Ghost in the Shell : 10 raisons de préférer l’original au film !

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A l’occasion de la sortie du film Ghost in the Shell de Rupert Sanders, le Cerveau vous offre 10 différences notables entre l’adaptation américaine et celle de Mamoru Oshii. Attention spoiler.

Après plusieurs mois de teasing interminables, le voilà enfin dans les salles obscures : Ghost in the Shell, de Rupert Sanders, l’adaptation live-action du célèbre manga de Shirow Masamune… Nous ne sommes pas encore le premier avril, et pourtant, une blague subtile vient de se glisser insidieusement dans cet article.

En effet, un rapide coup d’oeil à la bande annonce suffit à remettre nos pendules à l’heure : Ghost in the Shell de Rupert Sanders est bel et bien une adaptation de la version animée de 1995 de Mamoru Oshii, à qui l’on doit également l’excellent Avalon. Ghost In the Shell, le film d’animation, qui est d’ailleurs à nouveau disponible  en version restaurée Blu-ray depuis le 15 Mars 2017.

Il est toujours difficile de comparer une adaptation et un matériel original sans faire preuve de mauvaise foi et tomber invariablement dans le sempiternel “c’était mieux avant”. Or, si en Economie on a tendance à rappeler aux étudiants qu’il est tout à fait improductif de comparer ce qui n’est pas comparable, le Cerveau, pour sa part, n’a jamais cherché à devenir le nouveau Stakhanov du web et se complaît à perdre son temps en vaines (mais bougrement drôles) comparaisons inutiles.

Voici venu le temps de laisser de côté vos scrupules et votre sens de la mesure pour vous adonner à une activité oh bien jouissive : mettre en lumière 10 différences majeures entre le film de Rupert Sanders et celui de Mamoru Oshii.

1. Le propos du film

Dans la version animée de Mamoru Oshii, le réalisateur à fait le choix de s’éloigner de l’intrigue policère  pour s’intéresser un peu plus à l’aspect philosophique et métaphysique de l’oeuvre de Shiro.

Le manga, tout comme son adaptation animée, se penchent sur une réflexion assez profonde sur la question “qu’est-ce qu’être humain ?”. Le Major Kusanagi possède un corps robotique, seul son Ghost, son âme, est un phénomène purement humain et  la différencie des androïdes. Mais est-ce que cela fait-elle un être humain? Son enveloppe définit-elle son absence d’humanité ? Ou, au contraire, cela ne la rend-t-elle pas “surhumaine”, elle qui peut connecter son Ghost en réseaux comme personne ? Autant de questions que le film d’animation aborde avec beaucoup de doigté et de talent.

En revanche, dans la version de Rupert Sanders, le propos s’est décalé d’un cran (en dessous) : la question n’est plus de savoir ce qui fait notre humanité, mais plutôt de savoir qui est donc vraiment le Major, portant ainsi un propos beaucoup plus terre à terre et individualiste. Or, changer le propos du film de Mamoru Oshii, ou même du manga, c’est changer ce qui fait sa force, ce qui a donné à ce film un véritable statut culte ! Même si l’on met de côté que la tendance qu’ont les scénaristes de blockbusters à prendre leurs spectateurs pour des Bac -15, ce choix scénariste transforme d’une part le film en un Robocop version reboot vagin, mais modifie également profondément le personnage du Major !

T’en penses quoi Rob ?

2. Le major

D’ailleurs, parlons-en du Major Scarlett Kusanagi. Chez Shirow Masamune comme chez Mamoru Oshii, Motoko est un personnage profondément badass, même si la version manga lui donne un aspect plus taquin et drôle, tandis que la version animée favorise une approche plus introvertie du personnage. Les deux se complètent donc assez bien, fonctionnant comme les deux faces d’une même pièce.

Tandis que chez Rupert Sanders, le décalage du propos nous propose un Major Scarlett Kusanagi en plein crise existentielle niveau emo gothique du lycée. Car, croyez-le ou non, il  est très pénible de voir Scarlett Johansson faire la moue comme une ado dépressive pendant 1h45, le tout en se plaignant sur le même laps de temps que personne ne peut la comprendre parce que elle, son corps, c’est une machine, c’est vraiment trop pas juste, t’façon tu connais pas ma vie alors tu peux pas savoir c’que j’vis quoiiiiiiii ! Une logorrhée fatigante se terminant sur notre cyber-ado claquant la porte derrière elle.

