Ceux derrière Matrix et le réalisateur de Cours Lola Cours ressortent de l’ombre avec Cloud Atlas, une épopée à profondeur émotionnelle et philosophique au-delà des réalités pragmatiques de notre monde.

Long métrage ambitieux, Cloud Atlas se déroule sur cinq siècles et s’interroge sur les questions existentielles qui ne cessent de hanter les hommes. Alternant entre action et scènes plus intimistes, il met en scène des êtres liés les uns aux autres à travers le temps. Il suggère ainsi que chaque individu a un cheminement personnel qui traverse les siècles. Les âmes se réincarnent et renouvellent leurs liens entre elles à l’infini, les erreurs peuvent être corrigées… ou répétées…

Un grand huit cosmique

Cloud Atlas est un grand huit cosmique mené d’une main de maître par le trio de réalisateurs Lana & Andy Wachovski avec Tom Tykwer. Ceux qui n’ont pas eu la chance de lire le roman de David Mitchell qui se voit porté à l’écran dans ce long métrage, Cartographie des nuages ne peuvent que tenter d’imaginer l’effort titanesque réalisé par ces artistes pour transposer à l’écran un récit aussi compliqué avec son style littéraire particulier et sa structure chorale. Six histoires qui se font écho sur deux siècles. Cloud Atlas, le livre et le film, est une leçon de philosophie teintée de spiritisme avec cette idée séduisante d’interconnexion spirituelle.

Un récit majestueux et astral qui revient sur les divers desseins tissés par les hommes à travers les âges et les répercussions de ceux-ci sur les générations futures. Une réflexion philosophique et surtout spirituelle sur notre condition humaine, le bien, le mal, servie par un élan lyrique séduisant qui à défaut de donner espoir, touche au plus profond de notre âme.

Interconnexion visuelle

Ce qu’on aime dans Cloud Atlas, c’est la déconstruction scénaristique qui s’y opère. L’harmonie d’un film choral inspiré par une œuvre littéraire singulière et déstructurée qui a permis au trio de réalisateurs de se lancer eux aussi dans un exercice de style au 7ème Art. Ici, on repousse les frontières de séquences classiques d’un film choral où chaque histoire est indépendante des autres jusqu’à la séquence finale, règle toujours respectée dans le genre. Le scénario de Cloud Atlas, lui, mélange toutes ces intrigues singulières du début jusqu’à la fin, à force d’échos de scènes et de segments narratifs qui se succèdent. Une intrigue d’interconnexion existentielle, où les âmes voyagent au fil des scènes que les réalisateurs ont tenu à transposer à l’écran en respectant l’œuvre originelle malgré sa complexité. Un challenge relevé pour une belle claque visuelle, entre la SF et le film d’auteur, avec ses histoires imbriquées les unes dans les autres.

La résonance narrative entre ces six récits ne se fait pas que visuellement. Elle se fait aussi musicalement avec une bande originale mystique et émouvante, composée par Tom Tykwer, Johnny Klimek et Reinhold Heil, un trio de compositeur qui se sont déjà illustré dans Cours Lola cours ou le Parfum; Un score qui donne vie à la symphonie imaginée par l’auteur et composée par Robert Forbisher, l’un des personnages du film : le Cloud Atlas Sextet. Une mélodie qui se veut comme une assonance qui voyage à travers chaque histoire pour être un personnage à part entière de cette cartographie spirituelle.

Six étoiles du Cinéma

Dans ce film, les cinéastes nous offrent une réalisation hors normes, entre vraisemblance historique et délire science-fictionesque, avec des effets spéciaux à en faire pâlir les plus grosses productions audiovisuelles et un montage des plus originaux. Un montage complexe pour donner vie au thème de « résonance karmique » au cœur de l’intrigue. Un thème souligné par les performances de grands acteurs au casting comme Tom Hanks, Halle Berry, Susan Surandon, Hugh Grant, Hugo Weaving, Ben Whishaw… Des acteurs qui se sont donnés le challenge de prendre la peau de six personnages différents pour un seul long métrage. Des prestations d’étoiles du cinéma justes et maîtrisées malgré un maquillage parfois peu convaincant, pour illustrer ces âmes qui s’incarnent à chaque nouvelle vie dans des personnalités différentes, fondamentalement bonnes ou mauvaises, voire double.

L’art de stimuler son audience

Cloud Atlas est un grand huit diégétique et graphique où la narration n’est plus une tâche mais plutôt un véritable exercice pour donner plus de profondeur à la Cartographie des nuages de David Mitchell. Avec des acteurs exceptionnels et une réalisation léchée, le spectateur suit ces images sans être passif, joue aux devinettes à reconnaître les acteurs sous leur maquillage travaillé, cherche les détails visuels qui font office de connecteurs logiques entre chaque époque, et surtout réfléchit.

Cloud Atlas est un film qui stimule son public grâce à cet univers codifié et sa spiritualité moins compliquée qu’en apparence, au-delà des codes de la SF et dramatiques, pour une véritable épopée sur grand écran comme on a rarement l’occasion de voir au cinéma. Des vies en six mouvements pour belle symphonie cinématographique qui malheureusement ne conquerra pas tout les spectateurs, comme ce fut le cas aux USA où le film n’a généré que 27 millions de dollars au box office. On espère qu’en France, Cloud Atlas recevra les honneurs qu’il mérite en salle.

Cloud Atlas : bande annonce VOST

Crédit photos : ©Warner Bros 2013