Il y a un mois, aux Etats-Unis DC Comics a lancé son relaunch de ses séries de comics. L’éditeur a décidé d’utiliser les évènements de l’Event Flashpoint, paru cet été, pour réorganiser la totalité de la continuité de l’univers D.C. Objectif : relancer un nouvel intérêt pour les comics, actuellement en crise, et attirer de nouveaux lecteurs. Conséquences : des personnages ont eu leur vie bouleversée (Barry Allen/Flash), tandis que d’autres n’ont pas vu leur histoire altérée (Green Lantern.) Un impact différent selon chaque comics.
52 titres ont été publiés en septembre. Les principaux, pourtant édités à 200 000 exemplaires, ont dû être réimprimés. On ne connaît pas encore les chiffres des ventes des formats électroniques, mais ils devraient aussi battre les records même s’ils ne seront pas pour autant extraordinaires : un nouveau marché à conquérir pour DC comics.
52 titres, c’est beaucoup, alors Brain Damaged a sélectionné dix titres représentatifs de ce relaunch. D’un côté, des titres incontournables comme Batman and Robin et Superman, de l’autre des surprises ou curiosités telles que Red Lantern. Un aperçu de ce que vous pouvez déjà trouver en VO import, que ce soit en format papier, via Comixology et les applications de DC Comics. Les versions Françaises débarqueront en 2012 chez Dargaud. L’éditeur est encore en pleine réflexion sur ses modalités de diffusion des titres de ce relaunch.
Justice League
Concentré sur Batman et Green Lantern, le premier numéro de l’arc en six parties introduit la rencontre des deux personnages. Batman n’est encore qu’un super-héros dont la police de Gotham City se méfie. Il doit faire face à une créature extraterrestre, lui simple humain dans un costume de chauve-souris. Hal Jordan vient à son secours, mais n’en croit pas ses yeux dans un échange cocasse : « Attends une seconde… tu n’es pas qu’un simple type dans un costume de chauve-souris, quand même ? Est-ce que tu te moques de moi ? »
La bonne idée de ce scénario a été de commencer par la formation de la Justice League. Avec un ennemi de taille, qu’aucun d’entres eux n’aurait pu affronter seul : Darkseid. Cela permet à de nouveaux lecteurs de se joindre au relaunch sans repousser à plus tard l’explication de l’origine de la Justice League ni être perdu dans un univers qui peut s’avérer complexe.
Cette situation inédite permet d’entrevoir ce qui a été annoncé comme l’un des points essentiels de cette série. En effet, nous verrons les dissensions qui existent entre les personnages, leurs différents et le fonctionnement interne de la Justice League. Le ton qui sera employé, espérons-le, aura autant d’humour que la rencontre entre Batman et Superman. Le dessin de Jim Lee est lui aussi très réussi. Le trait est fin et les couleurs, lumineuses, correspondent très bien à l’image de la Justice League, moins sombre qu’une aventure de Batman. Scénaristiquement intéressant, stylistiquement fort, à la porté des néophytes, ce premier numéro du relaunch répond à toutes les attentes.
Green Lantern
Disons le tout net : La saga Green Lantern n’a pas été modifiée scénaristiquement pour ce relaunch. Green Lantern fait dans la continuité, avec un Hal Jordan qui ne fait plus partie du Green Lantern Corps. Il est remplacé par… Sinestro, que l’anneau a choisi comme successeur. Revoici donc le fondateur du Sinestro Corps à surveiller son secteur spatial… dans lequel se trouve la base du corps des Yellow Lanterns, qui est toujours connue sous le nom de Sinestro Corps. Situation pas du tout complexe.
Pendant ce temps, sur Terre, Hal Jordan a bien du mal à s’adapter à son retour sur sa planète natale. factures impayées, expulsion de son appartement, en un mot, tout le contraire de sa vie de policier spatial ! Et quand, dans un dîner romantique, Carol Ferris s’attend à une demande en mariage… il lui demande de louer une voiture à son nom ! Hal Jordan serait-il devenu Arthur Curry (Aquaman)?
