Les malheurs de Sophie : La critique

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 Critique de l’adaptation en BD du classique de la littérature enfantine Les malheurs de Sophie.

On connaît tous l’histoire des Malheurs de Sophie. Sophie est une petite fille chanceuse : elle grandit dans une famille aisée, entourée de domestiques, de sa chère maman et de son cousin Paul. Son papa n’est pas souvent là, mais il lui envoie de beaux cadeaux qu’elle peut montrer fièrement à ses amies Camille et Madeleine ! Mais Sophie est une petite fille un peu difficile : gourmande, entêtée, tête en l’air… Ce n’est pas qu’elle soit méchante ! Mais elle n’en fait qu’à sa tête et c’est souvent elle qui finit par pâtir de ses propres bêtises…

Des omissions regrettables

Les malheurs de Sophie en BD  a de belles qualités. Le scénariste, Maxe L’hermenier, respecte les dialogues de la Comtesse de Ségur presque à la lettre. On a le plaisir de retrouver Sophie dans ses aventures turbulentes dans la campagne française du XIXème siècle. Et si on n’a pas lu le roman dont elle s’inspire, cette B.D est agréable avec un graphisme réussi.
Malheureusement, rares sont ceux qui n’ont pas lu Les Malheurs de Sophie étant enfants et on remarque très vite des omissions. Maxe L’hermenier s’est aussi sentie obligée de s’adapter à l’hypersensibilité des lecteurs du XXIème siècle. Plus d’abeilles ou poissons coupés, pas de poulet volé et mangé par un vautour ou d’âne battu par Sophie. Un choix regrettable car c’est souvent dans ces histoires là qu’on cernait mieux le personnage de Sophie.

D’autant plus que même si les méthodes d’éducation sont aujourd’hui plus que discutables et vaudraient à Madame de Réan une petite visite des services de protection de l’enfance, Les Malheurs de Sophie, œuvre en partie autobiographique, a toujours permis d’avoir une vision de l’éducation durant le Second Empire, de la vie à cette époque. L’adaptation retire totalement cette saveur historique.

De plus, quand le roman de la Comtesse de Ségur tenait quelques sagesses et leçons de morale qui feraient du bien aux enfants rois d’aujourd’hui, la bande dessinée se contente de relater les anecdotes d’une petite fille loin d’être modèle. Maxe L’hermenier conserve le texte d’origine mais raccourcit souvent la repentance et les punitions de Sophie. Quand, dans le roman, on sentait que la petite fille comprenait ses bêtises et apprenait sa leçon (même si elle ne la retenait pas souvent), dans la B.D, l’effet ne disparaît que trop souvent.

Dessin agressif

Si le texte est respecté le trait de Manboou, par ailleurs excellent, n’aide pas à sympathiser avec la petite Sophie. La Comtesse de Ségur peignait une petite fille désobéissante, turbulente mais avec un bon fond. Elle est certes parfois cruelle, mais il s’agissait de la cruauté innocente et inconsciente qui caractérise les jeunes enfants. Malheureusement Manboou s’inspire beaucoup de l’univers manga dans le dessin de ses personnages, rendant le visage et les expressions de Sophie beaucoup plus durs et agressifs, très proches de Candy mais sans la candeur de l’héroïne des mangas. Madeleine et Camille, les gentilles petites filles modèles, ressemblent à des pestes imbues d’elles-même avec leur visage en triangle. Ainsi, Sophie n’est plus une jeune enfant de quatre ans inconsciente de ses actes, mais ressemble à une sociopathe en devenir. On aurait préféré un coup de crayon qui s’inspire plus de la bande dessinée française. Malheureusement, la japanisation est partout désormais. Si parfois, elle est bienvenue, ici, elle gâche Les malheurs de Sophie.

Les malheurs de Sophie en B.D est à réserver aux enfants allergiques aux livres. Pour les autres, il est largement préférable de leur mettre en les mains l’oeuvre de la Comtesse de Ségur.

Crédits photo ©2012 Editions Vents d’Ouest

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