens canonique du terme. Il est certes inspiré de faits réels mais sort des sentiers battus du réalisme biographique et de la simplicité technique en ajoutant de nombreux composant qui, au lieu d’influencer le spectateur, lui fait comprendre toute la complexité du personnage et de l’affaire. Un film humain, puissant et passionnant, qu’on aime le cyclisme ou pas.
The Program : Bande Annonce
Crédits : ©Studio Canal
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