The Americans : entre excellence et médiocrité

6

3.0

La première saison de The Americans montre une grande série au potentiel énorme gâché par des erreurs impardonnables.

La première saison de The Americans a la particularité d’avoir des qualités à faire pâlir d’envie n’importe quelle autre série télévisée, et des défauts qui seraient même indignes d’une série pour adolescents de la CW. Un déséquilibre gênant qui rend la série trop souvent agaçante et gâche le potentiel de The Americans d’être LA série de la saison.

Avec The Americans, le créateur Joe Weisberg réussit tout de même son pari. On s’attache à la famille Jennings. On n’a pas forcément envie que les soviétiques réussissent. Le Cerveau aime bien la réalité historique quand même. C’est aussi peut-être pour ça que les Russes sont aussi attachants ici. Ils croient à fond dans leur cause, ils se battent pour leurs idéaux, mais on sait déjà que c’est une cause perdue. De plus, les personnages sont incroyablement bien interprétés, que ce soit par Matthew Rhys et Kerry Russel dans le couple Jennings, Noah Emmerich en agent du FBI acharné ou encore Margo Martindale parfaite comme à l’accoutumée. La réalisation permet aux téléspectateurs de s’impliquer aussi bien dans l’action toujours bien menée et avec du suspens que dans les moments les plus intimes et émotionnels.

Zones de gris

The Americans réussit aussi à rester dans les zones de gris, ni les Américains ni les Russes ne sont parfaitement mauvais ou horriblement bons. La série intègre aussi très bien les événements historiques dans ses intrigues, comme la tentative de meurtre sur Reagan en 1981 par John Hickley. Si on sait parfaitement que Hickley a agi seul et voulait impressionner Jodie Foster, l’épisode se concentre surtout sur la paranoïa américaine – le FBI soupçonne au début un coup des soviets – et la paranoïa, cette fois justifiée des Russes qui pensent que le FBI va tout faire pour mettre ça sur leur dos. De la même manière, l’ambiance des années 80 est très bien distillée, sans jamais être trop mise en avant. On sait quand on est, mais Weisberg a évité les séquences nostalgies qui auraient été distrayantes.

L’autre bon point de la série, et pas des moindres, est l’espionnage en lui-même, la continuité entre les missions qui nous mènent toujours à quelque chose de plus grand, à une nouvelle étape, rien n’est laissé au hasard, on sait qu’une information recueillie resurgira et aura ses conséquences plus tard dans la série, que ce soit pour contrer les plans des uns et des autres ou pour mieux infiltrer l’un des camps. La série montre aussi que tout le monde peut être un espion ou trahir son pays qu’il le veuille ou non, que ce soit la pauvre femme de ménage qui place un micro parce qu’elle est menacée ou Nina qui se retourne contre l’URSS pour éviter les conséquences de ses activités pas très communistes ou encore Gregory, ancien militant pour l’égalité des droits, totalement convaincu pour le communisme, The Americans montre bien que l’espionnage n’est pas qu’une affaire de professionnels et que les deux côtés peuvent utiliser tous les outils à leur disposition, qu’importe la morale.

Défauts impardonnables

Malgré toutes ses qualités, la série souffre de défauts impardonnables. Le pire étant les moyens dont ils récupèrent les informations, peu originaux. Dans The Americans, on compte sur le doigt d’une main le nombre d’informations qui n’ont pas été collectées grâce à la séduction. Si c’est réaliste, il faut alors espérer que les espions, aussi bien américains que russes utilisaient des capotes sinon ils pourraient être responsables à eux tout seuls de la propagation du SIDA ! Le reste du temps, c’est par la menace et la bonne vieille violence toujours utile. Un manque d’originalité et de créativité qui rendent parfois les opérations trop semblables et donc lassantes.

Un autre problème majeur sont les relations entre les personnages. Si on applaudit l’idée de Phillip et Elizabeth en couple faussement marié et qui développent des sentiments l’un pour l’autre, on déplore leur tendance à vouloir une vraie relation, chacun de leur côté, puis changer d’avis, puis s’entendre ensemble pour rendre leur mariage réel, puis changer d’avis ensemble, puis lui veut quand même essayer, elle refuse, il passe à autre chose, elle veut alors revenir vers lui, il refuse.
Puis, à côté de leur propre couple, Elizabeth a des sentiments et une relation chaotique avec Gregory, l’Américain qu’elle a recruté. Phillip, lui couche avec son ex lors d’une mission, ment à Elizabeth, mais elle apprend quand même la vérité.

Mauvais Soap-Opera

Pis encore, pour le bien de la mission, Phillip séduit l’une des secrétaires du FBI, Martha qu’il épousera, bien qu’il n’ait pas de sentiments pour elle. Mais ce n’est pas n’importe quelle secrétaire du FBI, c’est celle de Gaad, le chef de Stan Beeman, le voisin des Jennings. Elle était sortie avant avec le partenaire de Beeman, Chris Amador qui devient jaloux, au point de suivre et confronter Phillip (sans savoir que c’est un espion), et Phillip le tue. Effet domino oblige, le FBI veut absolument faire la peau de ces Russes. Ces derniers sacrifient Gregory pour que éviter que les Américains ne fouillent trop loin et découvrent les taupes que sont les Jennings.

Stan Beeman, le héros côté américain, n’est pas en reste. Il a des problèmes avec son couple et commence une liaison avec son informatrice russe, Nina dont il tombera amoureux, si bien qu’il fait tout pour lui éviter d’être découverte par les Russes. Au point de mettre en place un piège pour le chef des soviets (qui lui aussi est tombé amoureux de Nina alors qu’elle couchait avec pour le manipuler). Puis, il devient jaloux, donc tue un agent du KGB qui était ami de Nina. Lorsque Nina l’apprend est se retourne contre lui, sans le dire, elle n’est plus agent double mais agent triple.

Si cela a l’avantage de montrer que les espions ne sont pas que des êtres froids et sans coeur, les intrigues relationnelles ont surtout les relents d’un mauvais soap opera. Avec de biens meilleurs acteurs, certes,  mais ça reste indigne d’une série du potentiel de The Americans.

Trop de Sexe tue le sexe

Dernier défaut moins important mais agaçant tout de même, le nombre de scènes de sexe inutiles et racoleuses, et pas toujours liées à l’obtention d’information.On est bien dans une série de FX, s’ils peuvent montrer du sexe à l’écran, ils le font allègrement  que ce soit utile ou non à l’intrigue. Un bon moyen d’attirer les spectateurs, mais surtout de les ennuyer pendant plusieurs minutes. Parce qu’on n’en a un peu rien à faire de savoir que Phillip prend Martha par derrière, ou quelle position Nina et Beeman préfèrent.

Malgré ses défauts, The Americans reste une série à suivre, surtout que les derniers évènements promettent des répercussions intéressantes dans les deux camps avec, entre autres, des loyautés mises à mal, des missions encore plus difficiles et un questionnement encore plus profond de la place de la famille dans la vie d’espions infiltrés. En espérant que la saison 2 ait la main beaucoup moins lourde sur le soap.

Crédits Images: ©FX

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