Le faux relaunch de Green Lantern se focalise sur les deux anciens ennemis, Sinestro et Hal Jordan. Avec un twist à la fin, chacun des deux cherchant au fond de lui-même à réintégrer son Lantern Corps d’origine. Les dialogues et les situations sont très souvent teintés d’humour : dur dur de reprendre une vie d’humain normal quand on a été pendant plusieurs années un Green Lantern !
Chronique des aventures de Sinestro et Hal Jordan, ce premier arc devrait nous surprendre car on s’attend à ce que les deux personnages reprennent à terme leur place. Reste que pour un numéro de relaunch, ceux qui ne connaissent Green Lantern que par le film ou pas du tout seront quelque peu perdus. De la même manière qu’Hal Jordan a du mal à se réadapter à sa vie terrestre, les lecteurs ne comprendront pas pourquoi il n’est plus un Green Lantern. Alors, si les anciens lecteurs seront heureux de voir la continuité respectée, les nouveaux, eux, auront plus de mal pour comprendre ce qui se passe.
Wonder Woman
L’une des séries les plus attendues de cette rentrée de DC Comics était Wonder Woman, écrite par l’une des vedettes actuelles de DC Comics, Brian Azzarrello. Ce dernier est notamment connu pour Luthor et Joker, deux titres sur lesquels il a travaillé avec Lee Bermejo comme dessinateur. Après avoir travaillé sur les deux nemesis de Batman et Superman, il ne lui restait plus qu’à écrire pour la troisième des grands fondateurs de la Ligue de Justice, l’Amazone Wonder Woman, connue civilement sous le nom de Diana Price.
Ce premier numéro, dessiné par Cliff Chang, donne le ton de la série : elle sera totalement orientée vers la mythologie grecque. Wonder Woman est chargée de protéger une jeune fille enceinte de… Zeus. Avec un bémol : on voit finalement très peu l’Amazone, chez qui la victime des forces divines vient se réfugier sans prévenir, ne sachant pas d’ailleurs où elle va. Wonder Woman doit voler à son secours sans savoir ce qui se passe, totalement dépassée par les évènements.
La bonne nouvelle vient des dessins et de l’ambiance, qui rappelle Joker par l’accentuation du genre horrifique. On est beaucoup plus dans le fantastique et le gore, que dans la plupart des titres du reboot. Alors que Wonder Woman était jusque récemment sur le déclin, se faisant voler la vedette par d’autres titres de l’univers DC, ce premier numéro devrait relancer l’intérêt pour le personnage.
Batwing
Batwing est l’un des vestiges du DC Universe pre-relaunch. Aux manettes des titres Batman depuis plus de six ans, l’Ecossais Grant Morrisson avait élargi, avec le retour de Bruce Wayne, la légende de Batman au-delà de Gotham City et des Etats-Unis. Après que Bruce Wayne ait révélé au monde qu’il était le soutien financier de Batman, le super-héros a fait un tour du monde. Il en profite pour former plusieurs héros locaux, qu’il équipe, faisant de ceux-ci les membres du nouveau réseau Batman Inc.
Formé par le Chevalier Noir, Batwing vit à Tinasha, en République Démocratique du Congo et affronte les méchants locaux. Sa véritable identité est David Zavimbe, policier de son état. Le scénariste Judd Winick réussit à rendre le personnage très attachant dès le début grâce ) une introduction de ce nouveau protagoniste au sein de la Bat-family bien travaillée. Son ennemi, le méchant local qui se fait appeler Massacre, est suréquipé, cruel et aussi bodybuildé que Bane. Avec ses nombreuses scènes d’actions violentes, la série, dynamique, sait attirer l’attention.
Ceux qui ont peur de se lancer à la découverte de super-héros à l’histoire compliquée, étalée sur plusieurs décennies, peuvent profiter de ce relaunch pour se tourner vers Batwing. Héros jeune, dont on peut comprendre le passé récent et sa formation par Batman, il est l’une des bonnes surprises de cette nouvelle vague de titres et pourrait devenir un incontournable.
Batman and Robin
Batman and Robin est l’objet d’une révolution cette année : c’est la première fois que Robin est le fils de Batman. Dick Grayson est devenu Nightwing. Il a été remplacé par Damian Wayne, le fils de Bruce Wayne et Talia Al Ghul, la fille de Ra’s Al Ghul. Le milliardaire doit apprendre à éduquer son fils seul et a choisi l’éducation la plus ardue : à dix ans seulement, le gamin devient son nouveau Robin. Appelez la D.D.A.S.S !