Pourquoi personne ne comprend mes problèmes d’adolescente cybernétique, pourquoiiiiiiiiii

3. Bien vieillir

Avis à la population : si vous n’avez jamais vu la version de Mamoru Oshii, arrêtez immédiatement toute activité parasite – lire le Cerveau n’en étant pas une – pour aller le visionner. Si les fans du film animé ont beaucoup crié au scandale en apprenant l’adaptation en live action de Ghost in the Shell, c’est précisément parce que, au delà de son statut culte, ce dernier est une véritable perle visuelle. Le film n’a pas pris une ride. Il est toujours aussi beau, toujours aussi fluide et rythmé ; marqué par son époque, certes, mais proposant malgré tout l’un des plus beaux – si ce n’est LE plus beau – générique d’ouverture de japanimation.

Alors que le film de Sanders va fatalement subir le même sort que tous ses amis blockbusters bourrés d’effets 3D dans tous les sens : il va très mal vieillir. Si aujourd’hui les effets spéciaux peuvent paraître impressionnants, il ne faut pas oublier que dans le temps, ils deviennent ringards et maladroits. Raison pour laquelle l’un est resté culte, et que l’autre sera très facilement oubliable. Pour faire plus imagé, dite-vous que le film de Rupert Sanders c’est Pamela Anderson et celui de Mamoru Oshii c’est Sharon Stone. Voilà. (ami de la comparaison people, celle-ci, elle est pour vous.

Salut GITS ! Alors comment ça va, tu vieillis bien on dirrrrOH MON DIEU ARRIÈRE SATAN 

4. La Musique

Sur ce point, le film de Rupert Sanders a vraiment été original par rapport au reste de sa démarche : dans la lignée de Mamoru Oshii, Sanders a été chercher tout spécialement pour son film un compositeur de talent. Enfin, les deux jouent à armes égales ! Kenji Kawai, le compositeur attitré de Mamoru Oshii que l’on retrouve notamment sur Avalon, et son challenger, Clint Mansell, le papa de l’inoubliable BO de Requiem for a Dream.

Autant vous dire que le Cerveau s’attendait donc à une BO emblématique, puissante et exaltante ! Sauf que non. Au bout de 10 minutes de film, on ne l’entend même plus, tant elle est discrète, mécanique et presque sans âme. Et plus dramatique encore, en sortant de la salle, on est parfaitement incapable de se rappeler le thème musical du film. Ah si ! il y a bien un morceau qui marque les esprits dans cette adaptation : celle qui ouvre le générique de fin, composée par Kenji Kawai pour l’opening mythique du film de Mamoru Oshii.

 « Bon sang, que t’ont-ils fait Clint, que t’ont-ils fait ? » – Le Cerveau en écoutant la BO du film

5. Identité et medium original

Comme nous l’avons déjà soulevé précédemment, bien qu’il respecte le matériel de base, le Ghost in the Shell de 1995 se permet pourtant un aspect beaucoup plus philosophique et contemplatif que son homologue papier. De cette façon, son réalisateur est parvenu à lui donner une identité à part entière, lui offrant la possibilité d’être bien plus qu’une simple copie.

Alors que pour le film de 2017… il suffit de regarder le teaser et de constater que tous les plans sont des adaptations plan pour plan des scènes emblématique de Mamoru Oshii. Tant et si bien qu’on se demande pourquoi il n’est même pas mentionné aux côtés de Rupert Sanders à la réalisation. Peut être qu’il n’avait tout simplement pas envie de se taper l’affiche… –  (cinéma….affiche…. humour #wink #LeCerveauLol #Blaguepourrie)

Le Cerveau non plus chérie…. Le Cerveau non plus

6. Le rythme

Encore une fois, dans sa démarche, Mamoru Oshii avait décidé de donner à son Ghost in the Shell un rythme plus contemplatif, en accord avec la nouvelle couleur globale de son oeuvre, tout en conservant quelques scène d’action rapides et impressionnantes. Ce qui crée un rythme équilibré, jamais trop lent ni trop rapide. Une balade de santé pour les yeux et le Cerveau. Le cas du film de Rupert Sanders est autrement plus ennuyeux, et c’est le cas de le dire. Voulant à tout prix faire avaler du rythme blockbuster à une oeuvre japonaise réfléchissant au sens profond de l’humanité, le réalisateur américain a totalement fait valser l’équilibre fragile de la cadence cinématographique.

La conséquence est sans appel. Le Ghost in the Shell de 2017 est profondément lent pendant ses près d’une heure et tente vainement de réveiller son auditoire à grand coup de baston qui abusent du slow motion.

