Luc Besson s’assure un bon retour sur le devant de la scène avec Malavita, un film de mafia à la française. Dis bonjour à mon petit copain !

Depuis la fin des années 90, ce n’était pas vraiment la joie pour Luc Besson. Entre des films sur des gardes du corps, des lilliputiens, des prostitués et des Audis, le grand public commençait à oublier Léon, le Cinquième Élément ou le Grand Bleu. Changement drastique de thématique pour Malavita où le réalisateur déclare sa flamme à Martin Scorcese dans un long-métrage  plein d’humour sur la mafia.

Bienvenue chez les pécores

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Giovanni Manzoni, ancien influent mafieux est en cavale. Après avoir balancé tout son gang, il bénéficie du système de protection des témoins à l’américaine. Il change donc d’identité et de nationalité pour se faire oublier. Il est accompagné de sa charmante famille, sa femme Maggie, sa fille Belle, son fils Warren et sa chienne Malavita. La dernière expérience dans le Sud de la France n’ayant pas été très concluante, tout ce petit monde est expédié au fin fond de la  Basse-Normandie. Nouveau cadre, nouveaux repères, il est question pour les affranchis de proprement se fondre dans le décors cette fois.

Graisse de fuck

S’il y a un mot pour résumer l’impression à la sortie de la salle, c’est bien celui que De Niro répète à outrance pendant toute la séance : Fuck. Et comme il est justement dit dans le film, un simple mot comme celui ci peut décrire une multitude de sentiments et de pensées. Voila une justesse qu’il convient d’utiliser pour qualifier la complexité de cette oeuvre à la frontière entre deux continents et deux cultures (le français Besson à la réalisation et l’américain Scorsese à la production, excusez du peu). Fuck parce que de prime à bord, la galerie de personnages présentée est complètement folle.

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La saga des Rougons-Macaronis

Le spectateur sait bien que si cette famille est dans cette situation, c’est à cause du père. Et pourtant, plus il découvre les autres membres, plus il se rend compte que le père n’est pas le seul atteint. Entre la mère Pfeiffer qui fait sauter une superette sur un coup de tête, la fille qui tabasse presqu’à mort un camarade de classe un peu trop dragueur avec une raquette et le fils qui se lance dans un trafic pas très net dans son collège, on est en droit de se demander si au final le père De Niro n’est pas plus sain d’esprit qu’il n’y parait. Et c’est quand il commence à fracasser un plombier légèrement vénal à coups de marteau, qu’on se rend compte que tout est normal en fait. Cette famille baigne dans le bonheur et l’hémoglobine.

Melting pot-au-feu

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Fuck ensuite parce qu’on nous a menti. Qu’on se le dise d’emblée, Malavita, c’est avant tout une comédie. Pas de règlements de compte entre familles siciliennes ou de racket de masse ici. Non, la première partie du film parle avant tout d’intégration, cette notion qui est si chère à la France, toile de fond du film. Quand le couple De Niro et Pfeiffer débarque, l’adaptation est rude. Besson n’y va pas avec le dos de la main morte et les clichés bien sales sur les américains et sur la campagne profonde française vont bon train. Qu’il s’agisse de la cuisine avec burgers et beignets d’un côté contre crème et beurre de l’autre, ou de la mentalité puriste contre les bons bourrins franchouillards.

Le choc culturel aussi est très présent dans Malavita. Les parallèles pris par les différents membres de la famille sont très représentatifs des valeurs sur lesquels ces deux cultures se disputent.

Soft power et dure réalité

Maggie se réfugie dans l’église la plus proche où ses confessions viennent se heurter à la morale plus laïque que chez l’Oncle Sam, la rejetant ainsi de la communauté qu’elle pensait retrouver en exil. Belle tombe folle amoureuse d’un prof remplaçant et entreprend déjà un amour pur à l’américaine. Déception quand elle fait face au pragmatisme français sur les histoires de coeur quand celui-ci lui apprend qu’elle n’était “qu’un bon moment”. Il en va de même pour Warren qui malgré ses bonnes notes, se fait attraper par le corps enseignant et le renvoie du collège sans sommation.

Seul De Niro semble bien s’en tirer en racontant ses histoires de gangsters aux autochtones qui boivent ses paroles, eux qui ne sont jamais allés plus loin que le village voisin.

Religion républicaine, amour volage et respect strict des règles mais adoration du soft power, Besson essayerait-il de nous dire quelque chose ?

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Le train Corail sifflera trois fois

Et fuck enfin parce qu’on a failli oublier qu’on parle de mafia dans Malavita. Et les représentants de ces derniers ne sont pas des enfants de coeur. Lorsqu’ils descendent du train au ralenti sur fond de Gorillaz, il est impossible de ne pas penser à un mauvais western spaghetti qui finit en apothéose lors de l’affrontement avec la famille Manzoni au complet. D’ailleurs, la façon dont Warren tient ses flingues n’est pas sans rappeler un mini Tony Montana, le nez moins poudré.

Sous ses airs de comédie au casting américain mais au traitement bien français, Besson nous offre ici un bel hommage au film de genre et le clin d’oeil à la filmographie du producteur sont multiples (ne serait-ce que la scène du club cinéma). Retour gagnant donc pour le frenchy qui pourrait bien sortir la tête de l’eau avec Malavita. Mais Fuck quand même.

Bande Annonce (VF)

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