True Detective saison 3: Stephen Dorff avoue avoir « pleuré en lisant le script » (brainterview)

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Pour saison 3 de True Detective sur OCS en France, rencontre avec Stephen Dorff, interprète de Roland West. La Brainteview

Avec la saison 3 de True Detective, Nic Pizzolato renoue avec l’excellence de l’enquête proposée en saison 1, dans une écriture toujours aussi maîtrisée et à travers une enquête à faire froid dans le dos, portée par des acteurs charismatiques pour dépeindre une Amérique profonde, comme on la voit rarement à la télévision. Avec une réalisation toujours aussi léchée, Stephen Dorff promet une saison proche de la perfection, pour une série dont il est clairement le premier fan.

A l’occasion de la saison 3 de True Detective, diffusée sur OCS en France, le Cerveau a rencontré le charismatique Stephen Dorff. Entre anecdotes de tournages et retour sur le travail du créateur de la saison, l’acteur est revenu sur les enjeux de cette saison 3 et ses rapports avec son coéquipier, Mahershala Ali, avec qui il partage l’affiche de cette nouvelle saison.

Qu’est-ce qui pour vous caractérise vraiment cette nouvelle saison de True Detective et fait sa force ?

Je pense que cette saison Nic a fait un travail formidable et qu’il y a beaucoup plus de profondeur que dans la première par exemple. L’intrigue se déroule sur trois décennies autour de ce crime, pour mettre en avant le thème principal qui est la vie et le temps qui passe… mais aussi la mort, ou le souvenir et la force du souvenir.

On parle d’amour, de deuil… Aussi de frustration, surtout quand on n’arrive pas à résoudre une enquête pendant autant d’années. On remarque aussi l’impact de cette enquête sur ces gens-là, qu’ils soient professionnels ou personnels. Parce que ça eu un impact aussi sur leurs familles. Les émotions ont été infectieuses cette saison pour moi, c’était très réel parfois, j’ai pleuré en lisant le script et je ne m’en cache pas.

C’est une série qui parle d’humanité avant tout n’est-ce pas ? Plus qu’un thriller policier ?

Oui bien plus qu’en saison 1. Avec cette enquête on nous permet de nous accrocher à l’histoire parce qu’on veut savoir qui a commis le crime Même si on a des réponses assez vite concernant une partie de cette enquête, ce n’est pas le cœur de cette saison. Je pense que Nic a cherché à se connecter à quelque chose de plus profond en écrivant cette saison, bien plus que les deux précédentes. Je pense qu’il est passé à travers plusieurs changements et étapes de sa vie qui ont fait qu’il avait envie de raconter autre chose. Il revient à une petite ville dans l’Arkansas, des choses qu’il connaît à une Amérique un peu plus réaliste et traditionnelle en quelque sorte.

Comment avez-vous rejoint ce projet ?

J’étais très flatté quand mon agent m’a dit que Nic était intéressé par moi pour cette nouvelle saison. J’ai même voulu lire le script immédiatement parce que j’avais adoré la saison 1. Mais il ne voulait pas me le donner parce que c’était top secret jusqu’à ce que les acteurs soient officiellement castés. Nic voulait juste voir l’essence du personnage dans les acteurs qui l’intéressaient.

Il m’a donné donc une scène à jouer, qui était la première où l’on nous voit dans l’épisode 1, où nous sommes en train de tirer sur les rats et qu’on voit le renard (avec Mahershala Ali). J’ai reçu un e-mail par la suite, où il m’annonce qu’HBO et lui-même ont adoré me voir dans ce rôle, et qu’il voulait m’envoyer le script parce que je ne savais pas de quoi il s’agissait. Je ne savais pas que ce personnage allait traverser trois décennies je ne savais pas si j’allais mourir dans l’épisode ou si j’allais tenir jusqu’à la fin.

Vous ne saviez pas dans quoi vous vous embarquiez ?

Je savais que je jouerais l’un des rôles principaux mais je ne savais pas à quel point c’était intéressant et que le personnage était bien écrit. C’est la première fois de toute ma carrière que j’ai dit oui un projet sans avoir lu un script.

Ce n’était pas un peu terrifiant ?

Si, mais je suis très heureux d’avoir dit oui parce que le script est incroyable. C’est bien meilleur que tout ce que j’ai pu faire jusqu’ici ou dans un film, parce qu’on a le temps d’explorer les personnages, de créer cette relation avec Mahershala et de la faire évoluer. C’est la beauté d’un projet comme celui-ci : avoir le temps d’explorer l’écriture et d’explorer les personnages au plus profond.

Ce n’était pas déstabilisant pour vous de passer de votre méthode de travail dans le cinéma à celle appliquée à la télévision ?

C’était unique est différent, mais je me suis lancé dedans corps et âme même si c’était bizarre pour moi de ne pas avoir un seul le réalisateur par exemple. C’était très étrange parce que j’ai toujours travaillé avec un seul réalisateur, alors qu’à la télévision le seul capitaine c’est Nic (puisque showrunner-ndlr). Même quand il ne dirige pas il est là à nous regarder. Et même quand je travaille avec Jérémy (Saulnier, réalisateur), j’ai envie de savoir si Nic aime bien ce que je suis en train de faire – même si je n’ai pas envie de manquer de respect à Jérémy – je préfère être sûre que Nic est satisfait. Nic a écrit ce personnage c’est pour ça que je tiens à ce que ça fonctionne et que ça corresponde à ce qu’il a imaginé. À la télévision c’est le chef. Il n’est jamais très puisqu’il dirige d’autres scènes, ça me permet ainsi de savoir si ce que je fais est bien ou pas. Je ne sais pas si c’est la bonne étiquette à adopter mais c’est comme ça que je l’ai ressenti et que j’avais besoin de le faire.

