Enième film d’horreur phare des années 80 remis au gout du jour, le Poltergeist de Gil Kenan manque cruellement d’originalité et de personnalité.

L’horreur cinématographique fait peur à voir en ce moment. Paradoxalement non pas à l’écran mais dans ce qui la compose aujourd’hui. Rares sont les films de genre à sortir en salles avec ce qui fait l’essence même des films d’épouvante : l’ambiance glauque, une musique stressante, une menace permanente et incompréhensible… Il fut un temps au début des années 70 où les films d’horreur proliféraient pour le plus grand plaisir des cinéphiles avertis. Et c’est en 1982 que Tobe Hooper sort sa version des esprits frappeurs Poltergeist qui avait su créer l’engouement, ne serait-ce que par les histoires de morts mystérieuses d’acteurs après la sortie. Donc après tout, pourquoi ne pas en faire un remake ?

Fantômes au foyer désespérés

poltergeist illus1Eric et Amy Bowen sont un couple d’américains moyens cherchant à s’installer en banlieue avec leurs trois enfants. Ils trouvent une petite maison qui ne paye pas de mine et s’y installent. Cependant, Madison, la plus jeune des Bowen, commence à avoir un comportement étrange : elle parle à son placard, fait allusion à des gens qui « arrivent », allume l’électroménager rien qu’en s’en approchant… Et ce n’est pas son frère Griffin qui trouvera à redire sur ces événements, surtout après s’être fait attaquer par des poupées et l’arbre en face de sa fenêtre. Les manifestations surnaturelles s’enchainent jusqu’à ce que Madison disparaissent et que les Bowen doivent faire appel à des experts du paranormal pour la retrouver.

Man VS Ghosts

Une fois que tout le monde se sera remis de ce scénario aussi extraordinaire et passionnant qu’un après-midi tricot, on passera vite fait sur les performances des acteurs : Sam Rockwell fait du Sam Rockwell service minimum, à savoir blasé et cool mais sans sa niaque habituelle, Jarred Harris qui campe le stéréotype du chasseur de fantômes à mi-chemin entre Laurent Delahousse et Crocodile Dundee, Rosemarie Dewitt joue les fantômes tellement elle est transparente et les gamins pourraient rester dans le monde des esprits que le spectateur les apprécierait plus. En ce qui concerne la réalisation, c’est on ne peut plus convenu avec aucune idée originale (si ce n’est celle du drone envoyé dans le monde des fantômes avec une camera, ce qui reste un peu léger pour un film de 93 minutes). En étant totalement honnête, le Cerveau a cru au début qu’avec les nouvelles technologies (iPhone etc), le film allait prendre une tournure intéressante (notamment après la scène où la grande soeur utilise son téléphone comme un sonar pour trouver l’origine des phénomènes). Mais non, c’était juste un gimmick à jumpscare comme les peluches de clown. Parce que ça fait peur les peluches de clown.

poltergeist illus3

Hollywood fais-moi peur

poltergeist illus2Pour la catégorisation en tant que remake d’ailleurs, à part quelques plans iconiques et la présence des fantômes, rien n’aurait pu empêcher le studio de le baptiser « Paranormal Activity : on a enfin un peu de budget« . Parce que soyons honnête, remettre au goût du jour un film qui à l’époque faisait partie de l’avant-garde des films horrifiques alors qu’aujourd’hui l’horreur grand public se résume à du gore-porn permanent, autant faire croire à un enfant ayant un iPad avec internet au bout des doigts que le Père Noël existe. Époques différentes, peurs différentes. Et ce n’est pas avec de beaux effets spéciaux que ça arrangera les choses (désolé jolie scène de visite du monde des poltergeist qui a du coûter un bras malgré l’éclairage fait par un ivrogne sur un tourniquet). Le principe de l’horreur, c’est de faire monter le suspense, de cacher la menace, de faire douter ses personnages. Pas de jeter des poupées sur des gamins.

Poltergeist échoue donc autant en tant que remake que film d’épouvante à part entière. Et ce qui est le plus rageant, c’est que ce n’est pas complètement de sa faute. Le cinéma de genre a de plus en plus de mal à se faire une place à cause de la bien-pensance d’Hollywood (un film d’horreur sans une goute de sang ? sérieusement ?). Poltergeist souffre principalement de ses prédécesseurs et paradoxalement du film dont il est le remake. Tout est convenu et calculé, même les jumpscare sont prévisibles et les enjeux dénués d’intérêts. Encore un film iconique sacrifié sur l’autel de l’argent.

Poltergeist : Bande-Annonce

Crédits : ©20th Century Fox