True Detective : True Horror

3

4.0

Excellent final horrifique pour True Detective qui arrive à satisfaire sans donner toutes les réponses. Attention Spoilers

True Detective est sans conteste la série de ce début d’année 2014. Jeu brillant de la part de Woody Harrelson et Matthew McConaughey, écriture au cordeau par Nic Pizzolato et réalisation parfaite de la part de Cary Fukunaga. True Detective c’est huit épisodes à ne surtout pas râter pour une série qu’on retrouvera certainement aux prochains Emmy Awards. Ce final, intitulé Form and Void., fera aussi longtemps parler de lui. Pour une fois, une série clôt une intrigue, mais laisse plusieurs questions en suspens. Le tour de force ici, c’est que le téléspectateur trouve cela normal et les questions laissées sans réponses semblent naturelles.

Naturelles, car la série a toujours été ultra-réaliste, de par ses personnages et sa réalisation. Et la crédibilité veut que deux hommes seuls, sans le soutien des autorités, ne peuvent pas démanteler toute une conspiration. Nic Pizzolato a aussi écrit True Detective d’une telle manière qu’il semble surtout sans interêt de continuer après ce dernier épisode. Alors oui, la conspiration court toujours, les Tully sont intouchés et surtout intouchables, mais là n’est pas le sujet de la série. Et ne sera pas non plus celui de la saison deux puisqu’on partira sur une toute autre histoire, True Detective se voulant être une anthologie.

Magnifique McConaughey

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La qualité d’écriture de Nic Pizzolato se retrouve aussi et surtout dans ses personnages. Rust et Martin évoluent à leur manière, sur une période de 17 ans, sans que cela semble trop rapide ni jamais trop marqué. S’ils changent, c’est dans les nuances. Ils ne deviennent pas une autre personne totalement. Rust reste un nihilliste du début jusqu’à une scène finale magnifiquement interprété par Matthew McConaughey (And the Emmy goes to…). Une scène finale parfaite qui conclut parfaitement la série, et son message : ce n’est pas l’enquête l’important, mais son impact sur les enquêteurs. Comment les horreurs auxquels ils font face détruisent leur vie. En effet, de flics respectées en 1995, ils sont devenus barman alcoolique pour Rust et détective privé divorcé pour Martin. Elles changent aussi leur croyance. Au final, pour Rust, la vie après la mort existe bel et bien. Visiblement, ceci n’est pas un grand réconfort pour lui.

Cette évolution fascinante des personnages ne cache pas pour autant l’enquête toute aussi fascinante mais surtout horrifique. Le réalisateur Cary Fukunaga prouve ici qu’il n’y a pas besoin de kilolitres d’hémoglobine pour faire part de l’horreur des meurtres et prendre aux tripes. L’utilisation des silences, des pauses et une alternance entre les grands angles et des point de vues plus intimistes permet au téléspectateur de s’impregner de l’ambiance perturbante et désolante de True Detective. La lenteur assumée de l’intrigue est équilibrée par ces plans qui permettent de mieux s’intégrer dans la série. Le public n’est plus simple spectateur, mais devient un des témoins privilégiés. Et toute l’horreur est démontrée non pas parce que de pauvres femmes et enfants sont tués, mais parce qu’ils ne sont pas les seules victimes. Loin de là. C’est tout ceux qui sont liés de près ou de loin à cette affaire qui sont touchés, le téléspectateur compris.

Quelques lieux communs

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Là où True Detective pèche, c’est qu’elle se repose sur beaucoup trop de lieux communs et d’images intégrées dans l’inconscient collectif pour apporter toute l’horreur de son affaire. Le grand méchant est bien entendu un géant au visage scarifié, un peu simplet et qui est motivé par les abus qu’il a lui-même subit. True Detective nous sert aussi le cliché de la compagne négligée dont la douche n’a jamais été une de ses activités favorites et de la maison qui ferait le bonheur de tous les accumulateurs compulsifs qui se respectent. Ajoutez à celà quelques poupées défigurées, des tunnels sombres à n’en plus finir décorés de tags pseudo-religieux-symboliques et la voix du méchant qui semble venir de partout à la fois en racontant des inepties sans aucun sens mais tout de même térrifiantes, et on obtient un cocktail qui deviendrait vite imbuvable sans les talents combinés de l’équipe de True Detective.

Malgré celà, les huit épisodes de la série savent tenir en haleine le public, aussi bien pour l’affaire elle-même que pour connaître le destin de ses deux détectives décidement bien malmenés par cette affaire. True Detective prouve aussi et surtout qu’on n’a pas besoin qu’une affaire criminelle soit complètement résolue, que toutes les réponses n’ont pas besoin d’être données pour offrir une fin satisfaisante. Beaucoup ont tenté de le démontrer avant elle, mais True Detective est la première à réussir sans que le public reste sur sa faim.

Crédits Images : ©HBO

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