Que dire de cela en dehors du fait qu’on y croit encore moins que d’habitude, en voyant un Robin âgé de dix ans seulement ? Le premier numéro de la série pose clairement les enjeux de cette relation. Damian est un jeune pré-adolescent totalement impertinent qui, par exemple, ne comprend pas le besoin de son père de se recueillir dans la rue où ses parents ont été tués. Et ça se résume seulement à cela, sans action véritable, si ce n’est l’apparition d’un nouvel antagoniste dans l’univers de DC Comics : No Body (Personne). On ne sait pas grand-chose de lui, si ce n’est qu’il s’en prend au représentant à Moscou du réseau international de Batman, Batman Inc., dès la première page. Il s’agit seulement d’une introduction : il faudra prendre son mal en patience.
Avec un trait de dessin dynamique, des couleurs vives, ce titre nous donne envie de prolonger sa lecture pour non seulement en savoir plus au sujet de ce méchant bien intriguant, mais aussi voir l’évolution des relations entre Batman et son fils, telles qu’on ne les a jamais vues. Hormis l’origine de ce nouveau Robin un peu tiré par les cheveux, Batman and Robin est un des titres à surveiller avec attention et qui s’annonce passionnant si l’action se développe.
Batgirl
Batgirl est de retour et cette fois c’est Barbara Gordon, la fille du commissaire Gordon. Une balle de revolver reçue dans la colonne vertébrale et tirée par le Joker l’avait rendue paraplégique et elle avait donc dû ranger son costume dans le placard. Dans la chronologie du relaunch, elle s’est peu à peu rétablie et est redevenue Batgirl. La seule, la vraie, l’unique. Avec un grand méchant qui rejoint la mode de la plupart des méchants de la famille Batman ces jours-ci : il est masqué, il est mystérieux, il est très musclé et il est terrifiant.
Barbara Gordon refait ses premiers pas en intervenant dans une invasion domestique organisée par des tueurs en série qui en ont fait leur spécialité. Mais ce premier haut fait n’est pas pour autant la preuve de sa guérison. Elle perd son sang-froid en fin de numéro et est paralysée devant l’arme qui la menace.
Batgirl 1 met l’accent dès le début sur la guérison de Barbara Gordon. Il mettra en avant sa psychologie et est en cela fidèle à ce qui s’est déroulé lors de la période pré-relaunch. La série a réussi son départ. Tout en respectant les évènements passées et donc refusant de perdre les anciens lecteurs de la franchise Batman, Batgirl réussit tout de même à en attirer de nouveaux . Et ces derniers auront même envie de relire les grands classiques, dont une grande partie n’a pas été touchée par le relaunch.
The Flash
Une des questions que l’on se posait sur le relaunch était celle de son impact sur Flash. En effet, Flash est à l’origine du relaunch de DC Comics à la suite des évènements de Flashpoint. Il a accepté la mort de sa mère, ne cherchant plus à l’empêcher. Le chaos engendré dans la mini-série de cet été a donc disparu, créant une nouvelle ligne temporelle dans laquelle la vie de la plupart des héros a été altérée. Certains ne sont quasiment pas touchés, d’autres au contraire voient leur vie bouleversée. Qu’en serait-il de Barry Allen ?
Dans ce nouvel univers, Flash est désormais célibataire. Sa relation amoureuse avec Iris West est une amourette récente. Et son neveu Wally West, Kid Flash, n’existe donc pas. Mais Barry Allen travaille toujours pour la police scientifique dans sa vie civile. L’intrigue est très bien ficelée, avec un mystère qui s’épaissit énormément. On se remet à peine du sentiment de culpabilité de Flash qui a tué un de ses anciens amis d’université sans le savoir que la conclusion du numéro nous interpelle.
Le dessin est bien réalisé, on aime les couleurs vives et le trait dynamique. Francis Manapul qui a en charge le scénario et le dessin, est en pleine forme. Quand Gotham City est une ville sombre, Central City est aussi lumineuse que Metropolis. Ce nouveau titre restera fidèle à tout cela. The Flash est l’une des réussites du relaunch.