La série est un luxe donc pour un acteur ?

C’est ce que j’ai le plus aimé. Le plus cool est le temps que l’on a pour faire les choses. On prend le temps de faire les choses. C’est un luxe qu’on n’aurait pas au cinéma. In fine, c’est un produit très riche et profond qui en ressort, qu’on n’aurait peut-être pas dans un film de deux heures. On peut faire de super films en deux heures mais pas aussi riches en termes de profondeur qu’une série. On a le temps de laisser les scènes respirer, de s’approprier les personnages, de travailler les choses plus qu’au Cinéma. Au Cinéma on compte généralement trois actes avec toujours une grande scène émouvante… C’est toujours plus ou moins le même schéma, alors que dans la série on prend le temps du texte, d’explorer les choses différemment. Dans ma carrière cinéma, j’ai dû mourir au moins 15 fois, facilement, et c’était toujours plus ou moins la même régurgitation de choses. Donc je sais de quoi je parle.

True Détective était une autre expérience en somme ?

C’était frais et innovant, parce que ça parle d’une collaboration, de la dynamique entre deux hommes. Deux hommes très différent mais qui tiennent beaucoup l’un à l’autre et qui se respectent beaucoup. Un peu comme des frères. Wayne prend toujours les mauvaises décisions, par exemple. Que ce soit pour lui, ou politiquement ce qui rend les choses plus dures pour Roland, mais il l’accepte.

Ils forment une équipe, même si Wayne est solitaire et Roland le sait. Il y a une scène que j’aime bien et qui montre ça : dans l’épisode 1, quand Roland explique à un flic qu’on doit le laisser faire… qu’il a l’habitude de partir seul dans son coin, et que Roland ne s’en soucie pas, il le laisse faire sa petite enquête tranquille tout seul. Ça prouve à quel point ils se connaissent bien tous les deux. Travailler sur ces personnages était un peu comme une danse pour nous. On s’est lancé la tête la première dans le projet et on a réussi à trouver un rythme tous les deux pour jouer ces policiers.

Est-ce que vous connaissiez Mahershala avant la série ? On a l’impression que vous étiez déjà amis avant de jouer dans cette série, qu’il y a un vrai lien, c’est le cas ?

Il s’est passé quelque chose de très spécial à partir du moment où on s’est rencontré et à partir du moment on a commencé à jouer les premières scènes. Alors qu’on ne se connaissaient absolument pas. On a construit là-dessus et quand il a fallu jouer les scènes vieux, les émotions ont commencé à vraiment ressortir de manière exacerbée. Il y a beaucoup de scènes très émouvantes dans la série et notamment à partir de l’épisode 5 où ils vont se retrouver tous les deux à un certain âge. C’était émotionnellement puissant. On a su créer ainsi un lien qui se voit à l’écran.

Ce n’était pas dur de jouer une version plus vieille de vous-même ou de vous voir en vieil homme ?

C’était un véritable défi, notamment quand tu dois te voir avec tout ce maquillage. Je n’ai pas l’habitude de faire ça. C’était d’ailleurs très brillamment fait, même si bizarre. Ça nous prenait cinq heures par jour pendant presque deux semaines, pour jouer les séquences où nous étions vieux. On changeait ensuite de décennie, comme les années 90, pour ensuite reprendre le maquillage à nouveau pour jouer d’autres séquences vieux. C’était unique et déstabilisant.

Est-ce qu’il y a une scène pour vous qui a été extrêmement difficile à jouer et qui vous a particulièrement ému ?

Il y en a eu beaucoup, c’est très compliqué d’en choisir une seule. On compte quand même huit heures d’épisodes… il y a beaucoup trop de scènes qui m’ont émues. Mais si je dois en choisir une, ce serait une scène à la fin de l’épisode 5 qui est à mon sens peut-être une des plus belles scènes que Mahershala et moi-même aient pu jouer dans notre vie.

On a atteint un niveau de jeu, de profondeur et d’émotion dans cette scène que je n’ai jamais réussi à vivre et à exprimer en 30 ans de carrière. C’est la scène où l’on se revoit des années après, vieux, pour la première fois après tant de temps sans avoir travaillé ensemble. C’est une scène où il vient me voir dans ma maison pour la première fois depuis très longtemps. On ne m’avait pas vu encore à cette époque-là, alors que ça faisait plusieurs épisodes qu’on le voyait vieux. Les deux hommes se découvrent à nouveau dans cette scène là 20 ans après. Dans le script cette scène faisait 9 pages, réalisé par Nic qui est formidable et magnifique. Elle conclut d’ailleurs cet épisode. C’est ma scène préférée de toute la saison, même si je n’ai pas encore vu le final, qui sera aussi émouvant.

Crédit photos : ©HBO

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