Defiance : Shtako ou génie in progress ?

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2.5

Defiance saison une s’est achevée mardi soir sur les écrans de SyFy France. Bilan d’une saison bien en dessous de son potentiel, entre le shtako et le génie SF. On debriefe.

s01_DocYewll_01Il est loin le temps de Battlestar Galactica, de Stargate SG-1, Firefly ou Farscape. Ces dernières années, il est dur de trouver un programme de pure science-fiction, au-delà de Doctor Who, qui puisse satisfaire les amateurs du genre où le simple sériephile. Après le ratage marqué et marquant de Terra Nova l’année dernière, l’arrivée de Defiance présageait enfin une renaissance de la SF comme on l’aime à la télévision, surtout avec un pilote aussi prometteur que celui qu’on nous a offert. Malheureusement le bilan de fin de saison reste mitigé pour une série qui se cherche toujours 12 épisodes plus tard. Defiance s’est conclue ce mardi soir sur les écrans de SyfyFr dans un final qui ouvre enfin des possibilités pour exploiter ses ressources comme il se doit la saison prochaine. Il faut avouer que cette première saison est vraiment frustrante. Retour sur une série bien en dessous de son potentiel.

Transmédia

Le premier problème dont souffre Defiance est d’être une série transmédia. Reposant sur un concept intéressant mais néanmoins risqué, la série se couple à un jeu vidéo développé par Trion Worlds. Un third person shooter qui se passe à San Francisco et qui vient se greffer à l’intrigue de la série de Syfy. Ce jeu, lui aussi, laisse un arrière-goût d’inachevé si on y joue sans avoir posé les yeux ne serait ce que vaguement sur la série. La série, comme le jeu, sont deux produits étudiés pour se compléter, ce qui bien évidemment exclu la possibilité de se cantonner qu’à un seul produit Defiance. Ce qui est bien dommage, puisqu’il faut avoir joué pour comprendre certaines références de l’univers de la série et vice versa, quand on est sur ce MMO science-fictionesque qui se laisse bien jouer, même s’il ne propose pas de véritables nouveautés dans son genre.

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Avec Defiance, quand même, l’expérience de spectateur gagne en interactivité grâce à cette initiative transmédia. Pour un premier essai dans l’idée, le résultat est plus que correct et reste très appréciable, s’amusant à surfer d’un univers à l’autre. Malheureusement, le jeu ne suffit pas à compenser les défauts de la séries, dont les idées inédites qui auraient pu être à saluer, non pas été exploitées comme il se doit. Des idées qui auraient pu être explosives, surtout vu le cachet de l’équipe derrière la série : Rockne S. O’Bannon (SeaQuest DSV, Farscape), Michael Taylor (Battlestar Galactica) et Kevin Murphy (Caprica).

Déjà vu mollasson

Defiance0112_ERepInvasionDefiance, c’est le mythe de la frontière revisité version Syfy. Western futuriste assez pauvre en action et pas assez développé dans son écriture, Defiance suit le chemin balisé que l’on craignait : à savoir se disperser sur la multitude de personnages et leurs relations. Les différentes histoires de cette nouvelle ville restent très superficielles et déjà vues, centrées quasi exclusivement sur l’exploration des protagonistes, qui même si intéressante, se fait tout en mollesse et sans réel rythme. Le rythme, un élément quasiment absent la plupart des épisodes. En effet, la première partie de cette saison se concentre beaucoup trop à établir ses personnages dans leur environnement, développer les interactions entre ces races qui tentent de co-exister ensemble avec leurs us et coutumes souvent incompris. Surfant sur les conflits interraciaux, Defiance est un melting pot de beaucoup trop de genres pour une série de science-fiction qui veut avoir plusieurs niveaux de lecture. Un échec sur ce plan surtout causé par son écriture inégale qui se perd dans une arborescence d’intrigues diverses et variées sans réel schéma narratif cohérent.

Large spectre sous exploité

Entre méandres politiques, intrigues mystico-fantastiques et le cop-show fantastique, Defiance tente de surfer sur plusieurs genres, tant sur le plan narratif que sur les codes imposés par le genre de la série, sans pour autant se focaliser sur l’essentiel ni même se construire un arc narratif solide qui puisse satisfaire le spectateur.

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L’intrigue très vite développée autour du Maire Nicky, présentée comme une antagoniste de choix s’est vite transformée en une perte de temps considérable au dixième épisode de cette première saison. Une perte de temps qui aurait pu laisser place à d’autres personnages au cœur du véritable fil rouge de la série : à savoir Irisa et Nolan ou le Dr Yewll. De même, on s’attarde sur la liaison entre Sthama et Kenya mais pas assez, on survole la relation d’Amanda et Kenya, ces deux sœurs que tout oppose, on donne beaucoup de place au mariage d’Alak Tarr et à sa famille de Castithans, et surtout aux affrontements politiques et conflit d’intérêts des divers habitants de la ville, sans créer de véritables interrogations ou l’envie d’en savoir plus. Si les personnages n’étaient pas aussi attachants, les langages et costumes aussi travaillés, le spectateur aurait sûrement déserté depuis longtemps. C’est le problème de toute série aussi riche en personnages et diversité culturelle : ne pas avoir assez de temps, surtout en 12 épisodes, pour exploiter tout le potentiel qu’elle peut offrir.

Shtako ou génie in progress ?

Defiance0112_GlowyMineThingL’arc développé pour Irisa (Stephanie Leonidas), faisant d’elle une sorte d’oracle prophète, présentée comme un Ange de la Mort dans ce final du même nom, porteuse de tout les secrets des voltans voire de l’avenir de toutes les races confondues, est LA bonne idée de Defiance. Mais une idée une fois de plus bien en dessous de son potentiel et surtout réellement proposée que dans les deux derniers épisodes. Si la connexion se fait avec le peu d’indices proposés dans les épisodes précédents, elle est frustrante. 11 épisodes pour que les choses prennent forme, c’est un peu dur, surtout en science-fiction. Le final diffusé mardi soir donne enfin un semblant de réponses quant à cette intrigue mystique, sans vraiment aller au bout des choses. Les artefacts cachés dans Irisa sous-entendent une intrigue mystico-religieuse à venir, surtout avec ce cliffhanger des plus surprenants, qui propose la mort et la résurrection de Nolan (Grant Bowler), le sacrifice d’Irisa dans les Mines, la mort probable de Kenya par Sthama, et la prise de Defiance par la République de Terre….

C’est bien dommage car Irisa, jeune alien extrêmement charismatique, est le personnage qui porte la série, tout comme Sthama (Jaime Murray), la Castithan machiavélique amatrice du bonnet blanc et blanc bonnet (attention jeu de mot !) ou Amanda Rosewater, incarnée par la belle Julie Benz, qui reste un personnage secondaire bien en dessous des talents de l’actrice. On aurait aimé en voir beaucoup plus et que les femmes soient véritablement à l’honneur. On sait au moins que Defiance s’est assurée une nouvelle saison, en espérant qu’elle rectifiera le coche.

Crédit photo : ©Syfy

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