Image exclusive d’une séance de montage de Ghost in the Shell

7. Le méchant

Si vous cherchez un antagoniste dans le film de Mamoru Oshii, vous risquez d’être déçu. En effet, il n’est pas rare dans que les réalisateurs asiatiques fassent le choix de ne pas forcément mettre de “méchants” dans leur film, mais de proposer plutôt un panel de personnages défendant chacun un objectif différent des autres. Il n’y a donc pas de “bon” ou de “mauvais”, simplement des intérêts qui ne convergent pas.

Mais un blockbuster sans grand méchant, ce n’est pas un blockbuster ! Et c’est ainsi que Rupert Sanders nous gratifie d’une caricature de vilain de film d’action dont la scène finale peut se résumer de la manière suivante :

“ Ahahahah ! Je suis le méchant constructeur d’androïdes hyper puissants à ma solde ! Je vais enlever des petits n’enfants japonais pour les transformer en machines de guerre contre leur gré et boire les larmes de leurs parents mouahahahahaha !!!” “ Et moi, je suis Takeshi Kitano. Et tu vas roter du sang.” Balle dans le bide. Méchant mort. Takeshi a réussi à vous faire sourire 30 secondes sur l’intégralité du film. Retour à la réalité : il reste encore 15 minutes à tenir.

Comme Battle Royale nous l’a appris, faire chier Takeshi Kitano, c’est vraiment pas un bon plan

8. La nouveauté

Au risque de faire un peu redondant, le Ghost in the Shell de Mamoru Oshii propose une dimension plus profonde et complexe, s’échappant des écueils d’une intrigue de film policier pour aller flirter avec le film d’auteur.

Or, sur ce point, on ne peut pas reprocher à Rupert Sanders de ne pas avoir véritablement essayé d’apporter de la nouveauté à son Ghost in the Shell. Sauf que, comme disent toutes les mamans du monde qui savent beaucoup mieux que vous comment marche le monde, “l’enfer est pavé de bonnes intention”, suivi généralement de “le mieux est l’ennemi du bien”, et enfin de “maintenant tu lâches ta Nintendo et tu ranges ton bordel de chambre”.

Ce nouveau Ghost In the Shell très simplement à américaniser le matériel original, en lui apportant une dimension plus blockbuster hollywoodienne. Le propos du film est très simplifié et devient même simpliste, d’autant que les scènes d’exposition de l’intrigue sont légion et aussi subtiles qu’un menu Maxi Best Of supplément cholestérol. On a un gentil identifiable, un méchant identifiable, un sidekick sympa, un personnage-méchant-mais-non-en-fait-il-est-gentil-et-du-coup-il-meurt-au-trois-quart-du-film (marque déposée) identifiable, un couple amoureux identifiable (même si pour une fois ils ne baisent forniquent pas, ce qui nous donne le droit de lui attribuer une gommette dorée pour le féliciter), et même un happy ending.

Toi aussi, joue au bingo du blockbuster américain avec Ghost In The Shell

9. La qualitey

On va faire simple sur ce point : le film de Mamoru Oshii est mondialement reconnu comme un film culte, une perle absolue, un incontournable de l’animation japonais ; le film de Rupert Sanders est … est…. C’est joli hein !

Certes, il a le mérite d’exister. Ce qui ne l’empêche pas de réussir l’exploit d’être à la fois une adaptation médiocre, mais également un très mauvais blockbuster souffrant de graves problèmes de rythme et de scénario.

A ce niveau là, c’est Tiercé, Quarté et Quinté +.

Rupert Sanders rattant dramatiquement son coeur de cible

10. #pointobjectivité

Il y a Ghost In The Shell, le chef d’oeuvre de Oshii, et il y a la Créature Robocop du professeur Frankenstein 2.0

La vérité, c’est que le Cerveau voulait vraiment donner sa chance au Ghost in the Shell de Rupert Sanders. Dans la mesure où Hollywood nous a maintes fois démontré son incroyable capacité à prendre un matériel cinématographique de base d’origine asiatique afin de le recouvrir de sauce barbecue made in USA, industrielle et grasse à souhait ; la possibilité d’une belle adaptation, novatrice et respectueuse du manga, ne nous était pas venu à l’esprit. Et pour cause, puisque ce film n’adapte pas le manga, mais le film d’animation de Mamoru Oshii. Mais, au moins, le Cerveau espérait pouvoir se poser avec un grand bucket de pop-corn salés et apprécier 1h45 d’un bon blockbuster.

Le problème, c’est qu’à force de vouloir faire plaisir à tout le monde, on finit par se faire détester de tous.

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