Le Maxihommage à Maurice Sendak

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Ce mois-ci, retombez en enfance avec le Maxilivre hommage à Maurice Sendak paru chez Little Urban, dédié au travail du grand artiste de la littérature jeunesse.

Il y a des œuvres dont l’intemporalité emporte des récits et des dessins bien au delà d’une seule génération. Des histoires qui ont bercé nos parents avant de nous transporter nous-même, et qui, un jour, accompagneront nos petits à leur tour. Parmi les auteurs qui ont su s’adresser aux enfants, on trouve aux côtés d’autres grands noms, tels que Tove Jansson et le Dr Seuss, un certain Maurice Sendak.

SENDAK_300_AEt pour cause, dès sa sortie dans les années 1960, Max et les MaximonstresWhere the wild things are dans sa version originale – a été l’un des premiers livres de beaucoup d’enfants et reste, encore aujourd’hui, une œuvre magistrale de la littérature jeunesse. Bien que son moyen d’expression soit avant tout le dessin, on retient facilement l’œuvre de Maurice Sendak pour son incroyable capacité à parler aux plus jeunes. En effet, contrairement à un certain nombre d’auteurs plus ou moins actuels, Sendak ne prend jamais les enfants pour des êtres dénués de sens critique, incapables de comprendre des récits complexes. Bien au contraire, il parvient à les emmener vers de nouveaux horizons, à les faire réfléchir et rêver simultanément, osant, en bon avant-gardiste qu’il est, apporter un certain côté transgressif dans le monde très encadré de la littérature jeunesse.

A l’heure où la censure dans les ouvrages destinés aux enfants est vive, parfois même destructrice de créativité sous couvert de protection des jeunes esprits contre la rudesse du monde des adultes, il est plus qu’appréciable de découvrir ou de re-découvrir l’univers aussi éclectique qu’intelligent de l’auteur américain.

Aujourd’hui, à l’occasion de la parution le 18 novembre dernier chez Little Urban du Maxilivre hommage à Maurice Sendak, le Cerveau vous propose de faire un saut à pied-joints dans votre enfance en vous replongeant dans le monde étrange et fantastique de l’auteur.

Entre onirisme et transgression

Il serait mal avisé de s’imaginer que littérature jeunesse veuille forcément dire univers rose bonbon et bleu azur où se côtoient licornes, peluches et bonnes intentions aussi douces que niaises. Aussi étonnant que cela puisse paraître à notre époque ; où la moindre œuvre à destination des enfants est scrupuleusement étudiée, voir censurée, afin de ne pas trop bousculer nos chères têtes blondes, et ce avec des arguments plus ou moins pertinents ; les polémiques ne sont pas le seul fait des ouvrages pour “adultes”.

En effet, s’il est considéré aujourd’hui comme un illustrateur et auteur émérite, Maurice Sendak fut, au moment de la parution de Max et les Maximonstres, l’un des auteurs jeunesse les plus controversés de son temps, déconseillé par plusieurs professionnels de la psychologie infantile de son temps, parmi lesquels Françoise Dolto. Si cela nous paraît assez incroyable aujourd’hui, il ne faut pas oublier que les ouvrages de l’auteur américain savaient se défaire avec talent des poncifs moralisateurs et donneurs de leçon qui étaient – et sont encore, malheureusement – l’apanage des histoires pour enfants. En effet, dans Max et les Maximonstres, le jeune héros, Max, défie l’autorité de sa mère, visiblement débordée par son capricieux rejeton. L’histoire ayant pour but de faire réfléchir et voyager son lectorat, on pourrait s’attendre à ce qu’au terme de son aventure, Max se rende compte que son comportement était intolérable et qu’il aille s’excuser auprès de sa maman. Or, Maurice Sendak offre une fin dénuée d’une quelconque morale traditionaliste, le jeune garçon rentrant chez lui simplement parce qu’il a faim et qu’il est en manque d’affection. Une remise en question de l’autorité parentale qui, dans les années 1960, a fait sauter au plafond nombre de parents et de professionnels du domaine de l’enfance.

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Mais il n’y a pas que le fond qui a interpellé les censeurs de l’époque : le style graphique unique de Maurice Sendak était souvent perçu comme “trop violent” pour un jeune public. S’il est vrai que l’univers de l’auteur puisse paraître sombre, à des kilomètres de ce qui se faisait pour les enfants en matière d’illustration, il n’en reste pas moins que ses jeunes lecteurs ne furent pas traumatisé pour autant. C’est d’ailleurs cette sensibilité si particulière qui fait de Maurice Sendak un incontournable de la littérature jeunesse.

Au delà de la subversion qui lui collait à la peau à ses débuts, Maurice Sendak dépeint un monde onirique teinté de réalité, où les histoires ne doivent pas forcément aboutir à une bête leçon de vie, préférant proposer aux enfants qui le lisent des contes beaucoup moins simplistes qu’ils n’y paraissent.

Un Maxilivre pour un Maxihommage

SENDAK_300 BA grand renfort d’auteurs spécialisés dans le domaine de la jeunesse, Little Urban a publié, le 18 novembre dernier, un très bel ouvrage en hommage à l’auteur américain, décédé en 2012 : le Maxilivre hommage à Maurice Sendak.

Ce beau livre nous plonge dans le monde si particulier de l’auteur au travers d’un catalogue de dessins, initialement rassemblés à la suite d’une exposition exceptionnelle qui était consacrée au travail d’une vie. Esquisses, des croquis préparatoires, productions alternatives à destination de nombreuses publications jeunesses ou encore créations de décors pour des ballets ou des opéras sont au programme de ce magnifique recueil, mais également l’intervention de douze historiens, auteurs ou bibliothécaires qui, par leur proximité avec le processus créatif de Maurice Sendak, nous permettent d’appréhender au mieux les soixante années de carrière de cet avant-gardiste de la littérature jeunesse du XXème siècle.

Une occasion unique de se remémorer les incontournables de l’auteur, à l’image du célèbre Max et les Maximonstres, mais également de découvrir ses œuvres plus confidentielles, comme Cuisine de Nuit, ou ses illustrations pour le New Yorker. Enfin, et surtout, de se laisser envahir par la poésie toute particulière d’un auteur jeunesse iconoclaste et unique à bien des égards.

Crédits ©Little Urban, James Keyser

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