Une expérience dérangeante et violente
La série, au-delà d’être une dystopie effrayante à cause de sa résonance et son ambiance assez particulière, crée un véritable malaise, assez bizarre chez le spectateur, pour des émotions jusqu’ici inégalées devant un petit écran. Une émotion vive, prenante et dérangeante qui ne manquera pas de pousser le spectateur dans ses retranchements, un peu comme l’actrice qui incarne l’héroïne de la série, Elizabeth Moss, elle-même poussée dans ses retranchements.
La violence de The Handmaid’s Tale est subtile et plus psychologique que visuelle, même si parfois l’horreur est représentée de manière très graphique. Même si la réalisation, proche d’un cinéma indépendant et d’auteur avec des plans rapprochés et des séquences subjectives ou calculées pour déranger, elle est une expérience comme jamais vue à la télévision. Une expérience que tout spectateur se doit d’expérimenter. Le but d’une œuvre, qu’elle soit télévisée ou sur grand-écran, n’est-elle pas d’offrir au spectateur des émotions et un voyage qu’il ne pourrait jamais vivre dans sa propre réalité ? Avec The Handmaid’s Tale, c’est le cas.
Une série qui appelle à la révolte
Quel est le but de la science-fiction ? Des romans d’Asimov à George Orwell à ceux de Suzanne Collins ou Pierre Boule ? Critiquer, dénoncer notre société et appeler à sortir de la passivité. C’est ce que fait cette adaptation du roman de Margaret Artwood, qui déjà à son époque cherchait à critiquer sa propre réalité en pleine Guerre Froide. La série The Handmaid’s Tale a réussi à mettre ses problématiques au goût du jour. Celle notamment au regard de nos gouvernants, ou comment très vite, un état de libertés les plus larges peut basculer dans la terreur, la dictature. A l’heure d’un certain Trump, qui n’a pas peur de fustiger des communautés dans une démocratie qu’il dirige, Gilead n’est pas très loin.
« N’oubliez jamais qu’il suffirait d’une crise politique, économique ou religieuse pour que le droit des femmes soit remis en question ». Une phrase qui fait froid dans le dos, mais une phrase qui est pourtant tellement vraie. The Handmaid’s Tale, à plusieurs reprises, revient sur le rôle du terrorisme dans l’escalade d’évènements qui vont mener au basculement. Des évènements, aux abords anodins qui ont menés à ces extrêmes jusqu’à la privation des libertés sous couverts de sécurité. Des évènements que nous connaissons d’une certaine manière. Un peu comme ces attaques que nous vivons aujourd’hui, celle de terroristes fous à lier. Des attaques qui font désormais partie de notre quotidien et nous force à abdiquer certains droits inaliénables sous couvert de sécurité et défense.
Echos
Des gouvernants et politiques, des crises que nous laissons faire de manière passive, portés par le tourbillon de notre quotidien stressant. Là où cette dystopie réussi son pari, réside dans les échos multiples que la série fait avec notre réalité, concernant l’état d’urgence, le droit des femmes si fragile, notre liberté et démocratie tout aussi fragile, qui peut mener aux pires dérives, surtout quand elle est aux mains de décisionnaires aux penchants extrêmes.
Des échos qui d’ailleurs résonnent avec effroi et terreur dans notre tête quand on regarde The Handmaid’s Tale et l’on met en parallèle la série avec les évènements qui ont menés à la prise de certains territoires du Moyen-Orient, par des extrémistes similaires à ceux de Gilead : Daesh. Des extrémistes qui utilisent d’ailleurs des femmes comme des objets, que l’on s’échange et cache, sans scrupules. Un peu comme ces servantes. Peu importe le livre religieux qui les inspire, ce qui est à noter ici est que la religion n’est pas le problème. Le problème est l’homme, qui l’utilise à ses fins.
Résistance
Si The Handmaid’s Tale est une série qui fait extrêmement froid dans le dos, en créant stupeur, mal-être et douleur chez le spectateur face à ce qu’endure son héroïne, elle est aussi une série qui appelle à la résistance. L’un des premiers sentiments que le spectateur ressentira est de la colère. Une véritable colère. Une colère animée par la peur que cela devienne réalité. Une colère qui appelle à la résistance. Toute forme de résistance. Mais aussi à l’espoir. Dans cet état de soumission totale, de violence physique sous couvert de moralité religieuse, l’héroïne, June, se découvre une force, une résistance et un caractère qu’elle ne soupçonnait pas.
La série est une ode à toutes ces femmes soumises qui depuis la nuit des temps, sont bien plus fortes et résistantes, voire des pionnières dans certains changements sociétaux, alors que ces dernières n’ont pas de voix ou de droits. Même dans une société aussi répressive et totalitaire – mais aussi schizophrène (le Cerveau pense aux Jezabels) – que celle de Gilead, June ne se laisse pas faire, défie son statut, et reste quelqu’un d’intelligent qui sait profiter des opportunités qui lui sont offertes aussi dérisoires qu’elles puissent être. Nolite te bastardes carborundorum. Bitches.
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