Superman
Tout d’abord, le relaunch de Superman frappe par une chose : le travail d’écriture de George Perez est à couper le souffle. Non seulement en raison des problématiques, de l’action, qui sont très bien articulées, mais aussi par les descriptions, des dialogues. Il y a un véritable travail de recherche et de réflexion pour un texte magnifiquement écrit.
Les évènements se déroulent cinq ans après ceux d’Action Comics. Le titre commence avec l’inauguration des nouveaux locaux du Daily Planet qui vient d’être racheté, par un grand groupe international de presse. Les anciens locaux ont été détruits. Loïs Lane a obtenu de son côté une promotion, tandis que Clark, opposé à la cession, refuse de gravir les échellons. Puis, il faut avouer, il est très occupé avec ses fonctions de super-héros,
Désormais la ville qui rejetait Superman cinq ans auparavant a compris qu’elle avait besoin du super-héros. Une nouvelle étape dans la vie du kryptonien. Cet épisode, qui est un stand-alone, a le mérite de servir d’introduction. Les anciens lecteurs ne seront pas perdus, tandis que les nouveaux, qui restent l’objectif de la démarche de DC Comics, apprécieront cette aventure.
Red Lantern
Si une annonce a été inattendue, c’est celle d’un titre consacré aux Red Lantern, le corps des Lanternes dont le pouvoir est fondé sur la vengeance. Nous suivons le chef du corps, Atrocitus, connu depuis l’apparition des Red Lantern il y a cinq ans. L’humour est omniprésent et contrebalance la pesanteur et la noirceur du personnage afin d’évité une série trop sombre (ou trop rouge).
Les premières pages sont vraiment très drôles, avec Atrocitus qui défend son chat, Dex-Starr, habillé avec le même uniforme que lui. Le voir s’écrier « What are you doing to my cat ? » (Qu’est-ce que vous êtes en train de faire à mon chat ?) est un moment irrésistible. Si on compare cette situation avec la fin de l’épisode qui se résume à la grave crise existentielle d’Atrocitus, on assiste à un équilibre entre les deux qui présage de ce que sera le titre sur le long terme.
Mais on peut se poser la question de la longévité de la série. En effet, il n’est pas certain Red Lantern puisse durer, avec trois autres titres dans la franchise : Green Lantern, Green Lantern Corps, Green Lantern The New Guardians. La franchise arrivera-t-elle à conserver ses quatre titres une fois l’effet de curiosité passé ? Red Lantern est le titre qui risque de ne pas durer.
Aquaman
Pour conclure sur cette sélection de dix numéros emblématiques ou curieux du relaunch, Brain Damaged s’intéresse à Aquaman, dont la réputation de loser des super-héros n’est plus à faire. Celui qui est tellement maudit, pour citer un des personnages apparaissant dans ce numéro, qu’il n’est « le super-héros de personne. » Alors est-ce toujours le cas ?
On apprécie dès le début, justement, le sens de la dérision : Aquaman est moqué car il n’est pas le personnage central de la Ligue de Justice et n’a jamais eu de chance dans sa vie. Et ni les policiers ni les gangsters n’en reviennent de le voir intervenir sur la terre ferme. Les premiers se désolent déjà. On va rire d’eux car ils ont été aidés par Aquaman, pensent-ils.
Après la réhabilitation d’Aquaman dans Brightest Day par Geoff Johns, qui est ici au scénario, le titre devrait durer sur la longueur. Avec le scénariste vedette aux manettes, on est sûr d’avoir du matériel solide. Arthur a quitté le royaume d’Atlantis dont il n’est plus roi. Mais le cliffhanger de fin, qui marque le début d’un arc, nous assure de son retour prochain pour assurer l’ordre dans les mers.
Ivan Reis est fidèle dans son dessin à l’esprit du scénario de la série. Il faut dire qu’il avait travaillé avec Geoff Johns dans Blackest Night. Ouverte, jouant sur l’histoire du personnage et sa réputation, la série profite du relaunch pour d’un côté continuer à redorer son blason auprès des aficionados, de l’autre attirer de nouveaux lecteurs qui pourront découvrir le personnage à partir de ce point de départ. Quand certains titres comme Green Lantern échouent à cette épreuve, Aquaman réussit.
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